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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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taire.
    L’intervention fut foudroyante : les corsaires
attaquèrent les environs de Cullera. Ils tombèrent par surprise sur des paysans
venus travailler leurs terres et firent dix-neuf prisonniers mais, au lieu de
poursuivre les autres qui fuyaient, épouvantés, ils partirent à toute vitesse
vers le point de rencontre dont ils étaient convenus avec les galiotes, cette
fois près de Cullera. Ni les forces à l’intérieur de la ville, ni celles des
localités voisines, n’eurent le temps de réagir à l’offensive et, avant
qu’elles ne réalisent ce qui s’était passé, corsaires, captifs et Maures
fugitifs se trouvaient déjà à bord des galiotes, cap sur la pleine mer.
    Néanmoins, une fois hors de portée d’un tir de bombarde, les
trois galiotes virèrent vers la côte et hissèrent le pavillon blanc ; les
bateaux étaient déjà bien chargés du butin d’autres incursions et la saison de
la navigation allait bientôt s’achever. Les Valenciens savaient ce que
signifiait ce drapeau : les capitaines corsaires étaient disposés à
négocier, sur-le-champ, le rachat des prisonniers. Ils acceptèrent le marché
et, de chaloupe à chaloupe, les tractations commencèrent. Cette matinée-là,
quinze hommes furent rachetés. Les quatre autres continuèrent le voyage
jusqu’aux marchés aux esclaves d’Alger.
    Au cours des deux jours paisibles que dura la traversée de
retour, pendant lesquels les galiotes peinèrent à avancer sur une mer si calme,
Brahim constata que l’équipage corsaire – entièrement composé de Turcs et
de renégats chrétiens – témoignait envers sa communauté d’un mépris égal à
celui dont ils avaient souffert lors du soulèvement des Alpujarras. Personne ne
voulait avoir affaire à eux. On leur donna à manger comme à des chiens et on ne
leur demanda même pas de ramer. Pourquoi alors les pirates acceptaient-ils de
les emmener ? s’interrogeait Brahim. La joie des Maures valenciens à la
vue des corsaires lui revint en mémoire ; le mal qu’ils infligeaient aux
chrétiens constituait pour eux une satisfaction suffisante et maximale quand,
par ailleurs, ils gardaient l’espoir d’une aide future de la part de la Sublime
Porte. Il observa les galériens qui ramaient avec difficulté ; les bateaux
lourds, aux ordres du garde-chiourme. On avait divisé les Maures fugitifs afin
de pouvoir les installer sur la petite surface latérale qui restait entre les
rameurs et les plateformes menant sur le pont. Il tourna la tête vers le
capitaine de son bateau, debout à la proue, doucement bercé par le rythme des
rameurs, avec ses longs cheveux blonds, propres aux chrétiens renégats de
l’Adriatique, qui lui tombaient sur les épaules. Brahim cracha dans la mer.
L’aide qu’ils leur apportaient pour fuir avait en réalité un intérêt
commercial : les corsaires acceptaient de transporter cette méprisable
charge humaine dans le seul but d’obtenir les faveurs des villageois.
    Pour cette raison, dès que la flottille des galiotes entra
dans le port d’Alger et qu’il aperçut ses grands remparts imposants, tandis
qu’ulémas, religieux et toutes sortes de gens accouraient pour les accueillir
au son des timbales, Brahim décida qu’il ne resterait pas longtemps dans une
ville aussi hostile aux Maures d’Al-Andalus que pouvait l’être ce nid de
corsaires. Il erra pourtant dans ses rues pendant deux jours, loin des Maures
qui venaient se vendre comme main-d’œuvre, aussi bon marché qu’en Espagne, aux
propriétaires des nombreux vergers ou champs d’arbres fruitiers qui entouraient
la ville, voire aux immenses exploitations de blé de la plaine de Yiyelli.
Finalement, dans le souk, il rencontra une caravane qui partait vers Fez, qu’il
tenta de rallier, promettant de travailler dur pour obtenir des restes de
nourriture. Il avait faim ! Il avait dû se battre avec des hommes plus
forts que lui, et pourvus de leurs deux mains, pour les détritus des Algérois.
    — Je suis muletier, informa-t-il l’Arabe qui devait
être le chef de la caravane, un homme du désert vêtu comme un Bédouin, qui
baissa le regard vers son moignon en hochant la tête.
    Alors Brahim voulut démontrer sa compétence auprès des
animaux, même avec une seule main. Il hésita un peu au souvenir des problèmes
qu’avait rencontrés Ubaid pour conduire ses mules dans les Alpujarras, mais
finalement il se dirigea vers un groupe important de chameaux qui se
reposaient, fléchis

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