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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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vanité.
    — Cabriole ! plaisanta ce dernier en bondissant
légèrement.
    — L’art de la danse…, commença à répliquer le noble.
    Des applaudissements forcés interrompirent ses paroles.
    — Tu sais aussi danser ? demanda une voix de
femme.
    Hernando se retourna. Isabel, droite et fière, cessa
d’applaudir et se dirigea vers eux. Elle marchait à petits pas en raison de ses
chaussures à la semelle de liège ornée d’incrustations en argent, haute de
quatre pouces, qu’on apercevait sous son jupon. Elle avait échangé son
habituelle robe noire pour une tenue en satin vert sombre à deux pièces, dont
les manches à crevés étaient piquées de tissus de différents tons de la même
couleur. La pièce supérieure, débutant par une collerette qui lui cachait le
cou jusqu’aux oreilles, avait la forme d’un cône inversé, dont la pointe
descendait sur la jupe bouffante s’ouvrant en cloche depuis la taille. Le cône
cachait un corset qui lui enserrait les seins, peut-être plus que de coutume,
occultant la volupté naturelle qu’on devinait les autres jours. Ses pommettes
ressortaient, colorées avec du papier teint en rouge, et ses yeux apparaissaient
brillants, soulignés par un mélange d’antimoine dilué dans de l’alcool. Un
magnifique collier de perles rehaussait l’ensemble. Don Sancho détourna le
regard d’Isabel, blâmant imperceptiblement sa propre attitude lorsqu’il
s’aperçut que son attention dépassait les limites de la courtoisie. Il tenta en
vain de prévenir Hernando en posant sa main sur son bras : le Maure,
bouche bée, contemplait, captivé, la jeune femme qui marchait vers eux.
    — Tu sais danser ? répéta Isabel une fois à ses
côtés.
    — Non…, bredouilla-t-il, enveloppé du parfum qui
accompagnait cette silhouette magique.
    — Il n’a pas voulu apprendre, intervint l’hidalgo,
réussissant à rompre l’enchantement, conscient des regards que leur jetaient à
la dérobée certains domestiques en livrée colorée, qui attendaient les invités.
    Isabel répondit à don Sancho par une légère inclinaison de
tête et un bref sourire. Un pas seulement séparait son visage de celui
d’Hernando.
    — C’est dommage, murmura la jeune femme. Je suis sûre
que de nombreuses dames auraient voulu ce soir que tu les invites à danser.
    Il y eut un silence épais, presque palpable, que don Sancho
brisa soudain.
    — Don Ponce ! s’exclama l’hidalgo.
    Isabel se retourna, effrayée.
    — J’avais cru le voir, s’excusa don Sancho devant
l’expression de son hôtesse quand elle s’aperçut que son mari n’était pas là.
    — Pardonnez-moi, dit Isabel, cachant son trouble
derrière une certaine brusquerie. J’ai encore à faire avant l’arrivée des
invités.
    — Que cherches-tu à regarder ainsi une dame ?
reprocha ensuite don Sancho à Hernando dès qu’Isabel se fut éloignée. C’est
l’épouse du juge !
    Hernando haussa les épaules. Que cherchait-il ? se
demanda-t-il à son tour. Il l’ignorait. Il savait juste que, pour la première
fois depuis plusieurs années, il se sentait envoûté.
     
    Hernando et don Sancho, au côté du juge et d’Isabel,
surmontèrent l’épreuve du baisemain et des présentations auprès d’une centaine
de personnes qui avaient accepté, enchantées, l’invitation du riche et
important juge grenadin : collègues de don Ponce, chanoines de la
cathédrale, inquisiteurs, prêtres et moines, le corregidor de Grenade et
plusieurs membres du conseil municipal, chevaliers de différents ordres,
nobles, hidalgos et scribes. Hernando reçut les félicitations et les
remerciements de chacun des convives qui passèrent devant lui. Don Sancho
demeurait près de lui, essayant en vain d’intervenir dans les conversations,
jusqu’au moment où le Maure, conscient du désespoir de l’hidalgo, lui tendit la
perche :
    — Voici don Sancho de Córdoba, cousin du duc de
Monterreal, annonça-t-il à l’homme qu’on lui avait présenté, curé de l’église
de San José.
    Le prêtre salua l’hidalgo d’un hochement de tête et se
désintéressa aussitôt de lui.
    — Je suis heureux, affirma-t-il en s’adressant à
Hernando, de rencontrer celui qui a sauvé doña Isabel du martyre aux mains des
hérétiques. Je n’ignore pas non plus ce que vous avez fait pour don Alfonso de
Córdoba et tant d’autres chrétiens.
    Hernando tenta de cacher sa surprise. Depuis son arrivée à
Grenade, les rumeurs qu’il

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