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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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pourrais-je le savoir ? répondit le père, craignant de se trouver lui-même compromis ; croyez-vous que sir Henry Clinton m’en aurait fait confidence ?
    – Et savez-vous comment il s’est procuré ce laisser-passer ? continua le même juge en lui montrant la pièce que Henry avait fait voir au major Dunwoodie et que celui-ci avait gardée.
    – Non, sur mon honneur.
    – En ferez-vous serment ?
    – J’en fais serment.
    – Avez-vous quelque autre témoin à faire entendre, capitaine Wharton ? Cette déposition ne peut vous être utile. Vous avez été arrêté dans des circonstances qui compromettent votre vie ; c’est sur vous que repose la tâche de prouver votre innocence. Prenez le temps d’y réfléchir, et ayez du sang-froid.
    Le ton calme de ce juge était si effrayant, qu’Henry sentit un frisson involontaire. L’air de compassion du président lui faisait oublier le danger qu’il courait ; mais la physionomie froide et impassible des autres juges semblait lui annoncer son destin. Il garda le silence et jeta un regard expressif sur Dunwoodie. Son ami le comprit et demanda à être entendu comme témoin. On lui fit prêter serment, et l’on entendit sa déposition ; mais elle ne changea pas l’aspect de l’affaire, car ce qu’il en savait se bornait à bien peu de chose, et était plus défavorable qu’utile à Henry. On l’écouta en silence, et un mouvement de tête presque imperceptible n’annonça que trop clairement l’effet qu’il avait produit.
    – Et vous croyez fermement que le prisonnier n’avait d’autre dessein que celui qu’il a avoué ? demanda le président au major, quand il eut cessé de parler.
    – Je le garantirais sur ma vie.
    – En prêteriez-vous serment ? lui demanda l’autre juge.
    – Comment le puis-je ? Dieu seul lit dans le fond des cœurs. Mais j’affirme sous serment que je connais le capitaine Wharton depuis son enfance, et que je l’ai toujours vu agir honorablement. Il est au-dessus d’une bassesse.
    – Vous dites qu’il s’est échappé, et qu’il a été repris les armes à la main, dit le président.
    – Il a même été blessé dans le combat. Vous voyez qu’il porte le bras en écharpe. Croyez-vous qu’il se serait montré dans les rangs au risque de retomber dans nos mains, s’il ne se fût senti fort de son innocence ?
    – Si l’on eût livré un combat près de Tarrytown, dit l’autre juge, le major André aurait-il refusé d’y porter les armes ? N’est-il pas naturel à la jeunesse de chercher la gloire ?
    – Donnez-vous le nom de gloire à une mort ignominieuse ? s’écria le major. Est-il glorieux de laisser après soi un nom flétri ?
    – Major Dunwoodie, répondit le même juge avec une gravité imperturbable, vous avez agi noblement ; votre devoir était pénible et sévère, vous l’avez fidèlement et honorablement rempli… nous devons aussi nous acquitter du nôtre.
    Pendant cet interrogatoire, le plus vif intérêt régnait dans tout l’auditoire. Avec cette sorte de raisonnement qui ne peut séparer le principe de la cause, la plupart des auditeurs pensèrent que si Dunwoodie ne pouvait réussir à émouvoir le cœur des juges de Henry, nul autre n’aurait ce pouvoir. César avançait la tête, et ses traits exprimant tout l’intérêt qu’il prenait à ce qui se passait, intérêt bien différent de la curiosité qu’on remarquait sur le visage des autres nègres, attirèrent l’attention du juge qui avait gardé le silence jusqu’alors. Il ouvrit la bouche pour la première fois.
    – Qu’on fasse avancer le nègre.
    Il était trop tard pour battre en retraite, et César se trouva placé en face des juges avant de pouvoir se rendre compte à lui même des pensées qui l’occupaient. Le soin de l’interroger fut laissé au juge qui avait donné ordre qu’on le fit venir, et il y procéda avec un grand calme ainsi qu’il suit :
    – Vous connaissez le prisonnier ?
    – Moi devoir le connaître, répondit César d’un ton aussi sentencieux que celui du juge.
    – Vous a-t-il donné la perruque lorsqu’il l’a quittée ?
    – Moi pas besoin de perruque…, pas manquer de cheveux.
    – Avez-vous été chargé de porter quelque lettre, quelque message pendant que le capitaine Wharton était chez son père ?
    – Moi toujours faire ce qui m’être ordonné.
    – Mais que vous a-t-on ordonné de faire pendant ce temps ?
    – Tantôt une chose, tantôt

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