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Les Médecins Maudits

Les Médecins Maudits

Titel: Les Médecins Maudits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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gouverneur-protecteur de Tchécoslovaquie, n’en demandait pas plus. Il le regarda à peine, ne répondit pas à son salut et s’installa à l’avant de la Mercedes. Le soleil de ce 27 mai avait un petit air de juillet.
    Heydrich planait au sommet de sa gloire ; Himmler et Bormann le craignaient. Oui, il était dangereux depuis que le Führer lui avait laissé miroiter le portefeuille de l’Intérieur, le jour anniversaire de ses trente-huit ans. Reinhardt Heydrich devait tout à Himmler. – Je vous ai trouvé, dégrossi, fabriqué, poussé…
    Il avait été chassé de la Marine pour une affaire de mœurs. Imaginez un enseigne de vaisseau qui non content de saouler la fille d’un officier supérieur, la viole et lui « emprunte » de l’argent… Sans ressources, il choisit le « Parti » pour Armée du Salut.
    Le voici très vite gravissant les marches de son ascension vers le pouvoir. Intelligent, beau – grand et blond, – amateur de musique et de réceptions mondaines, électrique devant les femmes, passionné pour ses maîtres et leur nouvelle philosophie, il découvrait chaque jour un moyen nouveau pour plaire. Un seul complexe le rongeait : sa voix haut perchée, féminine, à la fois aiguë et blanche. Une note poussée par un fausset gigantesque. Mais ses pantalonnades et ses prouesses dans les maisons de rendez-vous le rassuraient sur l’avenir de sa virilité.
    La Mercedes aux ailes enrubannées de fanions SS et du drapeau de la Régence du Reich ralentit en abordant le dernier virage avant les faubourgs de Prague. Les deux ouvriers en bleu de chauffe attendaient à la sortie de la courbe. Ils rejetèrent leur musette en arrière et probablement sourirent. Une chance inespérée ! La voiture était décapotée. Heydrich fixait la route. Il en connaissait chaque nid de poule. Moins de dix kilomètres séparaient sa « résidence provinciale » du château impérial de Prague qui abritait ses services et ses fichiers.
    L’ouvrier tchécoslovaque, Josef Gabeik lâcha sa bicyclette et bondit vers la voiture, revolver au poing. Dès le premier coup de feu, le chauffeur lâcha l’accélérateur. Heydrich hurla et se leva.
    Dans la main de Jan Kubis, tapi un peu plus loin, dans le fossé, une lourde grenade-bombe, dont l’explosion était réglée à sept secondes. Kubis ne la lança pas mais la fit rouler comme une boule de pétanque. Heydrich tirait. Il blessa légèrement Gabeik. La charge quadrillée arrivait à la rencontre du cochonnet. Kubis et Gabeik se plaquèrent au sol. Avant d’être parachutés en Tchécoslovaquie ils avaient répété cent fois peut-être l’attentat dans une école spéciale des commandos en Grande-Bretagne … Tout se déroulait ici trop parfaitement. La bombe roulait, elle allait dépasser la voiture… Non ! elle explosa sous le châssis. Les deux hommes enfourchèrent leurs bicyclettes et disparurent dans un nuage de fumée. Kubis, à la seconde même de l’explosion, avait décapsulé deux pots fumigènes.
    Le fier Obergruppenführer fut un blessé détestable, pleurant, insultant, maudissant, implorant.
    —  Ne me laissez pas mourir !
    Sa chambre de l’hôpital municipal de la Bullouka vit défiler toutes les sommités médicales du Reich. Le professeur Hohlbaum recueillit sur le corps du blessé une vingtaine d’éclats avant de pratiquer l’ablation de la rate et d’extraire une balle. Le général SS Karl Gebhardt, professeur de clinique chirurgicale à la Faculté de Médecine de Berlin reçut l’ordre, signé Himmler, de sauver Heydrich.
    Cheveux en brosse, lunettes épaisses, nez cassé, lèvres fines, Gebhardt a raconté devant ses juges de Nuremberg les tentatives faites pour sauver le chef du service de sécurité :
    « J’arrivai par avion trop tard, après l’attentat ; il avait été opéré par deux chirurgiens connus de Prague et je n’eus qu’à contrôler le traitement. Hitler et Himmler téléphonaient chaque jour pour obtenir des renseignements et faisaient des suggestions dont deux prirent presque la forme d’un ordre : appeler mon maître, Sauerbruch et le médecin du Führer, Morell, qui désirait utiliser sa propre méthode.

Je n’hésitai pas à prendre nettement mes responsabilités ; la balle avait déchiré l’abdomen et la poitrine. L’opération avait été bien faite et des sulfamides employés. Je pense que trop de nervosité et de trop nombreux médecins mettent en danger la vie d’un malade,

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