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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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trouverait jolie n’importe comment.
    — Peut-être... Oh ! mon rendez-vous chez le docteur, vite, je suis en
     retard !

    — La photographie que tu parles, avec ta robe rouge, c’est celle que tu as
     envoyée chez nous ? Maman est si fière de toi. Elle l’a fait encadrer. Tu as été
     chanceuse de trouver ce travail de chanteuse.
    Yvette tendit la tasse de café à sa sœur. Comment lui avouer la vérité ? Sa vie
     n’était plus qu’un ramassis de mensonges, se dit Yvette. Elle jeta un œil de
     regret sur le verre d’alcool qui lui aurait donné le courage qui lui
     manquait.
    — Regarde autour de toi, Laura. Est-ce que maman serait fièrede moi, tu crois ? J’arrive juste à payer le loyer et la nourriture. Tu crois
     que si j’étais vraiment une chanteuse, Jean mangerait des croissants matin, midi
     et soir ?
    — Que c’est tu veux dire ? Le Sanglier chantant , le contrat de chant ?
     C’est pas vrai ?
    — Il y a eu un contrat, mais...
    Il était temps de se rallumer une cigarette. Avec sa sœur, elle venait d’avoir
     une vraie conversation, plus profonde que jamais Yvette ne l’aurait cru
     possible. Mais de là à avouer que garder son travail chez monsieur Guillemet
     aurait rimé avec perdre sa dignité… Le soir de la première, elle s’était
     présentée à son bureau, habillée, coiffée, maquillée et très nerveuse. Il
     l’avait complimentée.
    — Parfait, magnificat  !
    Il avait fermé la porte et était allé prendre place dans son fauteuil. Il
     s’était allumé un cigare tout en la détaillant, soupesant ses charmes. Il avait
     exhalé une longue bouffée et avait déposé le cigare sur le bord du cendrier à
     côté d’une plume et d’un encrier. Devant lui, il avait pris le contrat
     d’Yvette.
    — Tu n’as pas encore signé ton contrat.
    Elle n’avait pas osé parler de cet oubli à son patron. Soulagée, elle tendit la
     main pour prendre la plume. Il tint le contrat hors de sa portée.
    — Une dernière petite formalité, dit-il.
    — Quoi ?
    — On n’a pas parlé de ton pourcentage.
    — Mais oui, et mon cachet est parfait.
    — Non, c’est une petite clause que je viens d’ajouter. Avant de signer ton
     contrat, je dois savoir si tu l’acceptes.
    — Une clause, quelle clause ?
    Il se cala dans son fauteuil, tenant toujours à la main le contrat.
    — Tu dois remercier papa Guillemet.
    Il s’était levé, le visage fiévreux.
    — Tu es si belle, Yvette.
    — Non, monsieur Guillemet...
    — Viens, viens embrasser papa Guillemet.
    Il la coinça contre le mur.
    — Non, lâchez-moi ! avait-elle crié en le repoussant de toutes ses
     forces.
    Le directeur s’était reculé, surpris par tant de véhémence. Il était retourné à
     son fauteuil. Il avait rectifié sa mèche de cheveux qui lui retombait toujours
     sur le front quand il s’énervait. Il était presque chauve et cette mèche était
     ce à quoi il tenait le plus. Reprenant contenance, il avait allumé un cigare.
     Gardant le briquet ouvert, il avait dangereusement approché les feuilles du
     contrat de la flamme. D’un ton cinglant, il lui avait dit :
    — Ton numéro commence dans quinze minutes. Pas de contrat, pas de numéro. Pas
     de numéro, pas d’argent… C’est ma condition si tu veux rester au Sanglier
     chantant.
    Tremblante, elle s’était avancée vers le bureau et avait pris le briquet des
     mains de monsieur Guillemet. Content d’avoir gagné, le gérant la prit sur ses
     genoux et plongea le nez dans le décolleté de la robe rouge, respirant
     bruyamment. Sans que le gérant ne s’en rende compte, Yvette avait approché le
     briquet du crâne du petit homme chauve. Avec un grand cri de douleur, il s’était
     dressé debout, se tapotant la tête.
    — Es-tu folle ? lui avait-il crié.
    Yvette, qui s’était rapidement éloignée en direction de la porte, se
     retourna.
    — Quand j’étais petite, papa Guillemet, et que c’était jour de boucherie sur la
     ferme, il n’y avait rien qui puait plus que la peau du cochon qu’on venait
     d’ébouillanter. J’aurais dû savoir qu’un sanglier, c’est de la même famille
     qu’un porc. En tout cas, vous sentez exactement pareil. Ça pue beaucoup trop
     pour que je remette jamais les pieds ici.

    — Le contrat n’a jamais été signé.
    — Pourquoi ?
    — Monsieur Guillemet et moi, on ne s’était pas entendus sur certaines
     conditions.
    — Comment fais-tu pour

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