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Les joyaux de la sorcière

Les joyaux de la sorcière

Titel: Les joyaux de la sorcière Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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vendait presque tous dignes de figurer dans un musée ou dans un trésor royal. Il fallait qu’il en soit ainsi pour justifier à ses propres yeux l’idée saugrenue d’aller chercher outre-Atlantique une parure dont il ne savait absolument pas si elle s’y trouvait et de courir sus à un homme qu’il tenait pour un meurtrier – ce dont il n’avait pas la moindre preuve ! – et dont il n’avait jamais eu à se plaindre. Un homme dont il y avait gros à parier qu’il appartenait à la Mafia. Pour venger une inconnue ? Oui, sans doute, mais peut-être aussi pour l’amour du sport, pour suivre son flair sur une piste qu’il sentait chaude… et pour essayer d’empêcher Adalbert de faire une sottise : la « princesse égyptienne » était ravissante mais elle était la fille d’Ava Astor, ce qui n’annonçait rien de bon pour la paix de l’âme d’un brave archéologue français. En résumé la somme de ces éléments constituait autour de ce voyage une auréole assez excitante et Aldo se surprit à sourire d’aise en regardant la vallée de la Seine défiler derrière les vitres tout en allumant sa dixième cigarette.
    L’arrivée à la gare maritime du Havre lui arracha un sifflement admiratif : le paquebot Île-de-France était réellement une magnifique unité ! Avec sa longue coque noire, ses superstructures blanches et ses trois cheminées rouge et noir, le dernier né de la Compagnie Générale Transatlantique n’était peut-être pas le plus grand des navires alors en exercice – 241 mètres de long quand même ! – mais il alliait la majesté à l’élégance des lignes, de son style de vie et ses aménagements intérieurs étaient incomparables. Un journaliste américain avait écrit de lui qu’il « était beau sans grandiloquence, confortable sans mièvrerie, mondain sans mépris et incarnait sur mer l’idée que les Américains se faisaient de la France (8)  ». Aldo pour sa part pensa que ce serait un réel plaisir de voyager sur ce beau coureur des mers et s’en convainquit en recevant à la coupée l’accueil courtois du Commissaire en second qui le confia à l’un des grooms en uniforme aux couleurs de la Compagnie pour le conduire à la cabine première classe où il logerait les cinq jours suivants. Moderne mais sans outrance, extrêmement confortable avec ses meubles en macassar et citronnier, ses tentures crème et sa moquette d’un brun profond, sa salle de bains étincelante où rien ne manquait, ses lampes à l’éclairage opalescent, elle était vaste et claire.
    Ce n’était pas la première traversée de Morosini mais la dernière remontait à l’avant-guerre et si de notables changements lui apparaissaient il n’avait pas pour autant oublié les règles du bon passager. Aussi sonna-t-il un steward pour défaire ses valises, en ranger le contenu dans la penderie, et signer les paperasses de la douane et du passeport. Cela fait, il réendossa son imperméable, se coiffa de sa casquette et remonta sur le pont principal pour assister au départ. Le temps était gris, frais et légèrement pluvieux mais sur le quai il y avait une véritable foule agitant des mouchoirs et poussant des cris quand la sirène du navire eut retenti par trois fois. Tirée par ses remorqueurs, l’ Île - de-France s’écartait du quai dessinant un canal qui allait s’élargissant, révélant les silhouettes de ceux qui restaient dont on ne voyait jusque-là que les têtes et les bras. Aucun signe d’adieu ne s’adressant à lui, Aldo s’était placé à l’écart et tandis que la gare maritime s’éloignait lentement, il pensa que pour ceux qui restaient – il avait pu remarquer plusieurs visages en larmes ! – le départ d’un paquebot était plus cruel que celui d’un train parce que beaucoup plus lent. Il avait toujours détesté qu’on l’accompagne quand il partait en voyage et se félicitait de ce que Lisa eût la même horreur des « au revoir » au bord de quelque moyen de locomotion que ce soit. Ainsi, l’avant-veille, elle lui avait interdit de la conduire à son sleeping du Simplon-Orient-Express, n’autorisant que Marie-Angéline et Cyprien à l’escorter pour s’assurer que le départ se passait au mieux. Cette fois, pourtant, il avait protesté, désireux de rester auprès d’elle le plus longtemps possible mais en s’arrachant à son étreinte avant de monter en voiture rue Alfred-de-Vigny, elle lui avait lancé :
    — Il n’y a aucune

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