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L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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pantelant.
    Alarmé, je me relevai et accourus auprès de lui. Était-il blessé ? Les croisés étaient-ils aux portes de Mondenard ? Je m’agenouillai et le saisis par les épaules.
    —    Par le cul de Satan, pesta-t-il. Je ne me sens pas bien.
    Son visage était luisant de sueur. Les yeux vitreux, il semblait
    confus. Il tourna la tête et je sentis mon cœur se serrer.
    Sur son cou, j’aperçus une tache noire.

Chapitre 3 Agonie
    J’eus l’impression que la Création entière s’effondrait autour de moi. Je ne voyais plus que la marque sur le bras de mon compagnon.
    —    Foutre de Dieu, crachai-je, terrifié. Non.
    Au son de ma voix, les yeux d’Ugolin focalisèrent. Il se redressa difficilement sur un coude et me regarda.
    —    J’ai vu. de la fumée, haleta-t-il en secouant la tête, avant de se mettre à tousser si fort que ses yeux se mouillèrent.
    Des glaires jaunâtres et puantes coulèrent de sa bouche et il lui fallut du temps pour retrouver un semblant de souffle. Je le regardai sans savoir quoi dire. Mon ami avait attrapé le feu sacré, cela était aussi clair que l’eau d’une source. Il était probablement condamné. La prudence aurait exigé que je le laisse là pour courir alerter Pernelle. Mais je ne pouvais me résoudre à l’abandonner, seul. Cet homme était devenu mon ami et m’avait moult fois prouvé sa valeur et sa loyauté. Je lui en devais autant. À cause de cette maudite Vérité, que j’aurais préféré ne jamais apprendre, j’avais déjà perdu Bertrand de Montbard, dont je ressentais encore cruellement l’absence. Je ne ferais pas mes adieux à Ugolin sans lutter, fût-ce au prix de ma propre vie, qui ne valait rien de toute façon.
    —    Tu peux marcher ? m’enquis-je.
    —    Je. je crois. Il devait y avoir. quelque chose de. faisandé. dans les provisions. que tu m’as apportées. hier.
    —    C’est sans doute ça, oui, répondis-je, la gorge serrée. Ou encore, tu as attrapé un mauvais rhume. Allez, debout, grosse femmelette.
    Le Minervois s’appuya sur le sol, puis se mit à quatre pattes. Ses bras et ses jambes tremblèrent sous l’effort, mais, avec mon aide, il parvint à se lever.
    —    Viens, lui intimai-je.
    Je passai son bras autour de mes épaules pour le supporter et nous nous éloignâmes de l’incendie qui faisait rage. En chemin, il remarqua les corps des deux croisés sur le sol, le fruit de leur pillage répandu entre eux.
    —    Ils. étaient là ? fit-il faiblement.
    —    Comme tu vois.
    —    Tu. aurais pu m’en. garder un, égoïste, trouva-t-il la force de blaguer.
    —    Ne crains rien, il y en aura d’autres. Bougre d’animal, ce que tu peux être lourd.
    Je le conduisis vers la maison dans laquelle Estève nous avait reçus, Pernelle et moi. Le colosse marchait difficilement, d’un pas incertain, et je devais le soutenir pour ne pas qu’il s’effondre. Je songeai passagèrement qu’en le touchant, je m’exposais à la contagion, mais Ugolin avait besoin de moi et je lui viendrais en aide, comme il l’avait lui-même fait sans jamais hésiter. Et puis, ma damnation me condamnait à vivre.
    Lorsque nous atteignîmes la maison, j’ouvris et je le fis entrer.
    —    Allonge-toi là, dis-je en désignant la paillasse qui se trouvait dans un coin de la pièce. Je vais aller chercher dame Pernelle. Elle prendra bien soin de toi.
    —    J’ai. attrapé la. maladie. Tu crois ? demanda-t-il, inquiet.
    —    Je ne suis pas guérisseur, rétorquai-je. Allez, repose-toi.
    —    Tu. as raison. Un petit somme. me fera du. bien, dit-il en se laissant choir de tout son poids.
    —    Ne bouge pas d’ici.
    J’attendis une réponse, mais aucune ne vint. Il dormait déjà comme un sonneur. Ou peut-être s’était-il évanoui, je n’aurais su le dire. Je m’approchai et, imitant Pernelle, que j’avais souvent vue faire, posai deux doigts contre son cou, cherchant les battements de son cœur. Lorsque je les sentis, faibles et irréguliers, je fus soulagé. Il était vivant. Pour le moment en tout cas.
    Je sortis en trombe et, prenant mes jambes à mon cou, je quittai le village enfumé. Je courus de toutes mes forces sans m’arrêter, reprenant le chemin en sens inverse aussi vite que j’en étais capable. Je finis par surgir dans le camp, à bout de souffle, et repérai Pernelle. En compagnie d’Estève, elle brassait patiemment le contenu d’un chaudron installé

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