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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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pour toi, mon fils. Tu vas de l’avant comme un taureau furieux… Et que veux-tu que je te dise ? Trahit sua quemque volupta [411] …
    Savait-il que sous cette maison se tiendrait un étrange conclave ? Un conciliabulum pour parler son langage ?
    — Il le faut, mon père… La sauvegarde du royaume l’exige.
    — Est-ce tout ce que tu peux me dire ?
    Il ne savait donc rien.
    — Hélas ! oui… Parlez-moi des dignitaires de ce chapitre.
    Le regard perdu dans les ramures d’un vitrail dont les lueurs d’azur et de cinabre ruisselaient sur un mur et les dalles, frère Isambert joignit les mains autour de son crucifix, non pour prier mais pour en dominer le tremblement :
    — Ils ne sont que six, et deux vivent dans la maison dont tu me parles… Et encore, le chantre et quatre autres frères sont allés faire une neuvaine à Saint-Savin. Guillaume Herbert, le chévecier, est donc seul pour ces Pâques. Il n’est pas souvent là dans le jour : il va et vient ; il tient les hébergements des fiefs d’Artige et de Charraud-de-Mons, de la baronnie de Chauvigny… Mais il dort dans son lit, tu peux me croire !
    — Demain, il n’y doit pas dormir… et peut-être aussi après-demain.
    — Pourquoi ? Pourquoi, mon fils ?
    Ogier n’eut que faire des gros yeux fixés dans les siens ; et tandis que le moine, d’une main câline, essuyait des miettes de pain accrochées à sa bure, il sourit :
    — Vous vous doutez bien, mon père, que je suis prêt à tout pour entrer et demeurer sous ce toit, en la seule présence de mon écuyer. Nous ne toucherons à rien… Il y aura, la nuit venue, un bal près du champ clos. On mangera et boira… Mangez, lichez avec ce Guillaume Herbert… Passez la nuit en sa compagnie, si je puis dire…
    Allait-il gagner sans avoir à combattre ? Le moine méditait, ses doigts amollis et douteux étalés sur son ventre, de part et d’autre de son étrange croix.
    — Je sais, dit-il, où mon frère met la clé lorsqu’il sort : il y a un creux dans la marche du seuil.
    Ogier se sentit étreint par le sombre besoin de dominer ce clerc. Il l’avait respecté, autrefois, et sans doute le gros presbytérien se méprenait-il sur la façon dont il l’interrogeait : une voix unie, d’une sérénité… céleste. Isambert, jadis, avait été de ces prêtres qui ne montraient aucune indulgence pour toutes sortes de péchés sauf ceux qu’ils commettaient en conscience. Il s’était émancipé de sa rigueur et peut-être de sa foi dans le commerce des malfaisants à la solde de Blainville.
    — Vous connaissez ce Guillaume Herbert ?
    — Il m’advient de le visiter.
    — Il a bien un défaut. La boisson ? La mangeaille ? Sinon, imaginez que quelqu’un le réclame à Artige ou ailleurs… Sachez que si vous ne faites rien et que s’il est présent, vous aurez son trépas sur le cœur.
    — Comme tu as changé !
    — Vous pensez bien que s’il voit ma tête, je ne pourrai le laisser en vie. Allons, je n’insiste pas : faites en sorte qu’il quitte les lieux.
    Un maussade plissement des lèvres : le clerc acceptait. Ogier fit tinter son épée sur les dalles, puis la releva et, considérant la bouterolle arrondie du fourreau :
    — En cas d’embûche, nous saurions nous défendre… et vous retrouver ; Ni votre croix singulière, ni votre froc, ni vos prières ne sauraient alors vous protéger.
    Il se leva, et sans se soucier du clerc traversa d’un pas léger le sanctuaire comme s’il craignait d’en réveiller tous les démons. Un moment, son regard s’arrêta sur un griffon avalant un homme.
    « Non, jamais Blainville ne me dévorera ! »
    Champartel s’approcha :
    — A-t-il consenti ?
    Derrière lui, Ogier imagina le tonsuré agenouillé, priant pour le salut de son âme.
    — J’ai exigé que la maison soit vide. Elle le sera.
    — On peut dire que notre sort est entre les mains de Dieu !
    Ogier désigna un chapiteau, juste au-dessus d’eux. Il représentait Satan tenant une pierre d’autel au-dessus de la gueule de l’enfer. De chaque côté de cette créature hideuse, un démon tout aussi horrible empoignait un homme épouvanté.
    — Non, Thierry, pas de Dieu mais du diable.
     

ANNEXES

ANNEXE I

LA BRETAGNE,
LA FRANCE ET LES JUIFS
    I. – Les Juifs vivaient en paix dans les états de Bretagne lorsque Jean I er les en fit chasser. Ce chrétien plein de zèle, fondateur avec sa femme, Blanche de Champagne, de plusieurs

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