Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
Vom Netzwerk:
l’écoutait derrière la porte, que c’est la Angustias
et des amies à elle qui m’envoient. Tu as compris ? La Angustias !
répéta-t-il haut et fort. Et dis-lui aussi que je l’attendrai demain chez moi
pour négocier en son intérêt. Je ne lui accorderai aucune autre opportunité.
Sinon, j’irai chez le corregidor ou l’évêque. Je vis dans la maison d’à côté,
au cas où il l’ignorerait, ironisa-t-il.
     
    Seul dans sa bibliothèque, Hernando n’avait cessé d’y
penser : voulait-il vraiment se marier avec Rafaela ?
    — Vous êtes seul ! Vous avez besoin d’une femme à
vos côtés, qui veille sur vous, qui vous aime et vous donne la chaleur d’une
famille, lui avait crié Miguel au lendemain de la rencontre dans les écuries,
quand Hernando lui avait déclaré qu’il était désolé mais qu’il fallait trouver
une autre solution.
    Il n’était pas prêt à se marier. Par contre, il avait
l’intention de dénoncer à la justice l’affaire des enfants trouvés.
    — Vous ne vous rendez pas compte ? avait continué
l’infirme. Il y a des années que vous vivez reclus parmi vos livres et vos
écrits. Vous n’aimeriez pas avoir des enfants qui héritent de vos biens ?
Fonder une nouvelle famille ? Quel âge avez-vous ? Quarante ?
Quarante et un ? Vous vieillissez. Vous voulez vieillir seul ?
    — Tu es là, toi.
    — Non.
    Il y avait eu entre eux un silence embarrassant.
    — J’y ai beaucoup réfléchi. Si vous ne vous mariez pas
avec Rafaela, si vous ne la délivrez pas du couvent, je retournerai dans la
rue.
    — C’est du chantage, avait répliqué Hernando en
adoptant une attitude extrêmement sérieuse.
    — Non, avait insisté Miguel, tandis qu’il secouait la
tête en pinçant les lèvres, conscient de l’audace de ses paroles. Je vous ai
dit que mon seul objectif était de sauver cette jeune fille. Dieu sait que si
je pouvais le faire, si j’avais la moindre petite chance, je ne ferais pas
appel à vous. Vous avez le droit de refuser de l’épouser, je le respecte. Mais
je ne pourrai pas continuer à vivre ici si vous ne m’accordez pas l’aide que je
vous ai demandée.
    — Mais tu me demandes de me marier !
    — Et alors ? Ceux que vous appelez vos frères de
foi ne veulent plus entendre parler de vous. Avez-vous l’intention de chercher
une autre chrétienne à épouser ? Quel est le problème avec Rafaela ?
Vous aurez une bonne épouse qui vous servira, veillera sur vous et vous donnera
des enfants. Vous êtes riche. Vous possédez une maison, des rentes, des terres
et des chevaux. Pourquoi ne pas vous marier ?
    — Je suis musulman, Miguel, avait protesté Hernando.
    — Il y a beaucoup de mariages entre Maures et
chrétiennes à Cordoue ! Éduquez vos enfants dans les deux religions que
vous prétendez réunir. Sinon, à quoi bon tout votre travail ? Au profit de
ceux qui vous rejettent et vous insultent ? Où allez-vous ? Quel est
votre avenir ? Épousez Rafaela et soyez heureux !
    « Soyez heureux ! » Ces deux mots simples le
poursuivirent toute la journée avant qu’il se décide à frapper à la porte du
magistrat. Avait-il un jour cherché le bonheur ? Fatima et les enfants le
lui avaient donné.
    Comme cette époque était lointaine ! Voilà quatorze ans
qu’ils avaient tous été sauvagement assassinés. Et depuis ? Il était seul.
La tristesse qui l’avait assailli au cours de son dernier voyage à Grenade,
alors qu’Estudiante broutait l’herbe de la rive du Darro et qu’il contemplait
la colline où était située la villa d’Isabel, lui revint en mémoire. Miguel
avait raison. Pour qui accomplissait-il tout ce travail, tous ces
efforts ? « Soyez heureux ! » Pourquoi pas ? Rafaela
paraissait être une bonne personne. Miguel l’adorait. Et s’il partait ? Si
son seul ami l’abandonnait lui aussi…
    Qu’avait-il à perdre en se mariant ? Il imagina la
maison avec des enfants courant partout, des cris et des rires égayant le
travail quotidien dans la bibliothèque. Il se vit observant leurs jeux dans le
patio, s’appuyant sur la balustrade de la galerie, comme il l’avait fait avec
Francesco et Inés. Quatorze ans ! Il se surprit à ne pas se sentir
coupable d’envisager cette possibilité. Rafaela était si différente de Fatima…
Il n’était pas question d’amour ; peu de mariages se faisaient par amour.
Ni de passion. Il s’agissait seulement de la possibilité d’échapper à

Weitere Kostenlose Bücher