Les Thermopyles - La Plus Celebre Bataille De L'Antiquite
bouclier, le fer, la cuirasse, corps à corps, œil contre œil, cimier contre cimier. »
Tyrtée II. 29-34
Sans nourrir de réelles volontés expansionnistes, Sparte entend avant tout impressionner ses adversaires. Loin de chercher à s’étendre, la grande cité du Péloponnèse a comme seule ambition de dissuader tout adversaire d’envahir son territoire. Toute expédition hors du Péloponnèse lui semble superflue, voire dangereuse. Cité autarcique par excellence, ses citoyens-soldats font preuve d’une mentalité insulaire. Au v e siècle avant notre ère, la réputation de Sparte repose sur la seule vaillance de ses phalanges. Si sa flotte de guerre est embryonnaire et ses colonies quasi inexistantes, elle abrite en effet les meilleurs hoplites de la Grèce antique. À la différence de Thèbes, de Corinthe ou encore d’Athènes, les fantassins de Lacédémone ne sont pas des potiers, des paysans ou des vignerons travestis en soldats du dimanche le temps d’une campagne militaire mais de véritables combattants professionnels, nourris de culture guerrière depuis leur prime enfance. Nés pour combattre, ils n’envisagent pas d’autre mort que celle de périr sur le champ de bataille. « Il est beau de mourir au premier rang, en brave qui combat pour la patrie » clame le poète Tyrtée.
Ne jamais perdre son bouclier !
Les hoplites spartiates ne sont pas pour autant des surhommes. Individuellement, les combattants de la puissante cité du Péloponnèse ne sont pas plus performants que leurs homologues argiens ou corinthiens. En revanche, placés au sein de leurs phalanges, les hoplites spartiates constituent une force sans égale dans tout le monde grec. Pendant toute leur adolescence, on leur a inculqué l’esprit de groupe et le respect du commandement. À la veille de l’affrontement au sommet contre les troupes de l’Empire perse, les Lacédémoniens se sont taillé une réputation d’invincibilité. Celle-ci repose en partie sur une discipline inflexible et sur un sens exacerbé de l’honneur. À l’image des futures légions romaines, la phalange spartiate exprime la solidarité, l’idéal égalitaire et l’esprit civique. Cette camaraderie de fer et de sang privilégie la cohésion et la dynamique du groupe aux dépens de la seule bravoure individuelle. Pendant les batailles, l’exploit consiste plus à rester dans le rang qu’à se distinguer par une quelconque prouesse.
Tous solidaires et non solitaires, les soldats spartiates incarnent la morale de leur cité. Recrutés entre l’âge de trente ans et de cinquante-cinq ans, les vaillants combattants de Sparte sont répartis en cinq régiments (lochoi) forts de cinq cent douze hommes par unité, lesquels sont eux-mêmes subdivisés en pelotons (énomoties) , comprenant chacun trente-deux hommes. Reconnaissables à leur longue chevelure et surtout à leur éclatante tunique rouge, « pour que le sang n’y parût point » (Hérodote), les guerriers spartiates sont par ailleurs tous équipés de cuirasses en cuir renforcées de plaques de métal, d’un casque à cimier et à protection nasale, de jambières en bronze, d’une épée courte à double tranchant et d’une longue lance de plus de deux mètres. Mais surtout, cette panoplie serait incomplète si l’on passait sous silence les hoplons , ces boucliers ronds et incurvés, faits en bois et cerclés de bronze. Les fantassins lourds de la Grèce classique leur doivent même leurs noms : les hoplites. Large de quatre-vingt-dix centimètres et pesant plus de huit kilos, ce bouclier est l’arme par excellence des combattants et le seul moyen d’identification des soldats d’une cité. Chaque état dispose ainsi d’un emblème peint sur la face externe du bouclier, à la fois pour se faire reconnaître et pour conjurer le mauvais sort. À Sparte, tous les boucliers sont frappés de la lettre lambda. À n’en pas douter, ces armes à la fois offensives et défensives symbolisent à elles seules l’homogénéité de leur formation militaire. « Tiens ton rang, ne cède pas d’un pouce ! » répètent inlassablement les officiers spartiates. Placés les uns à côté des autres, chaque bouclier protège simultanément son possesseur et l’homme situé sur sa gauche. Pour les soutenir, tous les hoplites disposent d’une double poignée appelée l’ antilabé . Que l’un d’entre eux vienne à le lâcher et c’est la
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