Les refuges de pierre
rejoindre Marthona, Folara et Loup, elle vit Lanidar lui
adresser par-dessus son épaule un sourire débordant de reconnaissance.
— Voilà ton oiseau, cria Folara en lui montrant le lagopède
transpercé quand elle s’approcha. Que comptes-tu en faire ?
— Eh bien, comme je viens de lancer des invitations pour le
repas de demain matin, je pense que je vais le cuire.
— Qui as-tu invité ?
— La femme à qui je parlais.
— Mardena ? s’étonna la jeune fille.
— Ainsi que sa mère et son fils.
— Personne ne les invite jamais, sauf pour les festins
communautaires.
— Pourquoi ?
— Maintenant que j’y pense, je ne sais pas trop. Mardena
vit un peu à l’écart. Elle se croit responsable de l’infirmité de son garçon ou
du moins elle croit que les gens le pensent.
— Certains le pensent, dit Marthona, et Lanidar aura
peut-être du mal à trouver une compagne. Il y aura des mères pour craindre qu’il
n’apporte des Esprits infirmes à une union.
— En plus, Mardena le traîne avec elle partout où elle va,
reprit Folara. Elle a peur que les autres garçons se moquent de lui si elle le
laisse aller seul quelque part. Ils le feraient sûrement. Je ne crois pas qu’il
ait des amis. Elle ne lui offre aucune possibilité.
— Je me posais justement la question, dit Ayla. Elle a
envers lui une attitude protectrice. Trop protectrice, je pense. Elle est
persuadée que son bras infirme limite ses capacités, mais sa plus grande
limite, à mon avis, ce n’est pas son bras, c’est sa mère. Elle a peur de le
laisser essayer. Il faut pourtant qu’il grandisse.
— Pourquoi l’as-tu choisi pour lancer une sagaie ?
demanda Marthona. J’ai eu l’impression que tu le connaissais.
— Quelqu’un lui avait dit qu’il y avait des chevaux là où
nous avons notre camp – le Pré d’En-Haut, comme il l’appelle –, il
est venu les voir et je me trouvais là. Je pense qu’il cherchait à échapper à
la foule, ou à sa mère, mais celui qui lui avait parlé des chevaux avait omis
de lui dire que nous campons là-bas. Jondalar et Joharran ont demandé que tous
les participants à la Réunion évitent de s’approcher des chevaux. Le « quelqu’un »
qui a parlé des chevaux à Lanidar pensait peut-être qu’il aurait des ennuis s’il
venait les voir. En fait, cela ne me dérange pas qu’on vienne les voir, je veux
juste que personne n’ait l’idée de les chasser. Ils sont trop habitués à l’homme,
ils ne s’enfuiraient pas.
— Et, bien sûr, tu as laissé Lanidar les toucher et il
était ravi, comme tout le monde, dit Folara en souriant. Ayla lui rendit son
sourire.
— Peut-être pas tout le monde, mais je pense que, si les
gens ont l’occasion de les connaître, ils ne seront pas tentés de les chasser.
— Tu as sans doute raison, approuva Marthona.
— Les chevaux l’aiment bien, semble-t-il, et il a su tout
de suite siffler comme moi pour les appeler. Alors je lui ai demandé de s’occuper
d’eux en mon absence. Je ne pensais pas que sa mère y verrait une objection.
— Rares sont les mères qui s’opposeraient à ce que leur
fils de douze ans en sache davantage sur les chevaux ou sur n’importe quel
autre animal, observa Marthona.
— Douze ans ? Je pensais qu’il en avait neuf ou dix.
Il disait qu’il ne voulait pas aller à la démonstration de Jondalar parce qu’il
ne sait pas lancer une sagaie. Il semblait croire qu’il n’y arriverait jamais,
mais son bras gauche est normal, et, comme j’avais mon lance-sagaie avec moi,
je lui ai montré comment s’en servir. A son âge, il devrait faire mieux que de
cueillir des framboises avec sa mère. Ayla s’interrompit, regarda les deux
femmes.
— Comment se fait-il que vous connaissiez Lanidar et
Mardena ? Ce fut Marthona qui répondit :
— Chaque fois que naît un bébé infirme comme lui, toutes
les Cavernes en entendent parler, et tout le monde en parle. Pas nécessairement
en mal. Les gens se demandent pourquoi et veulent éviter qu’une telle chose
arrive à leurs enfants. Quand le compagnon de Mardena est parti, la plupart des
Zelandonii ont pensé que c’était parce qu’il avait du mal à reconnaître Lanidar
comme le fils de son foyer, mais je pense que Mardena est à moitié responsable.
Elle ne voulait montrer le bébé à personne, pas même à son compagnon. Elle le
cachait, elle dissimulait son bras. Elle est devenue très protectrice.
— Le problème
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