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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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C’est ainsi que procède la nature pour guérir. Le djinn de
ce mal n’ira jamais tourmenter un homme qui a perdu connaissance. Vous avez
remarqué ? Dès que votre oncle perd connaissance, il ne tousse plus.
    — Effectivement, il n’a plus qu’à mourir, dans ce
cas, fis-je remarquer d’un ton effrontément critique. Ainsi, il ne toussera
plus du tout !
    Le hakim rit sans paraître se formaliser de mon
attitude et répliqua :
    — Ne soyez pas aussi dubitatif, allons. Le hasht
nafri ne peut se guérir que quand la nature l’aura décidé, et je ne puis,
moi, qu’implorer son concours. Regardez : voilà qu’il se réveille, à
présent, et l’accès de toux a disparu.
    — Gèsu..., murmura faiblement oncle Matteo.
    — Maintenant, intima le hakim, il lui faut
du repos et de la transpiration. Il devra garder le lit, excepté s’il doit se
rendre au mustarah, ce qu’il aura souvent envie de faire étant donné le
purgatif carabiné que je vais lui prescrire. Le djinn se cache encore
dans ses boyaux, et cela ne fait pas souffrir lorsqu’on s’en débarrasse. Aussi,
dès que le patient reviendra de ses selles, l’un de vous (car je ne serai pas
toujours là) devra l’oindre à nouveau de farine d’orge et l’envelopper de
toutes ces peaux de chèvre. Je veillerai à passer de temps à autre afin de
renouveler les versets qui figurent sur les papiers.
    Nous organisâmes donc, mon père, Narine et moi, un
tour de garde au chevet d’oncle Matteo. Ce n’était pas une tâche
particulièrement pénible (sauf qu’il fallait supporter les récriminations
incessantes qu’il marmonnait pour pester contre sa prostration forcée) et, au
bout d’un certain temps, mon père décida qu’il avait peut-être mieux à faire de
notre séjour à Balkh. Il laisserait Matteo sous ma garde, Narine et lui
partiraient vers la principale ville de la région pour présenter nos respects
au gouverneur local, qui portait le titre de sultan, et nous faire connaître
comme émissaires du khakhan Kubilaï. Bien sûr, la cité n’était que nominalement
une capitale, et son souverain le sultan n’était, comme le shah Zaman de Perse,
qu’un dirigeant symbolique subordonné au pouvoir du khan mongol. Mais cette
équipée devait aussi permettre à mon père d’améliorer nos cartes et de les
enrichir de nouvelles indications. Par exemple, notre Kitab désignait
cette cité sous le nom de Kophes, alors que, du temps d’Alexandre, elle se
nommait Nikaia et que, ici et maintenant, on ne l’appelait plus que Kaboul. Mon
père et Narine sellèrent deux chevaux et se préparèrent à prendre la route.
    La soirée précédant leur départ, Narine se glissa
discrètement auprès de moi. Il semblait avoir compris le désespoir de ma
situation personnelle, et peut-être espérait-il pouvoir me tirer d’affaire le
temps que je resterais seul à Balkh. Il m’expliqua donc :
    — Maître Marco, il y a un certain établissement,
ici, à Balkh... C’est la maison d’un gebr, j’aimerais que vous alliez y
jeter un coup d’œil.
    — Un gebr ? Est-ce une sorte d’animal
fabuleux ?
    — Fabuleux, je ne pense pas, non. Mais bestial,
ça... c’est possible ! Un gebr est l’un de ces Persans dégénérés
qui n’ont jamais bénéficié de l’illumination du Prophète – la bénédiction et la
paix soient sur lui. Ces gens-là vouent toujours un culte à Ormuzd, dieu du feu
de jadis, auquel personne ne croit plus aujourd’hui... Et ils ont recours à des
pratiques... disons, passablement condamnables.
    — Je vois, lâchai-je, complètement refroidi. Et
qu’irais-je faire dans la maison de ces païens illégitimes ?
    — Ce gebr, qui s’est affranchi de toute
observance des règles musulmanes, ne respecte, comme on pouvait s’y attendre,
aucune règle de décence. Si la devanture de son établissement est celle d’un
banal commerce, à l’arrière se cache une maison de rendez-vous qui permet aux
amants de se rencontrer dans la plus grande clandestinité. Par ma barbe, c’est
une abomination !
    — Bon, et alors ? En quoi tout cela me
concerne-t-il ? Va donc toi-même en référer à un mufti !
    — Je devrais le faire, étant un musulman
dévoué : car le doute n’est pas permis. Mais... j’aimerais d’abord que
vous alliez vérifier par vous-même si l’abomination du gebr est bien
réelle, maître Marco.
    — Moi ? Mais que veux-tu que j’en aie à
faire ?
    — N’êtes-vous donc pas,

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