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L'histoire secrète des dalaï-lamas

L'histoire secrète des dalaï-lamas

Titel: L'histoire secrète des dalaï-lamas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilles van Grasdorff
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ces éléments ne sauraient suffire pour faire de lui un successeur : il y a une centaine d’autres candidats ! Mais ceux-ci seront très vite écartés.
    Un matin de septembre 1684, bien avant l’aube, le garçonnet de deux ans et ses parents sont transportés à Tsöna, un des monastères gelugpas les plus proches de Tawang. Ses attitudes, l’attention que les lamas de Tashilhunpo lui portent, tout semble indiquer qu’il est un tulku important, mais de là à deviner ce qu’il adviendra de lui...
    Ainsi que le veut la constitution tibétaine élaborée par le Grand Cinquième et le quatrième panchen-lama, Lobsang Yeshé va devenir le tuteur de l’enfant de Tawang. Le cinquième panchen-lama le rencontre à plusieurs reprises entre 1685 et 1690, afin d’entreprendre son éducation et sa formation. Un problème majeur demeure : son intronisation. Aucune cérémonie n’a été fixée par le régent et il n’est pas question d’amener l’enfant à Lhassa. Voici le Tibet avec deux secrets jalousement gardés : la disparition du cinquième dalaï-lama et la présence à Tsona de son successeur. Le temps passe et, en 1697, enfin, les événements se bousculent... Toujours sur ordre de Sangyé Gyatso, l’enfant de Tawang, âgé désormais de quinze ans, est transporté avec toute sa famille vers Nankartsé, à une centaine de kilomètres de Lhassa. Le panchen-lama l’y attend.
    En mars, le régent annonce une double nouvelle : la disparition du Grand Cinquième et la découverte de sa réincarnation. Le sixième dalaï-lama se voit ordonné par le cinquième panchen-lama, qui lui a donné le nom de Lobsang Rigdzin Tsangyang Gyatso.
    Une autre cérémonie, plus officielle, se déroule au mois de septembre 1697, à Nyethang, près de Lhassa. La tente de Paon en satin jaune a été dressée. Elle n’avait plus été utilisée depuis 1622 et l’intronisation du Grand Cinquième. Le régent est là, entouré des dignitaires religieux et laïcs des principaux monastères gelugpas. Les autres écoles du bouddhisme tibétain sont présentes. Les délégations étrangères se pressent, les Mongols mais aussi les ambans. L’interrègne s’achève.
    À la fin du mois, le sixième dalaï-lama Rigdzin Tsangyang Gyatso a fini par rejoindre Lhassa. Le jeune souverain de quinze ans peut dès lors s’installer dans le Potala, dont les travaux sont achevés depuis 1693, il y a quatre ans déjà : les appartements d’en haut , c’est-à-dire tout le dernier étage, sont désormais réservés aux dalaï-lamas ; les appartements d’en bas , l’avant-dernier étage, aux régents. Cette coutume perdurera jusqu’en 1959 et la fuite du quatorzième dalaï-lama.
     
    Initiations sexuelles
     
    À Tsöna d’abord, au monastère de Drepung ensuite, le panchen-lama enseigne au sixième dalaï-lama la philosophie du Dharma et les premières pratiques du Kalachakra, d’après les commentaires de Tsongkhapa, fondateur des Bonnets jaunes. Cette transmission, commune aux quatre écoles majeures du bouddhisme tibétain, contient plusieurs interdits comme de se moquer de son maître ou de ses condisciples tantriques, de renoncer à la bodhicitta [*] , l’esprit d’éveil , de se railler des femmes ou encore de dévoiler les secrets du Kalachakra [89] ...
    Mais à peine le dalaï-lama est-il installé au Potala qu’un scandale éclate : l’adolescent est amoureux de la fille d’un aristocrate tibétain et lui écrit des poèmes.
     
    Des hautes montagnes de l’est
    La lune neuve s’est levée
    De cette femme pas encore femme
    Le visage me hante [90] ...
     
    Si ses poèmes comptent parmi les plus beaux de la littérature tibétaine, ce n’est pas l’attitude attendue du sixième dalaï-lama. Celui-ci s’est pourtant déjà distingué par sa passion pour l’écriture et la poésie, ayant confié au cinquième panchen-lama les préférer à la politique. L’ennui, c’est que là son cœur est pris. Pendant des jours, des semaines, il espère. Assis en tailleur, à même le tapis devant l’autel, il tente de se réfugier dans la méditation pour oublier, seul, mais se désespère. L’épaisseur des murs ne permet à aucun bruit de l’extérieur de venir troubler sa prière, or la religion ne l’intéresse guère... contrairement aux choses de l’amour.
    Cette fois, c’est à une fille de Shol, le village à flanc du Potala, qu’il adresse ce poème :
     
    Ô mon amour, mon cœur s’en va
    À la pensée

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