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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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celui qui
acquerrait Hamid, même boiteux, vieux et fatigué, ne le ferait certainement pas
pour le maintenir inactif ; il l’obligerait à travailler afin de
rentabiliser son investissement… et peut-être dans un lieu éloigné de Cordoue.
Il avait beau dire, l’uléma ne méritait pas un tel sort à la fin de ses jours.
Et lui non plus ne le méritait pas, reconnut-il en son for intérieur, tandis
qu’il montait à l’étage pour rentrer chez lui. Il avait besoin d’Hamid !
Il avait besoin de le voir et de discuter avec lui, même si c’était seulement
de temps en temps. Il avait besoin de ses conseils et, surtout, de savoir qu’il
était là, toujours, pour les lui dispenser. Il avait besoin de trouver en Hamid
le père qu’il n’avait pas eu pendant son enfance.
    Il en parla avec Fatima, qui l’écouta attentivement.
Ensuite, elle lui sourit et caressa sa joue.
    — Libère-le, murmura-t-elle. Quel que soit le prix. Tu
gagnes bien ta vie maintenant. On s’en sortira.
    Ainsi en serait-il, se dit Hernando alors qu’il traversait
le pont romain en direction de la tour de la Calahorra. Ces pensées en tête,
indifférent, il montra sa cédule spéciale aux alguazils qui contrôlaient le
trafic sur le pont. Sa paie avait été augmentée jusqu’à trois ducats mensuels,
plus dix fanègues de bon blé par an ; c’était moins que ce que touchaient
les dresseurs plus anciens, et même Abbas comme maréchal-ferrant, mais pour eux
cela représentait un salaire plus que généreux. Fatima épargnait pièce après
pièce, comme si cette période faste pouvait s’arrêter à tout moment.
     
    Les jours de fête, le campo de la Verdad était envahi par les
Cordouans qui se promenaient sur les rives du fleuve pour contempler les trois
moulins situés sur les berges du Guadalquivir, un peu plus bas que le pont
romain, ou pour rechercher le calme des champs qui s’étendaient au-delà du
quartier extramuros. À cause de cette affluence, que ce fût ou non dimanche,
les maquignons venaient montrer leurs bêtes à vendre, au cas où un citoyen
aurait eu l’intention d’en acheter une.
    Juan, le muletier, était courbé, ce qui le faisait paraître
plus petit qu’il ne l’était. Il sourit à Hernando, lui montrant des gencives
décharnées. Il n’avait plus toutes ces dents noires comme à l’époque où le
jeune homme l’avait connu.
    — Le grand cavalier maure ! s’exclama-t-il en
guise de salut.
    Hernando parut surpris.
    — Ça t’étonne ? ajouta Juan en lui frappant
affectueusement dans le dos. Je sais plein de trucs sur toi. D’ailleurs, je ne
suis pas le seul.
    Hernando n’avait jamais pensé à cette éventualité. Que
pouvaient bien savoir les gens sur lui ?
    — Ce n’est pas habituel qu’un Maure finisse par monter
les chevaux du roi… et travaille à la cathédrale. Certains marchands avec qui
tu as été en affaires, expliqua Juan en lui faisant un clin d’œil, utilisent
ton nom pour attirer les acheteurs. Ce cheval a été dressé par Hernando, le
cavalier maure des écuries royales ! prétendent-ils quand ils voient les
gens intéressés. J’avais pensé dire que tu avais aussi monté mes mules, mais je
ne sais pas si ça aurait marché.
    Tous deux se mirent à rire.
    — Comment ça va pour toi, Juan ?
    —  La Vierge Fatiguée a fini par mourir, lui
dit-il à l’oreille, prenant son bras avec familiarité. Elle a coulé, lentement
et solennellement, comme il se doit pour une dame, mais par chance près de la
rive, et on a pu récupérer les barils.
    — Tu as continué ce trafic après que… ?
    — Regarde-moi cette mule ! s’écria Juan sans tenir
compte de la question.
    Hernando examina l’individu qu’il lui montrait. En apparence
il s’agissait d’un bon animal, les pattes impeccables, fort, avec de bons os.
Quel défaut pouvait-il cacher ?
    — L’écuyer royal voudrait peut-être acheter une bonne
mule ? plaisanta le marchand.
    — Tu voudrais gagner deux mailles ? lui lança
alors Hernando, se rappelant la proposition, identique, que lui avait faite un
jour le muletier.
    Juan porta une main à son menton, méfiant, et exhiba une
nouvelle fois ses gencives décharnées.
    — Je commence à me faire vieux, s’excusa-t-il. Je ne
peux plus courir…
    — Et les femmes, tu ne peux plus… non plus ? Et ce
bordel aux Barbaresques ?
    — Ah mon garçon, tu m’offenses ! Tout bon Espagnol
qui se respecte paierait pour finir ses jours

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