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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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souffrances de tout le peuple tchèque. Lorsqu’ils chantaient l’hymne tchèque toujours suivi de l’hymne slovaque, leur ferveur patriotique était celle du peuple tchécoslovaque. Par contre, les tsiganes allemands ne savaient pas pourquoi ils étaient là. Beaucoup d’entre eux avaient fait la campagne de France comme soldats allemands et j’ai vu des dizaines d’insignes de la N.S.D.A.P. et du B.D.M. C’est au camp que j’ai entendu pour la première fois le « Frankreichlied », marche de France : « Über die Schelde, über die Maas, marschieren Wir nach Frankreich hinein. (Au-delà de l’Escaut, au-delà de la Meuse, nous marchons, nous marchons vers l’intérieur de la France.) D’autres avaient été en Russie et m’ont chanté à plusieurs reprises le Rosslandlied : Wir standen für Deutschland auf Posten, und hieltendie heilige Wacht (…) Führer, befiehl, wir folgen dir, etc. (Führer, ordonne, nous te suivons).
    — Étaient-ils donc rejetés par le peuple allemand ? Inconcevable, impensable. Donc une clique de « scélérats » (Schurken) les avait déportés pour les dépouiller et peut-être, pour les voir mourir – « Quelle clique ? » Cette incertitude minait leur résistance morale et physique.
    — Les tsiganes tchécoslovaques, partageant le sort du peuple tchécoslovaque, partageaient aussi son espoir et sa certitude de la défaite allemande. Les tsiganes allemands étaient victimes, comme le peuple allemand, de la propagande et tout comme le peuple allemand, ne savaient pas que l’Allemagne serait vaincue.
    — Les après-midi étaient souvent tranquilles et le travail terminé, les tsiganes tchèques, malades ou infirmiers, nous chantaient leurs belles et fières chansons tchèques. Ils avaient un sens de l’harmonie inné. Dès qu’ils entendaient une mélodie, ils l’harmonisaient sans aucune hésitation. Un jour je passais silencieusement et seul le long de l’allée centrale du Block. Tout à coup, j’entends un chant à deux voix, chanté par des femmes. Je m’approche et j’écoute, alors elles s’arrêtent, un peu honteuses. Je les prie de continuer en leur expliquant que c’est très beau. Ces jeunes femmes tchèques reprennent le chant (soprano et alto) avec des paroles tsiganes. Odoï telé Balval pour del. Miro pirano, ouj ma moikel, etc. C’était une complainte de prisonnier tsigane pleine de charme ingénu. Elles avaient un timbre inoubliable.
    — Souvent le camp était comme endormi : pas un S.S. Les potentats, tyranneaux polonais ou allemands occupés à leurs affaires : le trafic. Alors nous allions rendre visite à nos amis dans les Blocks d’habitation tchèques ou allemands. Les amies tsiganes allemandes nous délectaient surtout avec la chanson « Faria ». Elles avaient un timbre chaud et envoûtant. Il existe peut-être des enregistrements de Faria ou de « Odoï telé ».
    — Pour les détenus non tsiganes, la défaite de l’Allemagne était indiscutable mais le moral était directement influencé par les variations que subissaient les convois. Parfois des jours et des semaines passaient sans qu’on vît arriver de nouveaux convois. Alors l’euphorie gagnait le camp et les médecins croyaient davantage à l’utilité de leur travail. Un jour on distribua des chemises aux malades : bon signe.
    — D’une façon générale, les infirmières tsiganes étaient assez bien habillées. Une des pièces vestimentaires les plus importantes pour elles étaient le châle. Grâce à leurs relations, elles avaient toutes de beaux châles.
    — On connaît le geste instinctif et ancestral suscité par la pudeur féminine surprise par le regard indiscret. Les œuvres d’art reproduisant le corps féminin, montrent le geste accompli ou inachevé, cherchant à protéger les deux foyers pudiques les plus exposés et aussi les plus vulnérables par le regard : une main se porte vers la gorge et l’autre vers le Mont de Vénus et la dépression qui l’accompagne. Les femmes tsiganes, surprises dans leur nudité, portaient, dans leur charmante confusion, les deux mains vers la tête pour cacher ce qui amputait leur féminité : l’absence des cheveux. Ensuite, remises de leur trouble, portaient une main vers le bas et cachaient ce qu’elles pouvaient… avec une main.
    — En revanche elles se servaient du châle avec un art admirable. Elles s’en faisaient une coiffure drapée de façon à laisser un rectangle retomber

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