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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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mains.
Prie ! insista-t-il auprès du maréchal-ferrant.
    — Il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu et Mahomet est
l’envoyé de Dieu, entonna Yusuf.
    — Continue.
    — C’est la profession de foi. C’est suffisant, s’excusa
lemaréchal-ferrant.
    — Non. Ça ne l’est pas. Dans Al-Andalus, non. Récite la
prière de tes ancêtres, ceux que tu prétends venger.
    Yusuf soutint le regard de l’uléma pendant quelques
secondes, puis il baissa les yeux, de même que la plupart des hommes présents.
    — Dis la prière que tu aurais dû enseigner à tes
enfants, mais que tu as déjà oubliée, lui reprocha Hamid. L’un d’entre vous ici
peut-il réciter les attributs de la divinité comme il est coutume de le faire
sur notre terre ?
    L’uléma balaya du regard le groupe de Maures. Personne ne
répondit.
    — Fais-le, toi, Hernando, l’invita-t-il alors.
    Dégagé des mains menaçantes du maréchal-ferrant, le garçon
saisit l’une des chasubles brodées d’or entassées devant l’autel ; il
hésita quelques instants, puis il s’orienta vers la qibla et s’agenouilla sur
la soie.
    — Non ! cria Andrés.
    Mais cette fois, les Maures ne lui permirent pas de
continuer et le frappèrent. Le sacristain porta les mains à son visage et sanglota
devant la trahison de son élève, au moment où Hernando commençait la
prière :
    — Il n’y a pas d’autre Dieu que Dieu et Mahomet est
l’envoyé de Dieu. Il n’ignore pas que toute personne est obligée de savoir que
Dieu est unique dans son royaume. Il a créé toutes les choses qui existent dans
le monde, le haut et le bas, le trône et l’escabeau, le ciel et la terre, ce
qu’il y a en eux et ce qui existe entre eux.
    Hernando avait débuté la prière d’une voix tremblante, mais
à mesure que surgissaient les paroles, son ton se fit plus assuré.
    — Toutes les créatures ont été formées par Sa
puissance ; rien ne bouge sans Sa permission…
    Même le cheval aubère se tint tranquille pendant la prière.
Hamid écoutait, satisfait, les yeux entrouverts ; soucieuse, Aisha serrait
les mains, comme si elle avait voulu pousser les mots qui sortaient de la
bouche de son fils.
    — Il est le premier et le dernier, celui qui se
manifeste et celui qui se dissimule. Il connaît tout ce qui existe, termina le
garçon.
    Personne ne prononça un mot jusqu’au moment où Hamid reprit
la parole :
    — Qui ose à présent soutenir que ce garçon est
chrétien ?

 
5.
    Tous les chrétiens de Juviles furent confinés dans l’église
sous la tutelle d’Hamid, qui devait essayer de leur faire renier leur religion
et de les convertir à l’islam.
    Brahim prit la route du Nord, vers la montagne, où El Partal
avait dit qu’il se rendrait afin de poursuivre le soulèvement. Sous ses ordres
partit un groupe bariolé constitué d’une demi-douzaine d’hommes, certains
pourvus d’armes prises à la compagnie d’arquebusiers de Cádiar, d’autres munis
de simples bâtons ou de frondes en sparte. À la fin du cortège se trouvait
Hernando, qui veillait sur le troupeau de mules, augmenté de six bons
exemplaires choisis par Brahim parmi ceux ramenés de Cádiar.
    Hernando avait dû courir derrière l’aubère de son beau-père.
Lorsque, dans l’église, personne n’avait osé contester les paroles de l’uléma,
Brahim avait éperonné son cheval, fait demi-tour et ordonné au garçon de le
suivre. Hernando n’avait même pas pu dire au revoir à Hamid ou à sa mère ;
malgré cela, quand il était passé près d’eux, il leur avait souri. Sur la place
de l’église hommes et mules l’attendaient.
    — Si tu perds un animal ou un chargement, je t’arrache
les yeux.
    Telles furent les seules paroles que lui adressa son
beau-père avant qu’ils se mettent en route.
    À partir de ce moment-là, l’unique préoccupation du garçon
consista à stimuler les bêtes derrière la monture de son beau-père et les
hommes qui le suivaient à pied. Les mules de Juviles obéissaient aux
ordres ; les bêtes réquisitionnées étaient moins dociles, plus aléatoires.
L’une d’elles, la plus grande, le menaça d’un coup de dents lorsqu’il la
fouetta pour qu’elle revienne dans le rang. Hernando bondit avec agilité et
évita la morsure, mais lorsqu’il voulut punir l’animal, il se retrouva les
mains vides.
    « Je t’aurai », maugréa-t-il entre ses dents. La
mule continua à en faire à sa guise, tandis qu’Hernando cherchait autour

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