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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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employer avant qu’il soit longtemps.
    Quelque peu gracieux que fût cet accueil, le Skinner, si l’on pouvait juger de ses sentiments par son extérieur, en fut pourtant enchanté. Il marcha avec grand plaisir vers la ville, se trouvant si heureux d’échapper au regard brutal qui l’avait interrogé, qu’il perdait de vue toute autre considération. Mais l’individu qui remplissait dans cette troupe irrégulière les fonctions de sergent s’approcha de son commandant, et entra avec lui en conversation sérieuse, et, à ce qu’il paraissait, confidentielle. Ils parlaient à voix basse, et jetaient de temps en temps un coup d’œil expressif sur le Skinner qui commença à croire qu’il était l’objet d’une attention plus qu’ordinaire. Son mécontentement de cette distinction augmenta encore en remarquant sur la figure du capitaine un sourire qui, quoiqu’il pût passer pour une grimace, annonçait certainement beaucoup de satisfaction intérieure. Cette pantomime dura pendant tout le temps qu’ils mirent à traverser une vallée, et se termina à l’instant où ils montaient une autre colline. Là le capitaine mit pied à terre avec son sergent et fit faire halte à sa troupe. Chacun de ses soldats prit un de ses pistolets d’arçon, mouvement qui ne causa ni méfiance ni alarme parce que c’était une précaution d’usage parmi eux, et le commandant fit signe au colporteur et au Skinner de le suivre. Quelques minutes de marche les conduisirent à un endroit où la montagne formait une plate-forme dominant sur le fleuve, sur les rives duquel un des flancs du rocher descendait presque perpendiculairement. Sur le sommet de cette hauteur était un bâtiment ruiné et abandonné qui avait été autrefois une grange. La plupart des planches qui en avaient formé le toit en avaient été arrachées, et l’on voyait les deux portes battantes, l’une par terre en face du bâtiment, l’autre sur le penchant de la montagne où le vent l’avait jetée.
    En entrant dans ce lieu de désolation, l’officier Vacher tira de sa poche, avec beaucoup de sang-froid, une pipe dont le tuyau était fort court et dont la couleur pouvait avoir été blanche autrefois, mais qui avait fait tant de service, qu’elle avait acquis non seulement la teinte mais le luisant de l’ébène, une boîte à tabac et un petit rouleau de cuir qui contenait un briquet, une pierre à fusil et de l’amadou. Avec cet appareil il eut bientôt fourni à sa bouche ce qu’une longue habitude lui avait rendu nécessaire toutes les fois qu’il voulait se livrer à des réflexions extraordinaires. Dès qu’il eut exhalé dans les airs une colonne suffisante de fumée, le capitaine avança la main d’un air expressif vers le sergent. Celui-ci tira de sa poche une petite corde et la remit à son officier, qui parut alors ruminer un projet important ; car le nuage de fumée s’épaississait autour de lui de manière à lui cacher presque la tête, et il regardait de tous côtés avec l’air de chercher quelque chose qui lui manquait. Enfin il ôta sa pipe de la bouche, respira l’air pour un instant, la replaça entre ses lèvres, et se mit en besogne sur-le-champ. Une grosse poutre appuyée sur les deux murailles traversait la grange, à peu de distance de la porte du sud, et d’où l’on voyait les eaux de l’Hudson se dirigeant vers la baie de New-York. Le chef des Vachers jeta la corde par dessus cette pièce de bois, et il en joignit les deux bouts. Un petit baril défoncé dont les douves tenaient à peine ensemble était resté dans la grange, probablement comme hors de service. Le sergent obéissant à un signe de son officier, le prit et le plaça sous la poutre. Toutes ces dispositions se firent avec un calme parfait, et parurent se terminer à la satisfaction complète du capitaine.
    – Avance ! dit-il alors au Skinner, qui étonné de ces préparatifs, en était resté jusqu’alors spectateur attentif et silencieux. Il obéit, et ce ne fut que lorsqu’on l’eut débarrassé de sa cravate et que son chapeau eut été jeté par terre, qu’il commença à prendre l’alarme. Mais il avait eu recours si souvent lui-même à de pareils expédients pour forcer à parler ceux qui s’opiniâtraient à se taire, qu’il n’éprouva pas autant de terreur qu’en aurait ressenti un homme sans expérience en voyant des apprêts de si mauvais augure. Un nœud coulant lui fut ajusté autour du cou avec le même sang-froid

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