Les fontaines de sang
sortir de dessous le cadavre et courir lentement (?) sur la pente du terrain rocailleux ». Mais ce n’est pas tout : « le sang fumait (…) comme s’il eût conservé le feu de la colère et de la haine » de la victime.
À quoi bon citer la fin de ce chapitre. Elle est imbuvable. Comme du sang !
*
Une ultime question se pose : Pèdre était-il le fils d’Alfonse XI ou était-il le fruit d’un adultère entre sa mère et un Juif, comme la rumeur l’affirmait (ce qui expliquerait l’indifférence du roi Alfonse à l’égard de celui-ci et sa préférence pour ses bâtards) ?
Cette énigme n’est pas sans intérêt. La statue orante de Pèdre, au Museo Arqueologico Nacional (et décrite par Mérimée qui la vit au couvent de Saint-Dominique à Madrid avant que celui-ci fût détruit) est composite. La tête, qui est d’époque, montre un homme de type irréfutablement sémite dont un bandeau rappelant ceux des diadumènes aplatit des cheveux d’une nature ulotrique, c’est-à-dire crépus.
Fils légitime ? Fils adultérin ? Seule la reine Marie de Portugal pourrait nous répondre.
Annexe VII
Les amours de Pèdre : Dona Maria de Padilla et les autres
On ne sait trop quand naquit Maria de Padilla. Son père, le chevalier Juan Garcia, était un Castillan de la région de Palencia. Certains ont prétendu qu’elle était pauvre pour donner plus d’éclat, sans doute, au rôle qu’elle joua sur le cœur de Pèdre et sur l’Espagne. En vérité, les Espagnols ne s’en soucièrent guère. Quant à sa pauvreté, les amateurs de contes fleuris en sont toujours pour leurs frais : Maria était d’une famille aisée.
Elle appartenait à la suite de l’épouse d’Alburquerque, dona Isabel Meneses. Orpheline de père, issue d’une illustre famille dont les origines nobles apparaissent dès 1033, Maria avait du bien, comme on dit.
À l’instigation d’Alburquerque qui voulait maintenir le jeune Pèdre sous sa tutelle, Maria rencontra le roi entre le 20 mars et le 22 mai 1352, à Sahagun, alors que Pèdre venait de traiter avec le défenseur de Gijon, Pero Carillo. Elle séjournait dans cette ville avec dona Isabel de Meneses et cette entrevue avait été soigneusement préparée par Alburquerque et Juan Fernandez de Hinestrosa, oncle de Maria. Leur dessein consistait, en favorisant cette liaison, à dominer le roi par amante interposée.
Quelques auteurs anciens ont affirmé que Pierre I er de Cas- tille épousa « la » Padilla avec toutes les cérémonies de l’Église et qu’il obtint, en 1362, des Cortès de Séville, la confirmation de cette union. Un fait est sûr : le roi ne s’embarrassait d’aucun scrupule pour concrétiser ses desseins. Il semble que Maria fut sa seule vraie passion.
Ce qu’on sait moins sur la fidélité de Maria, c’est que trouvant son royal amant trop volage, notamment lors de ses brèves amours avec Juana de Castro, elle s’adressa au Pape en lui demandant permission de fonder, dans l’évêché de Palencia, un monastère où se retirer. Pèdre favorisa un temps ce projet, mais Maria n’embrassa pas la vie religieuse.
Ses contemporains la disent belle, voluptueuse. D’emblée, elle avait su montrer qu’elle serait digne de régner sur l’Espagne. Mais il y avait Blanche de Bourbon.
En 1358, lors d’une nouvelle infidélité du roi avec dona Aldonza Coronel, les amours de Pèdre et de Maria se dénouèrent. Ils se réconcilièrent et quand Maria mourut, peu après dona Blanca, en 1361, elle laissait un fils, don Alfonso, et trois filles. Alfonso fut reconnu prince héritier. Pèdre, dans le traité de 1362 avec Pierre IV d’Aragon, concerta le mariage du prince avec la princesse aragonaise dona Leonor tout en promettant de prouver la légitimité de son mariage avec sa maîtresse antérieurement au mariage de Blanche. Il promit d’obtenir du Pape la déclaration de légitimité pour don Alfonso. Dans la même année, en effet, les Cortès de Séville (mais étaient-ce les vrais Cortès ?) firent la déclaration de mariage avec dona Maria et légitimèrent les enfants. Cependant, le traité avec Pierre IV ne s’accomplit point. Alfonso mourut en bas âge. La déclaration des Cortès fut acceptée, ensuite, par Philippe II qui ordonna la translation des cendres de Maria à la Nouvelle Chapelle 438 .
Les filles que la favorite avait eues de Pèdre eurent des destinées différentes. Béatrix s’enferma au couvent de
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