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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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conduisait du cloître à l’escalier de la crypte par
l’ancien transept sud.
    Tom
regarda autour de lui. D’une cinquantaine de pieds carrés et donc bien assez
grande pour les besoins du prieuré, la crypte était une pièce assez sombre,
avec de gros piliers et un plafond voûté et bas, mais de construction robuste,
ce qui expliquait qu’elle eût survécu à l’incendie. On avait installé un
tréteau en guise d’autel et les bancs du réfectoire serviraient de stalles pour
les moines. Dès que le sacristain aurait apporté les vêtements sacerdotaux
brodés et les chandeliers ciselés, ce serait parfait.
    Avec la
reprise des offices, les effectifs mis à la disposition de Tom allaient
diminuer. La plupart des moines allaient retourner à leur vie de culte et à
leurs tâches agricoles ou administratives. Tom disposerait encore de la moitié
des serviteurs du prieuré envers qui le prieur Philip avait adopté une attitude
sévère. Il les estimait trop nombreux et avait décidé de congédier ceux qui
refuseraient de travailler sur le chantier. La plupart étaient restés.
    Le prieuré
devait déjà à Tom trois semaines de salaire. Au tarif d’un maître bâtisseur à
quatre pence la journée, on arrivait au total de soixante-douze pence. Avec
chaque jour qui passait, la dette grossissait et il deviendrait de plus en plus
difficile pour le prieur de s’en acquitter. D’ici six mois, Tom demanderait au
prieur de commencer à lui payer les deux livres et demie d’argent dont il lui
serait alors redevable. Et Philip ne pourrait congédier Tom avant d’avoir réuni
cette somme. Cet état de choses donnait à Tom un sentiment de sécurité.
    Il y avait
même une chance – il osait à peine y penser – que ce travail lui dure jusqu’à
la fin de ses jours. Il s’agissait après tout d’une cathédrale ; si les
autorités décidaient de commander un nouveau bâtiment prestigieux, et si elles
arrivaient à trouver l’argent pour le payer, on verrait là le plus grand
chantier de construction du royaume, employant des douzaines de maçons pour
plusieurs décennies.
    Mais
c’était vraiment trop espérer. Car, d’après ce que racontaient les moines et
les villageois à Tom, Kings-bridge n’avait jamais été une cathédrale importante.
Perdue dans un calme village du Wiltshire, administrée par une succession
d’évêques sans ambition, pourvue d’un prieuré sans gloire ni ressources, elle
était manifestement sur son déclin. Certains monastères attiraient l’attention
des rois et des archevêques par leur somptueuse hospitalité, leurs excellentes
écoles, leur grande bibliothèque, les recherches de leurs moines philosophes ou
l’érudition de leurs prieurs et de leurs abbés ; mais Kings-bridge
n’offrait rien de la sorte. Selon toute probabilité, le prieur Philip ferait
bâtir une petite église, simple d’architecture et modeste de décoration, dont
la construction ne prendrait guère plus de dix ans. Ce qui d’ailleurs convenait
parfaitement à Tom.
    Les ruines
noircies n’étaient pas encore froides qu’il avait compris qu’il tenait là sa
chance de bâtir sa propre cathédrale. Le prieur Philip voyait déjà la main de
Dieu dans la venue de Tom à Kings-bridge. Tom savait qu’il s’était acquis la
confiance de Philip par l’efficacité avec laquelle il avait effectué le
déblaiement et la remise en marche du prieuré. Le moment venu, il
s’entretiendrait avec lui des plans du nouveau sanctuaire. S’il s’y prenait
bien, il y avait tout à parier que le prieur lui demanderait de dessiner
lui-même les plans. Le fait que la nouvelle église serait sans doute assez
modeste rendait plus que probable qu’on en confiât le projet à Tom plutôt qu’à
un maître bâtisseur plus expérimenté en matière de cathédrales. Tom avait de
grands espoirs.
    La cloche
sonna le chapitre. C’était aussi le signal pour les travailleurs laïques
d’aller déjeuner. Tom quitta la crypte et se dirigea vers le réfectoire. En
chemin, il rencontra Ellen.
    Elle se
planta devant lui d’un air agressif, comme pour lui barrer la route, avec dans
les yeux un regard étrange. Martha et Jack l’accompagnaient. Jack avait une
mine épouvantable : un œil fermé, le côté gauche du visage meurtri et
enflé, il s’appuyait sur sa jambe droite comme si la gauche ne pouvait
supporter aucun poids. Tom se sentit plein de compassion. « Que t’est-il
arrivé ?

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