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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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dos de ses confortables pardessus, pour faciliter les recherches en cas d’évasion. Houli porte des complets ajustés et cintrés, taillés dans les meilleurs tissus rayés dont dispose son ami Kapo tailleur qui ne lui refuse rien, car Houli satisfait une de ses passions majeures en lui apportant du schnaps.
    — Ce précieux schnaps ouvre toutes les portes des puissants responsables de l’intérieur : que ce soit aux Blocks, aux bureaux, à l’infirmerie, aux magasins, au tailleur ou aux cuisines. Mais il n’est pas facile de se le procurer et Houli, à ce titre, est un précieux intermédiaire. Les dents en or, arrachées aux cadavres de l’infirmerie sur les ordres des S.S., ne sont pas toutes récupérées par ces messieurs. Avec la complicité du Kapo de l’infirmerie, certaines sont utilisées justement par notre Oberkapo qui les échange contre de l’alcool à des travailleurs civils de la mine. Et c’est pour cela qu’Houli, bien vu par le commandant S.S. d’une part, possesseur de monnaie, d’autre part, jouit à l’intérieur du camp d’un standard de vie bien supérieur à n’importe quel Kapo. Houli est un criminel, un droit commun jugé et condamné. Il porte le triangle vert à côté de son matricule. Quant à nous, nous sommes des politiques au triangle rouge, nous n’avons été ni jugés, ni condamnés. Les otages ramassés dans les villes, les campagnes et les maquis forment la majorité du prolétariat international du camp. Les autres sont des patriotes appartenant à la Résistance et des militants politiques. Nos camarades ont quelques responsabilités, aux bureaux surtout, et s’emploient, non sans succès, à améliorer notre régime.
    — Mais voilà que les lumières du poste de garde viennent de s’allumer. Nous allons sortir. Le long serpent de détenus en guenilles s’allonge sur la route. Houli contrôle la sortie. C’est la vingt-troisième fois que nous sommes comptés ce matin ; je me suis amusé à vérifier : ce fut d’abord par le Schreiber, puis par un aide bureaucrate du Block ; ensuite par le chef du Block, enfin par le Kapo qui nous prit en charge. Chacun recommença plusieurs fois avec force coups de gueule… et de poings…
    — Houli est à la tête de la colonne. Il plaisante en allemand avec les quelques « beaux jeunes gens » qu’il protège. La différence entre eux et nous s’établit immédiatement à l’aspect physique : le poids, le teint, le pardessus confortable. Le chaud bonnet fourré avec oreilles, les bonnes chaussures. Ils auront des places de choix, surveillant d’une dizaine de détenus ou « planqué » aux compresseurs qui fournissent l’air comprimé à toute la mine, ou encore comptable au magasin d’outillage.
    — Sur le côté de la route passe un « Posten » avec un chien policier dressé pour la recherche des évadés.
    — Nous attendons une heure notre train qui vient de la direction de Linz… Enfin, notre vieille locomotive apparaît suivie des vingt wagons de marchandises que nous connaissons bien. Nous montons deux par deux. Nous devons nous tenir par le bras pour faciliter le comptage. Nous sommes entassés de chaque côté de la porte centrale à laquelle nous devons tourner le dos, et surtout ne pas chercher à tourner la tête, la schlague du Kapo veille. Nous sommes tellement serrés les uns contre les autres sans autre bagage que notre fidèle gamelle en forme de cuvette accrochée à la ceinture, qu’à plusieurs reprises j’ai pu lever mes deux pieds en même temps sans m’affaisser pour cela. Cette performance est irréalisable dans le métro à Paris où pourtant les compressions sont à un tel point sérieuses que les vitres en sont parfois cassées. Des paroles de mauvaise humeur se font entendre en même temps que des poussées et un peu de bousculades dans le fond du wagon. L’explication est dans cette exclamation de Carette : quelle odeur ? La soupe aux choux déshydratés et de betteraves sucrières travaille étrangement les intestins… et il n’est pas toujours facile de se retenir…
    — Comptés à nouveau sur le quai, nous regardons le soleil rouge qui apparaît au-dessus de l’horizon vers le petit bois de pins, là-bas sur la colline qui couve l’usine souterraine creusée dans son flanc. C’est là que nous allons travailler.
    — Nos camarades de l’équipe de nuit sont alignés sur la gauche de la route cimentée. En tête, trois cadavres sur des

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