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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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n’évoquait encore qu’avec peine. Pensant ne
jamais la revoir, à sa grande horreur il avait dû non seulement la recevoir à
son retour, mais encore – Tom l’avait tellement supplié – lui pardonner. Le
maçon avait habilement démontré que, si Dieu pouvait pardonner le péché
d’Ellen, Philip n’avait pas le droit de refuser. Le prieur, pourtant,
soupçonnait la femme de ne pas éprouver un grand repentir. Mais Tom avait
présenté sa requête le jour même où les volontaires étaient venus sauver la
cathédrale et le moine s’était vu contraint d’accéder au vœu de Tom. Le couple
avait été marié dans l’église paroissiale, un petit bâtiment de bois au
village, qui existait depuis plus longtemps que le prieuré. Depuis lors, Ellen
avait eu une conduite irréprochable et n’avait donné à Philip aucune raison de
regretter sa décision. Néanmoins, elle continuait de le mettre mal à l’aise.
    Tom posa
la question : « Combien y a-t-il d’hommes qui t’aiment ? »
    Elle prit
ostensiblement une minuscule bouchée de pain, ce qui provoqua de nouveaux
rires. Les questions avaient toujours tendance à glisser vers les plaisanteries
douteuses. Philip savait qu’en son absence elles tourneraient carrément à la
grivoiserie.
    Ellen
compta trois grains. Tom feignit d’être scandalisé. « Je vais vous dire
qui sont mes trois amoureux », dit Ellen. Philip pria intérieurement pour
qu’elle garde un minimum de discrétion. « Le premier est Tom. Le second
est Jack. Et le troisième, Alfred. » On applaudit à sa repartie et le pain
continua de circuler. Ce fut le tour de Martha, la fille de Tom, une enfant
timide, d’une douzaine d’années. Le pain lui annonça trois maris, ce qui
semblait bien peu probable.
    Martha
passa le pain à Jack et, dans le mouvement, Philip surprit la lueur qui
brillait dans ses yeux. Son demi-frère était pour elle un héros.
    Ce Jack
intriguait Philip. Après avoir été un enfant plutôt laid, avec des cheveux
roux, une peau pâle et des yeux verts un peu exorbités, ses traits s’étaient
ordonnés et avaient pris un tour tellement séduisant qu’on se retournait
parfois pour le dévisager. Mais, de caractère, il se montrait aussi difficile que
sa mère. Manœuvre d’un tailleur de pierre, il avait lamentablement échoué. Au
lieu de fournir régulièrement le mortier et les pierres, il se dépêchait de
préparer de quoi tenir la journée et filait à ses occupations. On ne le
revoyait plus. Un jour, considérant qu’aucune des pierres du chantier ne
convenait à la sculpture qu’il avait à faire, il était allé sans rien dire à
personne jusqu’à la carrière pour choisir lui-même celle qui lui plaisait. Il
l’avait rapportée, sur un poney emprunté, deux jours plus tard. Mais on lui
pardonnait volontiers ses excentricités, d’abord pour ses qualités de
sculpteur, ensuite pour sa sympathie, un trait, selon Philip, qu’il n’avait
certainement pas hérité de sa mère. Le prieur avait réfléchi à l’avenir du
garçon. S’il entrait dans l’Église, il pourrait fort bien finir évêque.
     
    Martha
posa la question à Jack : « Combien d’années avant que tu te
maries ? »
    Jack
rompit un tout petit morceau de pain : il avait hâte, apparemment, de
trouver l’âme sœur. Avait-il quelqu’un en vue ? se demanda Philip qui
l’avait vu faire. Dépité, Jack se retrouva la bouche pleine de grains et, à
mesure que l’assemblée les comptait, le rouge lui montait au visage. Le total
se chiffrait à trente et un. « Ah non ! J’aurai quarante-huit
ans ! » protesta-t-il. Tout le monde rit et applaudit à la rapidité
de ce calcul mental. Même Milius l’économe n’aurait pas fait mieux.
    Jack était
assis auprès d’Aliena, Philip se rendit compte qu’il les avait vus ensemble
plusieurs fois cet été. C’était sans doute leur intelligence exceptionnelle qui
les réunissait. A Kingsbridge, rares étaient ceux qui pouvaient se mettre au
niveau d’Aliena. Et Jack, malgré toute son indiscipline, était plus mûr que les
autres apprentis. Philip restait néanmoins intrigué par leur amitié car, à leur
âge, cinq ans constituaient une grande différence.
    A son tour
Jack passa le pain à Aliena et lui renvoya la question : « Dans
combien d’années vous marierez-vous ? »
    Il y eut
des grognements déçus. On attendait une question différente, car le jeu était
un exercice d’esprit et de raillerie.

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