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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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les chrétiens cherchaient à se rapprocher de Dieu par leurs
constructions, les élevant le plus haut possible, aussi haut que le
permettaient leurs moyens techniques ; des bases solides et des sommets
élancés. Cependant, la mezquita de Cordoue apparaissait comme un prodige de
l’architecture musulmane, le résultat d’un audacieux exercice de construction
où le pouvoir de Dieu venait descendre sur ses fidèles. La section des arcs
supérieurs des doubles arcades, qui reposaient sur les colonnes de la mezquita,
était deux fois plus large que la section des arcs qui les supportaient. À
l’inverse des édifices chrétiens, dans la mezquita, la base solide, le poids,
se trouvait au-dessus des colonnes élancées, en un défi manifeste et public aux
lois de la gravité. Le pouvoir de Dieu se situait dans les hauteurs, la
fragilité des croyants qui priaient dans la mosquée, à la base.
    Pourquoi les chrétiens n’avaient-ils pas démoli tout vestige
de cette religion qu’ils détestaient tant, comme ils l’avaient fait avec les
autres mosquées de la ville ? s’interrogea Hernando, le regard toujours
rivé aux doubles arcs au-dessus des colonnes. Le conseil de la cathédrale de
Cordoue était l’un des plus riches d’Espagne, ses nobles aussi, et la dévotion
n’aurait pas manqué pour assumer un projet comme celui-là. Ils auraient pu
envisager la construction d’une cathédrale géante, comme celles de Grenade ou
Séville. Pourtant ils avaient laissé survivre la mémoire musulmane dans ces
colonnes, ces plafonds bas, la disposition des nefs… dans l’esprit de la
mezquita ! « Indépendamment des gens, l’union qui se respire à
l’intérieur de cet édifice est magique », soupira-t-il.
    Aucun d’eux ne réussit à voir l’autodafé qui fut célébré sur
un plancher près de l’ancien sanctuaire ; seuls les rangs les plus proches
du cordon de sécurité établi par les magistrats et les alguazils autour des
dignitaires purent contempler la cérémonie. En revanche, ils entendirent la
lecture publique des accusations et les sentences, sans preuves, brèves, où
seules étaient mentionnées les fautes et les peines imposées à l’encontre de
quarante-trois prisonniers du royaume de Cordoue, dont vingt-neuf Maures, sur
lequel le tribunal exerçait sa juridiction, lectures que les chrétiens écoutèrent
en silence avant d’acclamer ou de conspuer les châtiments qui concluaient
chaque exposé.
    Deux cents coups de fouet à un chrétien, qui vivait à Santa
Cruz de Mudela, pour avoir soutenu que l’affirmation du Credo que Dieu
viendrait juger les vivants et les morts était fausse. « Il est déjà venu
une fois ! insistait le détenu. Pourquoi reviendrait-il ? »
Plusieurs coups de fouet également à d’autres chrétiens pour avoir déclaré en
public que les relations charnelles ou le fait de vivre en concubinage sans
être mariés n’étaient pas un péché ; deux cents coups de fouet et trois
ans de galères à un habitant d’Andújar accusé de bigamie ; une amende à un
tuilier d’Aguilar de la Frontera pour avoir déclaré que l’enfer n’existait pas,
sauf pour les Maures et les désespérés : « Pourquoi les chrétiens
iraient-ils en enfer puisqu’il existe des Maures ? » ; une
amende et le déshonneur public par la corde et le bâillon à un autre homme pour
avoir certifié que payer pour coucher avec une femme n’était pas un
péché ; de plus faibles amendes et des san-benito à plusieurs hommes et
femmes accusés d’avoir blasphémé, d’avoir douté de l’efficacité de
l’excommunication, ou encore d’avoir proféré des paroles grossières,
scandaleuses ou hérétiques. Confiscation de biens, coups de fouet et galères à
vie pour deux Français appartenant à la secte de Luther et condamnation au
bûcher par effigie à l’encontre de trois habitants d’Alcalá la Real pour avoir
renié la religion catholique à Alger, après avoir été faits prisonniers par les
corsaires.
    — Elvira Bolat, continua l’huissier, nouvelle
chrétienne de Terque…
    — Elvira ! laissa échapper Fatima.
    Un homme et une femme, devant eux, se retournèrent
surpris : d’abord vers la jeune fille, ensuite vers Hernando à qui elle
essayait de donner une explication :
    — C’était mon amie avant que…
    Abbas se signa ostensiblement.
    — Femme, la coupa brutalement Hernando, qui se signa de
la même façon que le maréchal-ferrant, tu dois

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