Les révoltés de Cordoue
chevaux
du roi.
Il dégaina son épée et la pointa en direction du ventre de
Salah, qui recula d’un pas vers le mur. Hernando serra fortement la
poignée ; tous les muscles de son bras étaient tendus : cette fois,
il ne se laisserait pas désarmer.
— Que crois-tu ? balbutia Salah, comprenant le
piège que lui tendait le jeune garçon. Ce sera… ta parole contre la mienne et
tu ne pourras jamais prouver que tu me l’as remise.
— Ta parole ?
Hernando plissa les yeux.
— Personne ne pourra entendre ta parole !
Quand il fit mine d’enfoncer son épée, Salah tomba à genoux.
La lame courut jusqu’à sa gorge, déchirant ses habits.
— Non ! supplia Salah.
Hernando appuya la pointe de l’épée contre sa pomme d’Adam.
— Je ferai ce que tu veux, mais ne me tue pas. Je te
paierai ! Je paierai tout ce que tu veux !
Il se mit à pleurer.
— Trois cents ducats, dit Hernando.
— Oui, oui. D’accord. Trois cents ducats. Tout ce que
tu veux. Oui.
Il s’arrêta aussitôt de pleurer. Hernando exerça de nouveau
une légère pression sur la gorge du marchand.
— Si tu me trompes, tu vas souffrir. Foi d’Ibn Hamid.
Salah secoua négativement la tête à plusieurs reprises.
— Lève-toi et ouvre ta réserve. Allons chercher
l’argent.
Ils descendirent les marches, l’épée d’Hernando sur la nuque
du commerçant. Salah mit du temps à ouvrir les deux serrures qui protégeaient
l’accès à la réserve. Son vaste dos empêchait que la lanterne du garçon
l’éclairé assez.
— À genoux ! exigea le jeune homme lorsque la
porte s’entrouvrit et que Salah s’avança pour entrer. Marche comme un chien.
Le marchand obéit et pénétra dans la réserve à quatre
pattes. Hernando referma la porte d’un coup de pied. Puis il essaya d’examiner
l’intérieur sans cesser de menacer Salah, qui respirait bruyamment.
— Maintenant allonge-toi par terre, bras et jambes en
croix ! Si tu fais le moindre mouvement, je te tue. Où y a-t-il une autre
lampe ?
— Devant toi, sur un coffre.
Salah se mit à tousser à cause de la poussière que ses
paroles avaient soulevée du sol. Hernando trouva la lampe, alluma la mèche et
la cave s’éclaira.
— Hérétique ! s’écria Hernando dès que ses yeux se
furent habitués à la lumière. Qui aurait pu croire en ta parole ?
Vierges et crucifix, un calice, capes et chasubles, et même
un petit retable s’entassaient près de vieux tonneaux de vivres, vêtements et
marchandises de tout type.
— Ils valent beaucoup d’argent, se défendit le
commerçant.
Hernando garda le silence pendant quelques instants, puis
effleura des doigts la figure d’une Vierge à l’Enfant qui se trouvait près de
lui. « Cette fois tu m’as sauvé », fut-il tenté de lui dire. Sans toutes
ces images… l’un d’eux serait mort.
— Où sont les ducats ? demanda-t-il.
— Dans un petit coffre, juste à côté de la lampe.
— Assieds-toi, lui ordonna-t-il après avoir pris la
lampe. Doucement, les jambes écartées, ajouta-t-il alors que le marchand commençait
à se redresser lourdement. Compte trois cents ducats et mets-les dans un sac.
Salah s’exécuta. Hernando referma le coffre et posa le sac
sur un autre coffre.
— Tu vas les laisser là ? questionna Salah,
étonné.
— Oui. Je pense qu’il n’existe pas de meilleur endroit
pour l’argent du roi.
Ils refermèrent la porte comme ils l’avaient ouverte.
Hernando menaçait toujours le commerçant.
— Donne-moi une de tes clés. Celle-là, la plus grande,
exigea-t-il une fois que Salah eut terminé d’actionner les serrures. Bien,
reprit-il, la clé à la main, maintenant voici la dernière partie du plan :
tu vas m’accompagner voir le chef de la garde des arquebusiers. Si tu parles,
je nierai tout. Ils me croiront ou pas, mais toi, j’en suis sûr, tu ne le
sauras jamais car avec tout ce que tu caches là-dedans, tu seras exécuté sans
autre forme de procès. Compris ?
Le marchand garda le silence dans le patio, écoutant
Hernando parler au chef des arquebusiers et lui ordonner de poster un de ses
hommes en permanence devant la porte d’accès à la cave.
— À l’intérieur il y a l’argent du roi, expliqua-t-il.
Nous pourrons seulement entrer tous les deux en même temps, Salah et moi. S’il
m’arrive un jour quelque chose, vous devrez forcer la porte et récupérer ce qui
appartient au roi. Prie le Miséricordieux, dit-il ensuite à
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