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Les émeraudes Du Prophète

Les émeraudes Du Prophète

Titel: Les émeraudes Du Prophète Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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rentrons ? Est-ce trop demander ?
    — À moi, oui. J’ai, ce soir, une visite importante à faire. Je devrais dire : nous avons, ajouta-t-il avec un coup d’œil à Adalbert dont la mine à cet instant précis était celle d’un épagneul malheureux, et qui se hâta d’ailleurs de prendre part au débat :
    — Cette visite n’est pas si urgente ! Elle peut être remise d’un jour ou deux et j’avoue qu’avec les troubles sporadiques toujours susceptibles d’éclater en Anatolie, je serais plus tranquille si nous accompagnions Hilary !
    Morosini releva un sourcil ironique :
    — Pourquoi nous ? Tu devrais suffire à la tâche ? Vas-y si cela te chante !…
    — Mais nous étions convenus…
    — Disons que nous avions suggéré une idée, fit plus doucement Aldo qui n’aimait pas du tout qu’un obstacle se dresse entre eux et ne pouvait s’empêcher de déplorer que son meilleur ami ait choisi justement ce moment pour tomber amoureux. D’autre part s’il arrivait quelque chose à miss Dawson, tu serais très malheureux et moi j’aurais des remords. Partez tous les deux et oubliez-moi.
    — Alors promets-moi d’attendre que je revienne pour aller là-bas !
    Cette fois Aldo se mit à rire en constatant qu’Adal n’insistait pas pour qu’il les accompagne : ce voyage en tête à tête avec la dame de ses pensées devait le ravir…
    — J’essaierai, bien que je sois assez grand pour me débrouiller tout seul !
    — Je ne sais pas comment vous remercier, dit la jeune fille dont le regard inquiet s’était soudain éclairé.
    — N’essayez pas ! Cela n’en vaut pas la peine. Va donc jusqu’à la réception retenir vos places pour cette nuit et ensuite nous dînerons…
    Le repas fut rapide. Le train était à onze heures du soir et les deux voyageurs devraient se changer et préparer le léger bagage nécessaire à un court séjour encore que chez une jolie femme un « léger bagage » ne puisse se concevoir sans deux valises bien remplies. Le repas terminé, Morosini choisit de les laisser à leurs préparatifs et se retira chez lui après leur avoir souhaité d’obtenir ce qu’ils allaient chercher : la physionomie radieuse d’Adalbert, heureux comme s’il partait en voyage de noces, l’exaspérait et il ne voulait pas se laisser aller à de nouvelles incartades verbales. Quant à la lettre menaçante qu’il avait toujours sur lui, il décida de ne la lui montrer qu’à son retour. Il l’enferma dans la mallette en peau de porc qui contenait sa trousse de toilette.
    Du haut de son balcon dominant l’entrée du palace il vit le couple s’embarquer dans la voiture de l’hôtel qui allait les descendre au bac traversant le Bosphore pour les mener à la gare de Scutari sur le continent asiatique.
    Quand il l’eut vue disparaître, il resta là un long moment à contempler l’image magique de Stamboul et de la Corne d’Or scintillant, comme la robe d’Hilary, de milliers de petites lumières posées sur le bleu de la nuit. Puis vers onze heures et demi, jetant un manteau sur son smoking, se donnant l’allure d’un homme qui a l’intention d’aller passer un moment agréable dans une boîte de nuit, il descendit, demanda quelques adresses au portier mais en refusant qu’on lui retienne une table, prit une voiture et, à son tour, quitta le Pera Palace. La mise en demeure reçue tout à l’heure ne lui laissait pas beaucoup de temps : il fallait qu’il voie Salomé cette nuit même…

CHAPITRE VI
LA NUIT ENSORCELÉE
    — Entre, je t’attendais…
    — Je n’ai pas annoncé ma visite cependant ?
    — Non, mais je savais que tu viendrais un soir ou l’autre. Et depuis ce matin quelque chose me disait que ce serait celui-ci… Viens t’asseoir près de moi !
    Elle tendait vers lui un bras mince et rond, chargé de bracelets, une main fine, bosselée d’or et de rubis. Salomé, ce soir, était vêtue comme pour une fête, de longs voiles de mousseline jaunes et blancs brodés d’or entre les épaisseurs desquels brillaient des colliers et des agrafes précieux. Elle était à demi étendue au milieu des coussins, la tiare d’orfèvrerie qui la coiffait était plus somptueuse encore que la dernière fois et une longue natte tressée de perles d’or glissant sur une épaule semblait la continuer. Avec ses longs yeux noirs et ses lèvres rouges que faisait briller la flamme des lampes de bronzes posées à différents niveaux, la femme était

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