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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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frappant la tête contre la muraille à chaque question ; qui diable es-tu ? Où est l’officier anglais ? Parle donc, mille tonnerres ! réponds-moi, misérable, ou je te fais accrocher à la potence préparée pour l’espion.
    César tint bon. Ni les menaces ni les coups ne purent lui arracher un seul mot. Mais enfin le lieutenant changea son mode d’attaque, et par une transition assez naturelle, envoya sa lourde botte dans une direction qui la mit en contact avec l’os d’une jambe de César. C’était la partie sensible du nègre, et le cœur le plus endurci n’aurait pu exiger de lui une plus longue résistance. La patience lui manqua, et il s’écria :
    – Holà ! Massa ! vous croire que moi pas sentir ?
    – De par le ciel ! s’écria Mason, c’est le vieux nègre ! Misérable ! où est ton maître ? qui est ce coquin de ministre ? Et tout en parlant ainsi, il fit un mouvement de pied, comme s’il se fût préparé à livrer un nouvel assaut. Mais César lui demanda merci à grands cris, et lui promit de lui dire tout ce qu’il savait.
    – Qui était ce ministre ? demanda Mason en levant sa jambe redoutable et en la tenant dans une attitude menaçante.
    – Harvey ! Harvey ! s’écria César en levant alternativement celle de ses jambes qu’il croyait menacée, et en exécutant ainsi une espèce de danse.
    – Harvey ! Qui ? chien de moricaud ! s’écria le lieutenant impatient et laissant enfin partir le coup dont le menaçait sa vengeance.
    – Harvey Birch ! répondit César en tombant à genoux, tandis que de grosses larmes coulaient sur son visage luisant.
    – Harvey Birch ! répéta Mason en poussant le nègre avec une violence qui le fit tomber ; et il descendit rapidement l’escalier, en criant : – Aux armes ! aux armes ! cinquante guinées pour la vie du colporteur ou de l’espion ! point de quartier pour lui ni pour l’autre ! À cheval ! aux armes ! à cheval !
    Pendant le tumulte occasionné par le rassemblement des dragons qui se précipitèrent en désordre vers leurs chevaux, César se releva et commença à se tâter pour s’assurer s’il était blessé. Heureusement pour lui il était tombé sur la tête, et sa chute ne fut suivie d’aucun accident sérieux.

CHAPITRE XXIX
    Gilpain partit au grand galop ; adieu son chapeau et sa perruque. Il ne se doutait guère en partant qu’il courrait si grand train.
    COWPER.
    La route que le colporteur et le capitaine anglais devaient nécessairement suivre pour gagner des rochers où ils seraient à l’abri de toute poursuite s’étendait pendant environ un demi-mille, en pleine vue de la porte de la ferme qui avait été si récemment la prison de Henry, sur une belle plaine jusqu’au pied d’une chaîne de montagnes presque perpendiculaires sur leur base, et tournait ensuite sur la droite, en décrivant diverses lignes courbes tracées par la main de la nature.
    Pour conserver en apparence la différence qui semblait exister entre la condition des deux cavaliers, Harvey marchait un peu en avant, de ce pas grave et mesuré qui semblait convenable à la dignité de son caractère supposé. À peu de distance sur la droite était campé le régiment d’infanterie de milice dont nous avons déjà parlé, et des sentinelles placées à l’extérieur du camp, presque au pied des montagnes, en gardaient les approches.
    Le premier mouvement de Henry en sortant de la ferme fut de presser les flancs de son cheval pour le mettre au galop, s’éloigner plus promptement de ses ennemis et mettre fin à la cruelle incertitude de sa situation. Mais Birch lui barra le chemin par une manœuvre exécutée avec autant de promptitude que d’adresse, et lui dit en même temps :
    – Avez-vous envie de nous perdre tous deux ? Restez à la place qui convient à un nègre qui accompagne son maître. N’avez-vous pas vu devant la ferme une douzaine de chevaux sellés et bridés ? Croyez-vous que ce misérable cheval de labour sur lequel vous êtes monté ne serait pas bientôt atteint par la cavalerie de Virginie ? Chaque pied de terrain que nous gagnons sans donner l’alarme ajoute une année à notre vie. Ils sont malins comme des renards et sanguinaires comme des loups. Marchez du même pas que moi, et surtout ne tournez pas la tête en arrière.
    Henry contraignit à regret son impatience, mais il suivit l’avis du prudent colporteur. Son imagination lui persuada pourtant plusieurs fois

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