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Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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simple chignon. Elle approuva. Ce n’était pas ce qu’elle souhaitait pour le bal du lendemain, mais pour ce soir-là, il suffisait amplement.
     
    Cinq minutes plus tard, sa femme de chambre annonça le comte Königsegg. L’intendant en chef entra dans le salon avec la mine d’un homme accablé – sans doute encore un problème de couple, pensa-t-elle. Elle avait tenté maintes fois d’intervenir dans leur détresse conjugale et de les aider de ses conseils. Mais désormais, elle se demandait lequel des deux elle plaignait le plus : lui d’avoir épousé la comtesse Bellegarde ou elle d’être tombée sur Königsegg. En tout état de cause, la comtesse devenait chaque jour un peu plus irascible, ce qui n’était pas vraiment surprenant vu que son mari, en plus de la tromper, s’adonnait à la boisson et au jeu ou cherchait du réconfort auprès d’un animal.
    Le général de division fit une révérence polie que Sissi, en bonne souveraine, accueillit d’un hochement de la tête encourageant.
    — Et les dents ? demanda-t-elle.
    La mine de Königsegg s’éclaircit dans l’instant.
    — Elles poussent ! Nous pourrons bientôt passer à la viande.
    L’impératrice sourit.
    — Que puis-je pour vous, comte ?
    — Je viens d’avoir un entretien avec le commissaire Tron, répondit-il d’une voix hésitante. C’est pourquoi je me permets de vous importuner.
    — Il est invité au bal de demain soir. A-t-il confirmé ?
    — Oui, il sera là. En compagnie de la princesse de Montalcino. Mais ce ne fut pas notre principal sujet de conversation.
    — De quoi avez-vous donc parlé ?
    — De l’attentat qui menace l’empereur.
    Sissi fronça les sourcils.
    — Pas plus tard qu’hier, nous avons vu l’épave devant la punta di Santa Marta de nos propres yeux. Je pensais que l’affaire était réglée.
    Königsegg soupira.
    — Le commissaire aussi le croyait.
    — Que s’est-il passé ?
    — Certaines circonstances, dit l’intendant en chef en guise d’introduction, font apparaître les événements sous un jour un peu différent.
    Lorsqu’il eut terminé son récit, l’impératrice garda le silence quelques instants. Elle finit par dire en secouant la tête : — Je n’arrive pas à y croire.
    — Pourtant, c’est vrai. Le commissaire m’a convaincu.
    — Donc, avec Crenneville, François-Joseph a nourri une vipère en son sein. Voulez-vous que je lui en parle ? demanda-t-elle d’un air soucieux.
    Königsegg leva les mains pour l’arrêter.
    — Surtout pas ! Sa Majesté convoquerait aussitôt le général d’artillerie, qui serait ainsi prévenu.
    — Quelle autre solution voyez-vous ?
    — Le commissaire Tron pense pouvoir désarmer l’homme à temps.
    — Comment ? Il ne le connaît pas ! Il ne sait même pas s’il s’agit d’un officier.
    — C’est ce que je lui ai fait remarquer.
    — Et qu’a-t-il répondu ?
    — Qu’il croit connaître l’heure et le lieu.
    — Cela ne lui sera pas d’un grand secours, objecta la souveraine. La sécurité de François-Joseph est tout entière aux mains de l’armée. Il y a trois barrages, poursuivit-elle après une brève réflexion, et une douzaine de personnes tout au plus peuvent passer le dernier. La garde civile ne peut même pas approcher mon mari. Je ne vois pas ce que le commissaire pourrait faire.
    — Il n’est pas obligé de s’approcher de l’empereur.
    — Ah non ?
    — Il suffit qu’il s’approche du tueur.
    — Mais au moment de l’attentat, l’assassin sera sous les combles du palais royal, non ?
    Königsegg hocha la tête.
    — C’est bien pourquoi le commissaire a besoin d’un laissez-passer et d’un uniforme.
    Sissi pâlit.
    — Vous voulez dire que…
    — Tron veut attendre le tireur et l’arrêter dans le grenier. C’est la seule solution.
    La souveraine se retourna, puis se dirigea vers la fenêtre et fixa l’obscurité. Königsegg se demanda ce qu’elle observait, le brouillard d’une nuit d’automne s’étant levé sur le bassin de Saint-Marc. Hormis quelques becs de gaz dans les Giardini, on ne voyait rien.
    Au bout d’un moment, la souveraine se retourna et déclara : — Je veux bien établir un laissez-passer au nom du commissaire, mais à deux conditions.
    — Lesquelles ?
    — Vous vous chargez de l’uniforme.
    — Volontiers. Et la seconde ?
    Quand l’impératrice l’eut énoncée, Königsegg blêmit.
    — Son Altesse ne peut quand même pas…
    Elle lui coupa la parole d’un geste

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