Les fils de la liberté
notamment à la célèbre prise de Québec avec James Wolfe en 1759 (au cas où vous souhaiteriez plus de détails, cette bataille est décrite dans une nouvelle, « The Custom of the Army », une aventure de lord John Grey, publiée dans une anthologie intitulée Warriors ).
Si je mentionne ici le brigadier-général, c’est en raison de l’intéressante histoire de sa tombe. Dans la plupart des récits de la bataille de Saratoga, il est dit qu’à sa requête il fut enterré le soir même de sa mort dans l’enceinte de la grande redoute (pas la redoute de Breymann, celle que Jamie prit d’assaut avec Benedict Arnold, mais une autre plus vaste se trouvant sur le champ de bataille). Certains auteurs ajoutent des détails, tels que la présence des rangers de Balcarres, ou le fait qu’en apprenant la tenue de la cérémonie, les Américains auraient tiré des salves en son honneur. D’autres historiens considèrent ces détails comme apocryphes et affirment que seuls les membres proches de son état-major y assistèrent.
Il n’est pas toujours possible de se rendre en personne sur un lieu que l’on décrit, et ce n’est pas toujours indispensable.C’est néanmoins souvent souhaitable et, fort heureusement, Saratoga est facile d’accès. Le champ de bataille est bien préservé et protégé. Je l’ai arpenté à trois reprises dans un laps de temps de plusieurs années après avoir décidé de faire de cette bataille en particulier le thème central d’un livre (même si ce n’était pas celui que j’écrivais alors). A l’une de ces occasions, alors que je me trouvais seule, sans autres touristes, j’ai discuté avec l’un des employés du parc (habillé en costume d’époque et posté devant la ferme de Bemis reconstituée). Après qu’il a eu patiemment répondu à de nombreuses questions indiscrètes (entre autres : « Portez-vous des sous-vêtements ? », ce à quoi il a répondu « Non ». Quand je lui ai demandé ensuite comment il faisait pour que ses culottes en homespun ne lui irritent pas la peau, il m’a expliqué « Je porte une chemise longue »), il m’a laissée manipuler son mousquet Brown Bess, m’a expliqué comment le charger et tirer, puis nous avons discuté de la bataille et de ses personnalités (à ce stade, je commençais à en connaître un rayon).
La tombe du général Fraser était indiquée sur la carte du parc, mais près de la rivière et non dans la grande redoute. Je m’étais déjà rendue sur place mais il n’y avait aucune plaque. Je demandai alors pourquoi elle n’était pas dans la grande redoute. On me répondit que le service du parc avait (je ne sais pas quand mais relativement récemment) effectué des fouilles dans la structure, y compris là où étaient censées être les tombes. A la surprise générale, le général Fraser n’y était pas. Personne d’autre non plus d’ailleurs. Une tombe avait bien été creusée et on avait trouvé un bouton d’uniforme mais pas de corps. (Le corps lui-même se serait décomposé depuis longtemps mais on aurait quand même trouvé des traces.) D’après un employé, il existe un récit selon lequel la tombe du général Fraser avait été déplacée près de la rivière et c’était pour cette raison qu’elle figurait là-bas sur la carte. Toutefois, personne n’en connaissait l’emplacement exact ni ne pouvait assurer que le général s’y trouvait réellement, d’où l’absence de plaque.
Les romanciers sont des gens consciencieux. Ceux d’entre nous qui traitent de l’histoire tendent à respecter autant que possible les faits dûment enregistrés (en ayant toujours àl’esprit que ce n’est pas parce que c’est écrit noir sur blanc que c’est forcément vrai ). Mais donnez-nous un trou dans lequel nous glisser, une omission dans les archives ou l’une de ces mystérieuses lacunes qui subsistent même dans les biographies les mieux documentées… Je me suis donc dit que le général Fraser avait peut-être été renvoyé en Ecosse (oui, on envoyait parfois des corps d’un côté et de l’autre de l’Atlantique au XVIII e siècle. Quelqu’un a exhumé ce pauvre Tom Paine de sa tombe en France dans l’intention de le ramener en Amérique pour qu’il y soit enterré avec tous les honneurs dus à un prophète de la Révolution. La dépouille s’est perdue en cours de route et n’a jamais été retrouvée. En parlant de lacune intéressante…).
Quoi qu’il en
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