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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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pourquoi elle le
repoussait de cette manière.
    — Que célèbre-t-on ? redemanda-t-il à l’uléma,
cette fois avec un filet de voix.
    — Aujourd’hui, nous avons racheté de l’esclavage notre
premier frère de foi, répondit Hamid avec solennité. Lui, ajouta-t-il en montrant
un homme qui arborait sur la joue une lettre marquée au fer rouge.
    Hernando dirigea son attention vers le Maure qui, au côté
d’une femme, recevait les félicitations des personnes présentes. Quelle
importance pouvait avoir le rachat d’un esclave pour que Fatima… ? Que lui
arrivait-il ?
    — La femme à ses côtés est son épouse, poursuivit
Hamid. Elle a appris qu’il vivait comme esclave dans la maison d’un marchand de
Cordoue et…
    Hamid arrêta son explication.
    — Et ? questionna Hernando sans l’écouter vraiment.
    Qu’arrivait-il à Fatima ? Il essaya de capter à nouveau
son attention, mais il était manifeste qu’elle le fuyait.
    — Elle est venue voir la communauté.
    — Bien.
    — Ses frères.
    — Oui, murmura Hernando.
    — Nous nous sommes tous cotisés pour réunir la somme du
rachat. Tous les Maures de Cordoue ! Même moi, j’ai donné le peu d’argent
que j’ai pu obtenir…
    Hernando se tourna vers Hamid avec surprise, le regard
interrogateur.
    — Fatima, confessa alors l’uléma, a été l’une des plus
généreuses.
    Hernando secoua la tête comme s’il voulait repousser les
paroles qu’il venait d’entendre. La pièce de quatre réaux de l’hidalgo, qu’il
serrait toujours dans son poing, faillit lui glisser entre les doigts tant il
se sentit d’un coup affaibli. Fatima ! Une de celles qui avaient le plus
contribué !
    — Cet argent…, balbutia-t-il, devait acheter sa propre
liberté et…
    — La tienne ? ajouta Hamid.
    — Oui, répondit-il fermement, recouvrant ses esprits.
La mienne. La nôtre !
    Il chercha encore Fatima et la trouva cette fois debout de
l’autre côté du patio. À présent elle soutenait son regard, certaine qu’Hamid
lui avait raconté ce qu’elle avait fait de son argent. Fatima avait expliqué à
l’uléma pour quelle raison ils amassaient cette somme, et elle lui avait avoué
qu’elle se sentait incapable de dire à Hernando qu’elle l’avait donnée.
Hernando la contempla avec une sensation étrange : elle semblait fière et
satisfaite, l’éclat de ses yeux rivalisait avec la splendeur scintillante que
les lumières arrachaient au bijou en or de son cou.
    — Pourquoi ? lui demanda de loin Hernando.
    Hamid lui répondit :
    — Parce que tu t’es éloigné de ton peuple, Ibn Hamid,
le réprimanda-t-il dans son dos.
    Hernando ne se retourna pas.
    — Pendant que nous nous réorganisons, que nous essayons
de prier en secret et de maintenir nos croyances, que nous venons en aide à
ceux des nôtres qui en ont besoin, tu passes ton temps à courir dans tout
Cordoue comme un ruffian.
    Hamid attendit quelques instants. Hernando demeura immobile,
envoûté par ces yeux noirs fendus.
    — Je souffre de voir mon fils au dernier rang de ceux
qui régissent et gouvernent notre monde : les vagabonds.
    Hamid perçut un léger tremblement dans les épaules
d’Hernando.
    — Tu m’as toi-même appris, répliqua le jeune homme
toujours de dos, qu’il y en avait un autre au-dessous : le dernier, le
douzième rang, celui des femmes. Est-ce pour y rester que Fatima a dû renoncer
à sa liberté ?
    — Elle a confiance en la miséricorde divine. Tu devrais
l’imiter. Reviens avec nous, avec ton peuple. Votre condition d’esclave, à toi
et à Fatima, ne dépend pas des hommes, qu’on peut acheter. Elle dépend de nos
lois, de nos croyances, et seul Dieu est appelé à nous en libérer. Quand Fatima
m’a remis l’argent en m’expliquant dans quel but elle le gardait, pourquoi tu
te battais pour l’obtenir, je lui ai dit de faire confiance à Dieu, de ne pas
perdre l’espérance. Alors elle m’a assuré qu’avec une seule phrase tu
comprendrais…
    Hernando tourna enfin la tête vers celui qui lui avait tout
appris. Il le savait. Il savait quelle était cette phrase, mais ce fut
seulement en l’entendant encore qu’il capta toute sa signification : dans
l’histoire qu’elle recélait, dans les souffrances et les joies partagées avec
Fatima.
    Hamid ferma à demi les yeux avant de la murmurer :
    — La mort est une longue espérance.

 
29.
    — Répudie-moi ! Ou bien tue-moi ! Viole-moi
si c’est ce que tu

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