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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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compagnon prenait considérablement l’avance sur lui, et un regard effrayé qu’il jeta en arrière lui apprit que ses ennemis approchaient aussi rapidement. Avec ce sentiment d’abandon qui rend le malheur doublement insupportable quand on n’a personne pour le partager, il cria au colporteur de ne pas l’abandonner. Harvey s’arrêta aussitôt pour l’attendre, et ralentit la course de son cheval de manière à ce que son compagnon pût le suivre. Son chapeau à cornes et sa perruque étaient tombés à l’instant où il avait pris le galop. Dépouillé de ce travestissement, il fut reconnu par les dragons, qui annoncèrent leur découverte par de grands cris qui retentirent aux oreilles des fugitifs, tant était court l’intervalle qui les en séparait.
    – Ne ferions-nous pas mieux de descendre de cheval, dit Henry, et de gagner à travers les champs les montagnes à notre gauche ? Les haies arrêteront les cavaliers.
    – Ce chemin conduit tout droit au gibet, répondit le colporteur. Ces drôles font trois pas pendant que nous en faisons deux, et ces haies ne les inquiéteraient pas plus que ces ornières ne nous gênent. Nous n’avons plus qu’un petit quart de mille à faire pour arriver au coude ; derrière le bois, la route bifurque ; les dragons pourront s’arrêter pour chercher à reconnaître lequel des deux chemins nous aurons pris, et pendant ce temps nous gagnerons un peu de terrain.
    – Mais cette misérable rosse est déjà épuisée, s’écria Henry en frappant son cheval avec le bout de sa bride, tandis qu’Harvey secondait ses efforts par des coups de houssine bien appliqués ; il est impossible qu’elle résiste encore dix minutes.
    – Il ne nous en faut que cinq, répondit le colporteur. Cinq minutes nous sauveront si vous suivez mes avis.
    Encouragé par le sang-froid et l’air de confiance de son compagnon, Henry garda le silence et continua à presser la marche de son cheval. Quelques instants les conduisirent au coude si désiré, et en tournant un petit bois taillis, les fugitifs aperçurent les dragons qui les poursuivaient, courant à toute bride sur le grand chemin. Mason et Hollister, étant mieux montés que les autres, étaient en avant, et plus près d’eux que le colporteur lui-même ne le jugeait possible.
    Au pied des montagnes, et jusqu’à une certaine distance dans la vallée sombre qui serpentait entre elles, un taillis épais était élevé en place de grands arbres qu’on avait abattus pour en faire du bois à brûler. En voyant cet abri, Henry proposa de nouveau à son compagnon de mettre pied à terre et de s’enfoncer dans les broussailles. Mais Harvey ne lui répondit que par un signe négatif. Les deux routes dont il a été parlé se rejoignaient à assez peu de distance du coude de la route, en formant un angle aigu ; mais toutes deux tournaient sans cesse, de sorte que la vue ne pouvait s’y étendre bien loin. Le colporteur prit celle qui conduisait à gauche ; mais il n’y resta qu’un instant, car trouvant un endroit où le taillis était moins épais, il y entra sur-le-champ, gagna la route sur la droite, et la quitta pareillement pour gravir une montagne qui était en face d’eux. Cette manœuvre les sauva. En arrivant à l’endroit où le chemin se divisait, les dragons suivirent les traces des pas des deux chevaux, et ils avancèrent bien au-delà de l’endroit où les fugitifs avaient quitté cette route avant de s’apercevoir qu’ils en avaient perdu la piste. Tandis que leurs montures essoufflées gravissaient péniblement la montagne, Henry et le colporteur entendirent les dragons pousser de grands cris, et se dire les uns aux autres de reprendre le chemin sur la droite. Le capitaine Wharton proposa encore de descendre de cheval et d’entrer dans le taillis.
    – Pas encore, dit Birch à voix basse, pas encore. Du haut de cette montagne, la route descend par une pente aussi rapide. Gagnons-en d’abord le sommet. Tout en parlant ainsi ils arrivèrent enfin sur la cime, et tous deux alors mirent pied à terre. Henry s’enfonça dans d’épaisses broussailles qui couvraient les flancs de la montagne jusqu’à quelque distance au-dessus d’eux. Harvey s’arrêta un instant pour donner à leurs chevaux quelques coups de houssine qui les firent descendre grand train du côté opposé à celui par lequel ils étaient arrivés, après quoi il rejoignit son compagnon.
    Le colporteur entra dans le taillis avec

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