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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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la musique, les fêtes et
tous types de bruits et d’imprévus. Que serait-il advenu de ces chevaux et
surtout de leurs dresseurs si le roi ou tout autre de ses proches, parent ou
bénéficiaire, était tombé par terre parce que sa monture aurait eu peur du
vacarme des fifres et des timbales d’une parade militaire ou des cris des
sujets devant leur roi ?
    Comme les nouveaux poulains n’étaient pas encore revenus des
pâturages, Hernando se contentait d’aider dans les box, sans fonction concrète.
Et c’est ainsi que Rodrigo, monté sur le poulain pie et Hernando à pied, un
long bâton flexible à la main, sortirent des écuries un matin afin de sillonner
la ville et de soumettre le fougueux animal à toutes sortes de nouvelles
expériences.
    — Je t’ai vu travailler dans les box et j’aime ta façon
de faire, lui dit le cavalier avant de mettre pied à l’étrier. Mais pour le
moment, tu ne te distingues pas des autres. Je voudrais vérifier si tu possèdes
vraiment ce don spécial que don Diego a cru percevoir en toi. On va se promener
dans la ville et la présenter à ce poulain. Il aura peur. Quand ce sera le cas,
si tu considères que je ne peux rien faire d’autre que le châtier avec les éperons,
ou que le bâton serait contreproductif, tu devras intervenir en l’excitant, à
la juste mesure. Compris ?
    Hernando hocha la tête. Le cavalier passa sa jambe droite
par-dessus la croupe du poulain. Comment connaîtrait-il la juste mesure ?
    — Si le poulain parvient à me faire tomber, reprit
Rodrigo en prenant position sur sa monture, ce qui est assez courant lors des
premières sorties en ville, ton objectif, c’est lui. Quoi qu’il se passe, que
je me fracasse la tête contre un mur, que le cheval donne un coup de patte à
une vieille dame ou détruise une boutique, tu dois t’emparer de lui afin de
l’empêcher de s’enfuir à travers la ville et d’être blessé. N’oublie pas
ceci : par privilège royal, personne, je répète, personne, ni le
corregidor, ni les alguazils, ni les magistrats ni aucun des vingt-quatre
membres du conseil municipal de Cordoue n’a d’autorité ou de juridiction sur
les chevaux et le personnel des écuries royales. Ta mission est de protéger cet
animal et, s’il m’arrive quelque chose, de le ramener aux écuries sain et sauf,
quoi qu’il se passe, quoi qu’on te dise.
    Hernando suivit le cavalier à l’extérieur des écuries,
s’interrogeant encore sur ce que Rodrigo attendait exactement de lui mais, à
l’instar du poulain, il n’eut bientôt plus le temps d’y penser : dès que
l’animal mit une patte en dehors de l’enceinte et dressa les oreilles, surpris
par la foule qui déambulait sur le Campo Real et par tous ces bâtiments qui lui
étaient inconnus, Rodrigo l’éperonna avec force pour l’empêcher de réfléchir. Le
poulain bondit alors dans la rue et, pour ne pas le perdre, Hernando lui
emboîta le pas de la même manière. À partir de ce moment-là, la matinée fut
frénétique. Le cavalier obligea l’animal à galoper dans d’étroites
ruelles ; il passa entre des gens et chercha les endroits et les
situations qui pouvaient le surprendre le plus, Hernando toujours derrière lui.
Ils se rendirent calle de los Carboneros, dans le quartier de la cathédrale, où
ils firent entendre au poulain les coups du marteau sur le cuivre. Puis ils se
plantèrent devant la tannerie au va-et-vient constant, s’arrêtèrent devant les
ateliers de cardeurs et de teinturiers, devant ceux des bijoutiers et des
fabricants d’aiguilles, parcoururent plusieurs fois la Corredera et les marchés
jusqu’aux abattoirs, ainsi que le coin des poteries. L’expérience et le courage
de Rodrigo rendirent pratiquement inutile le concours de son assistant.
    À une exception près : à un moment donné, Rodrigo
approcha le poulain d’un des innombrables cochons laissés en liberté dans les
rues. Le gros animal s’en prit au cheval, grognant et montrant les dents.
Terrorisé, le cheval tourna sur lui-même et se cabra, déséquilibrant son
cavalier. Mais avant qu’il ne puisse s’enfuir, Hernando lui barra le passage et
le châtia d’un coup de bâton sur la croupe, le forçant à faire face au cochon
jusqu’à ce que Rodrigo reprenne le contrôle de la situation. Pour le reste, il
se borna à présenter le bâton au cheval, faisant claquer sa langue toutes les
fois où, malgré les éperons ou les caresses du cavalier selon les cas,

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