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Les murailles de feu

Les murailles de feu

Titel: Les murailles de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Pressfield
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Spartiate, tandis que les nouveaux venus fonçaient sur dix rangs et se reformaient en phalange massive au-devant des Spartiates.
    Défaillant de fatigue, ceux-ci se retirèrent enfin. Ils s’effondrèrent les uns sur les autres.
    Je retrouvai enfin mon maître. Il était mal en point ; un genou en terre, il s’appuyait des deux mains sur une lance sans tête fichée dans le sol ; il s’y accrochait comme une marionnette cassée sur un bâton. Le poids de son casque entraînait sa tête vers l’avant ; il n’avait ni la force de l’enlever, ni celle de relever la tête. Alexandros s’écroula près de lui à quatre pattes, le sommet de son casque contre terre. Sa cage thoracique palpitait comme celle d’un chien de chasse, et un mélange de crachats, de salive et de sang suintait de ses jugulaires.
    Tégéates et Locriens continuèrent de faire reculer les Mèdes.
    Pendant un moment qui parut infini, le spectre de la défaite s’évanouit. Les Lacédémoniens se laissèrent tomber par terre, d’abord sur les genoux, puis à quatre pattes, puis ils s’allongèrent sur le côté et sur le dos, aspirant l’air avec difficulté. Leurs yeux étaient fixes, comme aveugles. Personne n’avait la force de parler. Encore tenues par des mains tétanisées, incapables de relâcher leur prise, les armes tombaient de leur propre poids. Les boucliers tombaient aussi, face contre terre, honteusement. Des hommes épuisés s’abattaient dessus, incapables de tourner la tête pour respirer.
    Alexandros cracha une poignée de dents. Quand il eut repris assez de forces pour enlever son casque, sa longue chevelure tomba par poignées, arrachée à la racine, engluée de sueur salée et de sang. Ses yeux étaient atones. Il s’écroula et enfouit comme un enfant sa tête dans le giron de mon maître, hoquetant de sanglots secs, comme il advient lorsque le corps n’a plus de fluides.
    Suicide vint, blessé par flèches aux deux épaules, mais n’en ayant cure tant il était content. Il se tenait debout devant les hommes effondrés, regardant au loin. Là-bas, les Alliés repoussaient les derniers Mèdes et les taillaient en pièces dans un fracas tellement affreux qu’il semblait qu’il fût à dix pas au lieu de cent.
    Les yeux de mon maître étaient des trous noirs derrière les œillères du masque. Il esquissa faiblement un geste vers le carquois vide sur mon dos.
    — Où sont mes réserves ? demanda-t-il d’une voix rauque.
    — Je les ai données.
    Un moment passa avant qu’il eût repris haleine.
    — À nos hommes, j’espère.
    Je l’aidai à retirer son masque. Cela parut interminable, tant son bonnet de feutre était trempé de sang et de sueur et tant ses cheveux étaient emmêlés et coagulés par le sang. Les porteurs d’eau arrivèrent, mais personne n’avait plus la force de tendre ses mains. On arrosa simplement les vêtements et les tuniques, que les hommes pressaient contre leurs lèvres pour les sucer. Dienekès écarta sa tignasse de son visage. Il n’avait plus d’œil gauche, mais une orbite béante et sanglante à la place.
    « Je sais » furent ses seules paroles.
    Aristomène, Bias et d’autres du peloton, Léon le Noir et Léon Vit d’Ane apparurent haletants, boueux, sanglants, les bras et les jambes couverts d’innombrables entailles. Eux aussi s’écroulèrent les uns sur les autres.
    Je m’agenouillai près de mon maître et pressai un chiffon mouillé sur son orbite vide, en guise de compresse. Le chiffon absorba du fluide comme une éponge.
    Devant, l’ennemi fuyait en désordre et les vainqueurs virent Polynice, seul encore debout, lever les bras. Il arracha son casque dégoulinant de sueur et de sang et le jeta par terre dans un geste triomphal.
    — Pas aujourd’hui ! hurla-t-il en direction de l’ennemi. Pas aujourd’hui !

2
    Je ne sais pas combien de fois, ce premier jour, chaque contingent allié prit ses postes sur le triangle délimité par les parois de la montagne au goulet, les falaises et le Mur Phocidien. Je peux simplement affirmer que mon maître usa quatre boucliers, deux dont le châssis de chêne avait été fracassé par des coups répétés, un dont le revêtement de bronze avait été enfoncé et un quatrième dont la brassière et la poignée avaient été arrachées. Il n’était pas difficile de trouver des armes de rechange. Il n’y avait qu’à se pencher pour en ramasser auprès de leurs propriétaires, morts ou mourants.
    Parmi

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