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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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de même de Frances : elle était retournée dans l’appartement où elle avait laissé Dunwoodie, et d’une des fenêtres de cette chambre elle avait suivi tous ses mouvements avec un intérêt profond. Elle n’avait vu ni les troupes se ranger en bon ordre, ni aucun des préparatifs d’une lutte sanglante ; elle n’avait des yeux que pour son amant. Tantôt son sang circulait avec plus de rapidité quand elle voyait ce jeune guerrier déployant sur son coursier autant de grâce que d’adresse, et répandant évidemment un esprit de courage et d’activité parmi tous ceux à qui il s’adressait ; tantôt il se glaçait dans ses veines quand elle songeait que cette bravoure même qu’elle estimait tant pouvait bientôt placer une tombe entre elle et l’objet de toute son affection. Les regards de Frances restèrent attachés sur cette scène tant que ses yeux purent y suffire.
    Dans un champ, sur la gauche des Sauterelles, et un peu en arrière du corps de cavalerie, était un petit groupe paraissant livré à un genre d’occupation tout différent. Il n’était composé que de trois individus, deux hommes et un jeune mulâtre. Le personnage principal était un homme dont la maigreur faisait paraître sa grande taille presque gigantesque. Il portait des lunettes, était sans armes, à pied, et semblait partager son attention entre un cigare, un livre, et ce qui se passait devant lui. Frances résolut de leur envoyer un billet pour Dunwoodie. Elle écrivit à la hâte au crayon : « Venez me voir Dunwoodie, ne fût-ce que pour un instant. » César, chargé de le porter, prit la précaution de sortir par la porte de derrière pour éviter la sentinelle postée sur la terrasse, qui avait très-cavalièrement défendu que qui que ce fût sortit de la maison. Le nègre remit le billet de Frances au personnage que nous venons de décrire, en le priant de le faire passer au major Dunwoodie. C’était au chirurgien du régiment que César s’adressait ainsi, et les dents de l’Africain claquèrent les unes contre les autres quand il vit étalés sur le terrain les divers instruments déjà préparés pour les opérations qui pourraient être nécessaires. Le docteur parut en voir l’arrangement avec beaucoup de satisfaction, lorsqu’il leva les yeux de dessus son livre pour ordonner au jeune mulâtre de porter le billet à l’officier commandant ; et les reportant ensuite sur la page qu’il avait quittée un instant, il continua sa lecture.
    César se retirait sans se presser, quand le troisième individu, qui, d’après son costume, paraissait être un aide-chirurgien, lui demanda fort tranquillement s’il désirait qu’on lui coupât une jambe. Cette question parut rappeler au nègre l’existence de ses deux membres, et il s’en servit si bien qu’il arriva sur la terrasse au même instant que le major Dunwoodie, qui était venu au grand trot. La sentinelle présenta les armes avec une précision militaire, quand l’officier passa devant elle, mais dès qu’il fut entré, elle se tourna vers César, et lui dit d’un ton menaçant :
    – Écoute, noiraud, si tu t’avises encore de sortir de la maison sans que je le sache, je te couperai une de ces oreilles d’ébène avec ce rasoir.
    Menacé dans un autre de ses membres, César fit sa retraite à la hâte dans la cuisine en murmurant quelque chose entre ses dents, les termes Skinner et chiens de rebelles formant la partie la plus remarquable de son discours.
    – Major Dunwoodie, dit Frances quand son amant entra, je puis avoir été injuste à votre égard, avoir paru vous parler avec dureté.
    Son agitation lui coupa la parole, et elle fondit en larmes.
    – Frances, s’écria le major avec chaleur, jamais vous ne m’avez parlé avec dureté, jamais vous n’avez été injuste envers moi, si ce n’est quand vous avez révoqué en doute mon amour.
    – Ah ! Dunwoodie ! ajouta-t-elle en sanglotant, vous allez hasarder votre vie dans un combat : songez qu’il existe un cœur dont le bonheur dépend de votre existence. Je sais que vous êtes brave, tâchez d’être prudent.
    – Pour l’amour de vous ? demanda le jeune militaire enchanté.
    – Pour l’amour de moi, répondit Frances en baissant la voix et en laissant reposer sa tête sur la poitrine de son amant.
    Dunwoodie la serra contre son cœur, et il allait lui répondre, quand le son d’une trompette se fit entendre à l’extrémité de la vallée, du côté du

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