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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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nous reconnaissons tous l’étendard sous lequel vous servez.
    – Je sers sous l’étendard de Sa très-gracieuse Majesté George III, répliqua l’aumônier en essuyant la sueur froide qui lui couvrait le front ; mais réellement l’idée d’être scalpé suffit pour faire perdre courage à un novice comme moi dans le métier des armes.
    – Scalpé ! répéta Lawton un peu brusquement, et en s’arrêtant tout à coup. Mais se calmant sur-le-champ, il ajouta avec beaucoup de sang-froid :
    – Si vous parlez de l’escadron de cavalerie légère des dragons de la Virginie, commandé par Dunwoodie, il est bon de vous informer qu’ils n’enlèvent jamais une chevelure sans y joindre quelque partie du crâne.
    – Oh ! je n’ai pas la moindre crainte des personnes que vous commandez, dit le ministre d’un ton patelin ; ce sont les naturels du pays que je crains.
    – Les naturels ! j’ai l’honneur d’en être un, Monsieur, je puis vous l’assurer.
    – Entendez-moi bien, Monsieur, je vous prie. Je veux parler des Indiens, qui ne font que voler, saccager et tuer.
    – Et scalper.
    – Oui, Monsieur, et scalper, répondit l’aumônier en regardant son compagnon avec une certaine crainte ; les sauvages indiens à couleur de cuivre.
    – Et vous attendiez-vous à rencontrer de ces Messieurs sur ce qu’on appelle le Territoire Neutre ?
    – Bien certainement. On nous assure en Angleterre que tout l’intérieur de ce pays en fourmille.
    – Et appelez-vous ce canton l’intérieur de l’Amérique ? demanda Lawton en s’arrêtant de nouveau et en regardant le révérend ministre avec une surprise dont l’expression était trop naturelle pour qu’elle pût être affectée.
    – Assurément, Monsieur, je crois me trouver dans l’intérieur du pays.
    – Faites attention, dit Lawton en étendant le bras vers l’orient ; ne voyez-vous pas cette immense pièce d’eau dont l’œil ne peut atteindre les bornes ? À l’autre extrémité se trouve cette Angleterre que vous jugez digne de soumettre à ses lois la moitié du monde. Apercevez-vous la terre qui vous a donné le jour ?
    – Il est impossible de voir les objets à mille lieues de distance, répondit l’aumônier fort étonné, et commençant à douter que son compagnon fût sain d’esprit.
    – Non ! Quel dommage que les facultés de l’homme ne soient pas égales à son ambition ! Maintenant, tournez les yeux vers l’occident. Voyez-vous cette vaste étendue d’eau qui roule entre les rivages de l’Amérique et ceux de la Chine ?
    – Je ne vois que de la terre ; mes yeux ne peuvent découvrir d’eau.
    – C’est qu’il est impossible de voir les objets à mille lieues de distance, répéta Lawton fort gravement en se remettant en marche. Si ce sont les sauvages, cherchez-les dans les rangs de ceux qui servent votre prince. L’or et le rhum ont acheté leur loyauté.
    – Il est très-probable que j’ai commis une méprise, dit l’aumônier en jetant un regard furtif sur la taille colossale et les épaisses moustaches de son compagnon ; mais les bruits qui courent en Angleterre, et la crainte de rencontrer un ennemi qui ne vous ressemblât pas, m’ont déterminé à fuir en vous voyant approcher.
    – Ce n’est pas un parti très-judicieux, car Roanoke a un grand avantage sur vous du côté des jambes. D’ailleurs en cherchant à éviter Scylla vous pouviez tomber dans Charybde. Ces bois et ces rochers peuvent cacher les ennemis que vous deviez le plus craindre.
    – Les sauvages ! s’écria l’aumônier en se plaçant par instinct derrière le capitaine.
    – Pires que des sauvages, s’écria Lawton en fronçant le sourcil d’une manière qui ne calma nullement les craintes de son compagnon ; des hommes qui, sous le masque du patriotisme, répandent partout la terreur et la dévastation, qui sont dévorés d’une soif insatiable de pillage, et près desquels les Indiens, pour la férocité, ne sont que des enfants ; des monstres dont la bouche ne fait entendre que les mots de liberté et d’égalité , et dont le cœur est le séjour de tous les vices et de tous les crimes ; ces messieurs, en un mot, qu’on nomme les Skinners.
    – J’en ai entendu parler dans notre armée, mais je les croyais aborigènes.
    – En ce cas, vous faisiez injure aux sauvages, répondit Lawton avec son ton naturellement sec.
    Ils arrivèrent bientôt à l’endroit où était resté Hollister, qui vit

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