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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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convenir à vos projets, dit Wellmere en souriant dédaigneusement, mais est contraire aux opinions et aux principes de toutes les nations civilisées.
    – Elle est conforme à leur pratique, répliqua avec force le docteur encouragé par un coup d’œil de Lawton, qui rendait justice au bon sens et au jugement de son camarade, tout en riant de ce qu’il appelait son jargon de médecin. Qui voudrait être esclave quand il peut être libre ? Le seul point raisonnable d’où l’on doive partir, c’est que toute société a le droit de se gouverner elle-même, pourvu qu’elle ne viole pas les lois de Dieu.
    – Et vous croyez vous conformer à ces lois en retenant vos semblables en esclavage ?
    Sitgreaves but un verre de vin, toussa, et revint à la charge.
    – Monsieur, dit-il, l’esclavage a une origine bien ancienne, et il est universellement répandu. Toutes les religions et toutes les formes de gouvernement passées ou présentes l’ont admis, et il n’existe pas une seule nation dans l’Europe civilisée qui n’en ait reconnu ou n’en reconnaisse encore le principe.
    – J’espère que vous en excepterez la Grande-Bretagne, Monsieur ?
    – Non certainement, je ne l’en excepterai pas, répondit le docteur avec force, sentant qu’il allait porter la guerre sur le territoire ennemi. Ce sont ses enfants, ses navires, ses lois qui ont introduit et naturalisé l’esclavage dans ce pays. C’est donc sur elle que la faute doit en retomber ; c’est elle seule qu’il faut en accuser. Nous ne faisons que suivre la route qu’elle nous a tracée. Mais pourquoi continuons-nous à la suivre ? C’est qu’on ne peut remédier aux abus que graduellement, de peur de faire naître des maux encore plus grands que ceux qu’ils causent. Avec le temps, nous affranchirons nos esclaves, et l’on ne trouvera plus dans cette belle contrée une seule image du Créateur réduite à cet état avilissant qui lui permet à peine de reconnaître ses célestes bienfaits.
    On se rappellera qu’il y a quarante ans que le docteur Sitgreaves parlait ainsi, et par conséquent Wellmere ne pouvait s’inscrire en faux contre sa prophétie.
    Trouvant le combat au-dessus de ses forces, le colonel anglais quitta la table et alla rejoindre les dames dans le salon. Là, assis entre miss Peyton et Sara, il se trouva plus agréablement occupé à leur rappeler tous les plaisirs qu’ils avaient goûtés à New-York, et mille petites anecdotes relatives à leur ancienne liaison. Miss Peyton écoutait avec plaisir ces détails, tout en préparant le thé avec sa grâce ordinaire, et Sara, les yeux baissés sur son ouvrage, rougissait et tressaillait en entendant les compliments flatteurs qu’il lui adressait dans le cours de l’entretien.
    Le dialogue que nous avons rapporté avait rétabli la paix et l’harmonie entre le docteur et Lawton. Ils allèrent faire une visite à Singleton, revinrent faire leurs adieux aux dames, montèrent tous deux à cheval, et partirent ensemble pour le village des Quatre-Coins, le capitaine pour rejoindre son corps, et Sitgreaves pour aller visiter les blessés. Mais ils furent arrêtés à la porte par une circonstance dont nous rendrons compte dans le chapitre suivant.

CHAPITRE XIV
    Je ne vois plus ces cheveux blancs si clairsemés sur cette tête chauve si respectable. – Je ne vois plus cet air doux, ce regard suppliant quand il était en prière, et cette foi pure qui lui prêtait sa force. Mais il est au sein du bonheur, et je ne regrette plus le sage vertueux qui vivait content dans sa pauvreté.
    CRABBE.
    Nous avons déjà dit qu’en Amérique l’usage laisse écouler fort peu de temps entre la mort et les obsèques, et la nécessité de pourvoir à sa sûreté avait obligé Harvey à abréger encore ce court intervalle pour celles de son père. Au milieu de la confusion et de l’agitation produites par les événements que nous avons rapportés, la mort du vieux Birch n’avait pas attiré l’attention. Cependant quelques-uns de ses plus proches voisins s’étaient réunis à la hâte pour rendre les derniers devoirs au défunt. Ce cortège funèbre passait devant la porte des Sauterelles à l’instant où Lawton et Sitgreaves se disposaient à en sortir, et ce fut ce qui arrêta leur marche. Quatre hommes portaient le cercueil dans lequel reposait le corps de John Birch, et quatre autres les accompagnaient pour se charger à leur tour de ce fardeau, en relevant les

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