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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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suivant les indications de Brahim, il eut
conduit son troupeau auprès du garçon.
    — Je m’appelle Hernando, répondit ce dernier.
    Ubaid attendit quelques instants.
    — Hernando ? se contenta-t-il de répéter en voyant
que le garçon n’ajoutait rien de plus.
    — Oui. Hernando tout court, dit-il avec fermeté,
défiant Ubaid, de plusieurs années son aîné et muletier de profession.
    Ubaid éclata d’un rire sarcastique et lui tourna
immédiatement le dos pour s’occuper de ses bêtes.
    « S’il apprenait mon nom de famille…, songea Hernando,
l’estomac noué. Je devrais peut-être prendre un nom musulman. »
    Cette nuit-là, les céréales et les aliments pillés dans les
maisons des chrétiens furent dilapidés pour célébrer le soulèvement des
Alpujarras. Toutes les taas, tous les lieux maures rejoignaient la rébellion,
affirmait El Partal avec enthousiasme. Il ne manquait que Grenade !
    Alors que les responsables du village s’occupaient des
monfíes, et que les chrétiens étaient enfermés dans l’église sous la
surveillance de l’uléma du coin qui, à l’instar d’Hamid à Juviles, devait
essayer de leur faire renier leur religion, Hernando et Ubaid restèrent à
l’abri d’un arbre, près des mules et du butin. Cependant, ils ne furent pas
oubliés par les femmes d’Alcútar, qui les servirent en abondance. Hernando
mangea alors à sa faim ; Ubaid aussi, mais une fois son estomac repu, il
tenta également de satisfaire d’autres désirs, et Hernando le vit courtiser
toutes les femmes qui s’avancèrent vers eux. L’une d’elles s’approcha et
s’assit à leurs côtés, cajoleuse, recherchant le contact. Hernando se faisait
tout petit, détournait le regard et s’écartait, jusqu’au moment où les femmes
cessèrent leur manège.
    — Qu’est-ce qui t’arrive, petit ? Elles te font
peur ? demanda son compagnon, que la nourriture et la compagnie féminine
paraissaient avoir mis de meilleure humeur. Il n’y a rien à craindre, pas
vrai ? dit-il en s’adressant à l’une d’elles.
    La femme éclata de rire, tandis qu’Hernando rougissait. Le
muletier de Narila le regardait avec une expression malicieuse.
    — Ou alors tu redoutes ce que peut dire ton
beau-père ? insista-t-il. Vous n’avez pas l’air de bien vous entendre…
    Hernando ne répondit pas.
    — Après tout, ce n’est pas très étonnant…, poursuivit
Ubaid.
    Ses lèvres esquissèrent un sourire de complicité, qui ne
réussit en rien à embellir son visage sale et vulgaire.
    — Ne t’inquiète pas, pour l’heure il est occupé à faire
l’important… Mais toi et moi, on est tout près de ce qui est vraiment
important, tu ne crois pas ?
    À cet instant, la femme qui avait jeté son dévolu sur Ubaid
réclama ses attentions et celui-ci, après avoir lancé en direction d’Hernando
un regard que le garçon ne parvint pas à comprendre, enfouit la tête entre ses
seins.
    La nuit était bien avancée lorsque Ubaid disparut avec une
femme. En les regardant partir, Hernando se souvint des commentaires du
sacristain de Juviles :
    — Les nouvelles-chrétiennes, les Mauresques, lui
avait-il expliqué lors d’une des nombreuses leçons d’endoctrinement dans la sacristie
de l’église, s’adonnent aux pratiques amoureuses, se soulageant sans mesure
avec leurs maris… Ou avec d’autres qui ne le sont pas ! Bien sûr le
mariage maure n’est rien de plus qu’un contrat aussi futile que l’achat d’une
vache ou le bail d’un champ…
    Le sacristain traitait le garçon comme s’il avait été un
vieux-chrétien, descendant d’une lignée sans tache, et non le fils d’une
Mauresque.
    — Les hommes comme les femmes se livrent au vice de la
chair, que répugne le Christ Notre-Seigneur : c’est pourquoi tu verras
qu’elles sont toutes grosses et brunes, car tout ce qu’elles veulent c’est
procurer du plaisir à leurs hommes, coucher avec eux comme des chiennes en
chaleur et, en leur absence, se jeter dans l’adultère, pécher par gourmandise
ou par paresse, cancaner toute la journée sans autre but que de se divertir
avant que ce soit de nouveau l’heure d’accueillir les hommes à bras ouverts.
    « Il y a aussi de grosses chrétiennes, avait failli
répliquer Hernando cette fois-là, et certaines sont bien plus brunes que les
Maures », mais il s’était tu, comme il le faisait toujours avec le
sacristain.
     
    Le jour de Noël se leva, froid et ensoleillé, sur la

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