Les "Larmes" De Marie-Antoinette
passé. Vous possédez d’autres bijoux de même provenance ?
— Non, c’est le seul en dehors d’une infinité de boîtes à mouches, de tabatières, de boîtes à pastilles, de flacons, d’éventails et autres objets provenant de Versailles, des Tuileries et même du Temple et de la Conciergerie qui me sont plus précieux encore. Et que j’aimerais vous montrer. Pourquoi ne viendriez-vous pas dîner un soir prochain avec quelques amis ?… Ce serait pour moi un réel plaisir…
— Pour moi aussi, n’en doutez pas.
— En ce cas nous arrêterons une date avec ma femme. À présent je vous donne le bonsoir. Il est temps que je rentre.
Les deux hommes se séparèrent sur une poignée de main et Aldo rejoignit Adalbert, qui bavardait sur le coin d’un divan avec Elsie Mendl. Celle-ci riait beaucoup :
— Savez-vous que, selon notre ami, j’aurais d’innombrables points communs avec Néfertari, l’épouse du grand Ramsès II ! Décidément, j’aurai tout entendu !
Considérant le fin visage auréolé de ses cheveux argentés, Aldo sourit :
— Vous devriez le croire : il se trompe rarement quand il s’agit de l’Égypte ancienne et si vous acceptiez de porter une lourde perruque de laine noire…
— Je préfère rester ce que je suis ! En tout cas, ce soir nous avons ramassé une petite fortune… et aucun cadavre n’est venu troubler la fête…
En rentrant à l’hôtel, Aldo fit part à Adalbert de l’invitation de l’Écossais :
— Ce sera bientôt, je pense. J’ai l’intention de rentrer chez moi dès que possible.
— Vraiment ?… J’aurais cru le contraire.
— Eh bien, tu te trompais…
Puis baissant la voix jusqu’à un murmure trahissant une lassitude inattendue :
— Je ne suis pas un surhomme, Adal ! Quelqu’un dont j’ai oublié le nom a dit que la meilleure façon d’oublier une tentation était d’y céder mais il y en a qui peuvent mettre une âme en péril…
Soulagé, l’égyptologue passa un bras compréhensif sous celui de son ami :
— Une âme non… mais un couple peut-être. Elle est plus séduisante encore que dans mon souvenir, cette Pauline, et je sais bien pourquoi.
— Vraiment ?
— Allons ne joue pas les modestes ! Elle est amoureuse de toi et tu le sais pertinemment. C’est pourquoi je t’approuve d’employer la technique de Napoléon : la fuite et le plus tôt sera le mieux !
On venait de franchir la grille de l’hôtel à l’intérieur duquel les femmes de ménage étaient à l’ouvrage. Aldo alla s’asseoir dans un fauteuil de la terrasse.
— Tu crois qu’elle m’aime ?
— Mais je n’en sais rien ! gronda Adalbert furieux contre lui-même. Il avait voulu adoucir le désir de séparation affiché par Aldo et il avait échoué misérablement. Écoute, poursuivit-il, si je ne savais ce que je sais, je te dirais : passe-toi l’évidente envie que tu as d’elle puis, sans respirer, saute dans le Simplon Express ! Mais…
— Ça veut dire quoi : « Si je ne savais… » ?
— … que c’est déjà fait !… Pardonne-moi mais il m’est arrivé, l’été dernier, d’écouter ce qui se passait derrière certaine porte de bibliothèque.
— Ah !
Aldo était trop désorienté pour avoir le courage de se fâcher. Il leva sur son ami un regard peiné :
— Et tu penses ?
— Qu’il faut que ce soit la dernière nuit de Casanova ! Si tu recommences, tu auras encore plus de mal à t’arracher à elle et tu ramèneras à ta femme un époux défraîchi… Va dormir à présent ! Tu es fatigué et comme moi tu as trop bu. Quelques heures de repos, une douche et tu verras les choses différemment. Si tu veux, je t’accompagnerai à Venise…
— Ça, c’est une idée !… Tant pis pour le dîner de Crawford : on ramène Tante Amélie chez elle et on part !
— Sans oublier tout de même de faire nos adieux à Lemercier !
Depuis plusieurs heures Aldo dormait de ce bon sommeil des fermes résolutions quand le téléphone sonna lui apportant la voix courtoise et précise du chef de la réception : le journaliste Michel Berthier était en bas et insistait pour être reçu.
Un coup d’œil à sa montre affichant midi lui fit admettre que l’heure était plus que convenable pour une visite :
— Priez-le d’attendre dix minutes et faites-le monter ! Envoyez-moi aussi du café très fort ! Pour deux !
Il sauta à bas de son lit, se précipita sous la douche
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