L'Héritage des Templiers
pour elle, il s’était toujours montré direct et indépendant, ce qui en faisait un bon agent, quelqu’un en qui elle pouvait avoir confiance, mais qui savait également faire preuve de compassion. En fait, il était bien plus qu’un collaborateur pour elle.
C’était un ami.
Cela dit, elle n’avait aucune envie qu’il fourre son nez dans ses affaires.
Se lancer à la poursuite de l’homme au blouson rouge, c’était du Malone tout craché, mais cela posait aussi un problème. Lui rendre visite maintenant entraînerait une série de questions auxquelles elle n’avait aucune intention de répondre.
Les retrouvailles avec son vieil ami allaient devoir attendre.
Malone sortit de la Tour ronde et se mit à la recherche de Stéphanie. Lorsqu’il quitta l’observatoire, les secours s’occupaient du couple de personnes âgées. Sonné après avoir reçu un coup sur la tête, l’homme s’en remettrait. Toujours en état de choc, sa compagne devait être transportée vers une ambulance garée près de là.
Le corps de l’homme au blouson rouge était toujours étendu dans la rue, recouvert d’un drap jaune clair, et les policiers s’efforçaient de disperser la foule. Malone approcha furtivement et vit que le photographe de la police s’apprêtait à prendre quelques clichés. Le voleur s’était tranché la gorge, cela ne faisait aucun doute. Le couteau sanguinolent reposait à quelques mètres de son bras, bizarrement contorsionné. Le sang qui s’était écoulé de la plaie formait une flaque sur les pavés. Il avait le crâne défoncé, la cage thoracique enfoncée, les jambes tordues, comme dépourvues d’os. Les agents de police avaient demandé à Malone de rester dans les parages car ils auraient besoin de son témoignage, mais, dans l’immédiat, il lui fallait retrouver Stéphanie.
Il émergea de la foule des curieux et leva les yeux vers le ciel où, en cette fin d’après-midi, le soleil brillait de mille feux. Pas un nuage en vue. La nuit serait idéale pour observer les étoiles, pourtant personne ne se rendrait à l’observatoire, au sommet de la Tour ronde. Non. Ce soir l’accès en serait interdit puisqu’un homme s’était jeté dans le vide depuis son sommet.
Que penser de cet homme, d’ailleurs ?
Dans l’esprit de Malone, la curiosité le disputait à la crainte. Il savait qu’il aurait dû rentrer à la librairie, oublier Stéphanie Nelle et son étrange comportement. Ses affaires ne le concernaient plus, désormais. Mais il savait aussi qu’il n’en ferait rien.
Quelque chose se tramait, quelque chose de pas net.
Il repéra Stéphanie à une quarantaine de mètres devant lui, dans Vestergade, une autre des longues ruelles qui sillonnaient le quartier commerçant de Copenhague. Elle marchait d’un pas rapide, décidé, et bifurqua soudain sur la droite avant de disparaître dans un immeuble.
Il trottina dans sa direction et aperçut l’enseigne de HANSEN’S ANTIKVARIAT, la boutique d’un bouquiniste. L’une des rares personnes en ville à ne pas avoir accueilli Malone avec enthousiasme, Peter Hansen n’aimait pas les étrangers, surtout pas les Américains, et avait même essayé d’empêcher Malone de rejoindre l’Association des bouquinistes danois. Heureusement, l’antipathie de Hansen ne s’était pas avérée contagieuse.
Les vieux instincts de Malone reprenaient le dessus, des sentiments et des sensations latents depuis qu’il avait pris sa retraite, un an plus tôt. Des sensations qu’il n’aimait pas mais qui l’avaient toujours poussé à aller de l’avant.
Depuis le seuil de la boutique, Malone aperçut Stéphanie et Hansen en pleine discussion. Ils se retirèrent au fond du magasin qui occupait le rez-de-chaussée d’un immeuble de trois étages. Il en connaissait le plan pour avoir étudié l’année précédente celui de toutes les librairies de Copenhague. Pratiquement chacune d’entre elles était d’une netteté toute Scandinave : piles de livres classés par thème, ouvrages alignés avec soin sur les rayonnages. Hansen, en revanche, n’était pas aussi soigneux. On trouvait dans sa boutique un mélange éclectique de nouveautés et de vieux volumes – majoritairement des nouveautés, puisqu’il n’était pas du genre à payer le prix fort pour racheter des collections privées.
Malone se fondit dans l’obscurité en espérant qu’aucun des employés ne le reconnaîtrait. Il avait dîné une ou deux
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