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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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laquelle ses yeux étaient toujours fixés dans l’espoir de découvrir quelque lumière qui pourrait diriger ses pas.



La menace des officiers américains retentissait encore à ses oreilles, et l’excitait à se remettre en marche ; mais la solitude dans laquelle elle se trouvait… l’heure… les dangers du chemin… l’incertitude de trouver la chaumière… et, ce qui était encore plus effrayant, la possibilité d’y rencontrer des inconnus et des criminels peut-être, tous ces motifs la portaient à la retraite.
    L’obscurité croissante rendait de moment en moment les objets moins distincts, et des nuages épais se rassemblant derrière la montagne faisaient qu’on ne pouvait plus même en reconnaître la forme. L’énorme montagne semblait avoir entièrement disparu. Enfin, une clarté faible et tremblante brilla aux yeux de Frances, semblable à la lumière d’un feu, mais cette illusion s’évanouit lorsque, l’horizon vint à s’éclaircir, et l’étoile du soir se montra à travers un nuage ; Frances revit alors la montagne à la gauche de la belle planète, et tout à coup un point lumineux étincela sur les cimes de quelques chênes, s’agrandit peu à peu et répandit sur toute la montagne le réseau resplendissant des rayons de la lune. Quoiqu’il eut été physiquement impossible à notre héroïne de gravir la montagne sans le secours de cette lumière bienfaisante, elle ne se sentit pourtant pas encore assez de courage pour se remettre en route. Elle pouvait voir le but de tous ses désirs ; mais elle voyait aussi les difficultés qu’elle avait à surmonter pour y arriver.
    Tandis qu’elle hésitait ainsi, plongée dans une incertitude accablante, tantôt portée par la timidité naturelle à son sexe et à son âge à renoncer à son entreprise, tantôt formant la résolution de braver tous les périls pour secourir son frère, elle tourna les yeux vers l’orient pour regarder les nuages qui menaçaient constamment de l’envelopper de nouveau dans une obscurité profonde. La vue d’un serpent l’aurait fait tressaillir moins vivement que celle de l’objet contre lequel elle s’était appuyée, qu’elle avait pris dans les ténèbres pour un arbre, et dont elle ne reconnut la nature véritable qu’en ce moment. Deux poutres enfoncées dans la terre à quelques pieds l’une de l’autre, et dont les deux extrémités étaient réunies par une solive placée transversalement ne lui dirent que trop clairement à quel usage elles étaient destinées. Une corde était même déjà attachée à un anneau de fer, et le vent de la nuit la faisait flotter de côté et d’autre. À cette vue, Frances n’hésita plus ; elle traversa la prairie en courant ou plutôt en volant ; elle arriva bientôt au pied de la montagne où elle espérait trouver un chemin qui la conduirait vers le sommet. Elle fut obligée de s’arrêter quelques instants pour reprendre haleine, et elle employa cet intervalle à examiner le terrain. La montée était très-escarpée, mais elle trouva bientôt un sentier frayé par les bergers qui menaient paître leurs troupeaux sur cette montagne, qui, allant de biais à travers les rochers et les arbres, rendit sa marche beaucoup moins difficile qu’elle ne l’aurait été sans cela. Jetant derrière elle un regard timide, elle commença enfin à monter. Jeune, active, et animée par le généreux désir de sauver son frère, elle sortit bientôt des bois pour entrer sur un terrain découvert et plus uni qui avait évidemment été défriché pour être mis en culture, mais soit à cause de la guerre, soit à cause de la stérilité du sol, le spéculateur avait renoncé aux avantages qu’il avait obtenus sur la nature agreste, et déjà l’on voyait de nouveau pousser de toutes parts les ronces et les épines, comme si la charrue n’eût jamais tracé un sillon sur la terre qui les nourrissait.
    Frances sentit son courage se ranimer en voyant ces faibles vestiges du travail de l’homme, et elle continua à monter avec un nouvel espoir de succès. Le sentier divergeait en tant de directions, qu’elle reconnut bientôt qu’il était inutile d’en suivre tous les détours, et l’abandonnant enfin elle prit la route qui lui parut la plus courte et la plus facile pour gagner le sommet. Elle eut bientôt passé les défrichements et les bois, et les rochers dont les flancs de la montagne étaient hérissés lui opposèrent de nouveaux obstacles.

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