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Les "Larmes" De Marie-Antoinette

Les "Larmes" De Marie-Antoinette

Titel: Les "Larmes" De Marie-Antoinette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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pour le fluide vital de notre médium. Malheureusement, ce genre d’intervention n’est pas rare…
    Tandis que le jeune homme exécutait « Plus près de Toi, mon Dieu », Aldo qui tenait à son idée proposa :
    — Il serait peut-être mieux de jouer l’un des airs favoris de la Reine ? Elle aimait chanter mais des romances de l’époque.
    — Cela me paraît judicieux, approuva le jeune homme de son coin. Je vous propose cet air.
    En sourdine il entama « Nina ou la folle d’amour ».
    Interprétée sur harmonium au lieu du clavecin dont on accompagnait autrefois Marie-Antoinette, la mélancolique mélodie se dramatisait. Doucement, le jeune Baldwin se mit à chanter. On vit alors Léonora, totalement inerte depuis un moment, se redresser, lever la tête et prendre la suite du jeune homme mais cette fois encore ce n’était pas sa voix normale c’était celle fragile et inexpérimentée d’une jeune fille ou d’une très jeune femme qui prenait un évident plaisir à chanter même si elle n’y était pas fort habile. Et la stupeur se peignit sur ces visages plus ou moins tendus qu’éclairait la bougie : il y avait une indéniable trace d’accent allemand…
    Aldo qui depuis le début observait l’Écossais en se demandant à quoi rimait tout cela, le vit s’illuminer de joie :
    — Mon Dieu !… C’est elle ! souffla celui-ci. Elle… enfin !
    La chanson mourut, la musique se tut. Puis l’on entendit Crawford tremblant d’émotion :
    — Madame… Votre Majesté !… Est-ce bien vous ?
    L’étrange voix se remit à chantonner. Autour de la table la tension était palpable. Puis on perçut – et le timbre baissa de plusieurs tons, se chargeant de lassitude :
    — Je suis venue de loin… de si loin ! Hâtez-vous… Je suis bien fatiguée.
    — Un peu de musique vous aiderait ? Nous souhaitons tous tellement que vous vous sentiez bien…
    — Oui !… Un peu mieux ! Doucement !… Que voulez-vous de moi ?… Pourquoi m’avez-vous appelée…
    — Pour que la Reine efface nos doutes. Des événements terribles se produisent ici, des hommes tombent…
    — Il fallait qu’ils tombent ! Leur poids s’était alourdi à travers le temps… Ce qui arrive je l’ai voulu… Il faut que l’on me rende ce qui est à moi !…
    Depuis un instant, la langue d’Aldo le démangeait :
    — J’ai peine à croire que là où elle est Votre Majesté ait besoin de parures terrestres ?
    — Taisez-vous, malheureux ! s’écria Crawford. Vous allez la faire fuir… Madame, Madame, veuillez pardonner…
    — Ce qui est à moi est à moi !… Ce qui est à moi est à moi… ce qui est à moi est à moi…
    Tout en répétant cette phrase la voix s’affaiblissait, s’éloignait…
    — Madame ! implora Crawford, Madame ! Par pitié, restez !… Rappelez-la, Frédéric !… Jouez ! Jouez ce qu’elle aime !
    L’harmonium soupira les notes mélancoliques de « Plaisir d’amour » mais ce fut en vain. La tête de Léonora était retombée sur sa poitrine cependant que ses mains glissaient le long du fauteuil. Elle semblait évanouie mais respirait bruyamment.
    — Vous êtes sûr qu’elle n’a pas besoin d’aide ? hasarda Clothilde de Malden. Elle est vraiment pâle ?
    C’était aussi l’avis de Crawford : il se levait pour se pencher sur sa femme dont il prit le visage entre ses mains en murmurant des paroles incompréhensibles. Mais Léonora restait inerte :
    — Il faut pourtant que je la réveille ! Cela risque de devenir dangereux. Léonora ! Léonora ! Réveillez-vous !… M’entendez-vous !
    Pas de réponse.
    — Mon Dieu ! Il faut faire quelque chose ! Frédéric ! Venez m’aider à l’étendre !
    Et soudain tout se déclencha. Les yeux toujours clos, Léonora se mit à se tordre dans son fauteuil comme si elle était en proie à une vive douleur. Ses mains affolées cherchaient à repousser quelque chose d’horrible, d’étouffant. Un véritable hurlement de terreur s’échappa de sa bouche distendue :
    — Pas ça !… Par pitié, pas ça !… Je ne voulais pas !… Pardon ! Pitié !
    Ses yeux s’ouvrirent, plein d’une indicible frayeur et le hurlement devint strident. Affolé, Crawford semblait ne plus savoir que faire. On vit alors s’avancer le secrétaire. Sèchement, par deux fois, il gifla Léonora.
    — Vous êtes fou ! clama l’époux en se jetant sur le jeune homme pour lui arracher sa femme. Vous allez la

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