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L'Homme au masque de fer

L'Homme au masque de fer

Titel: L'Homme au masque de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Bernède
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nourrice que vous aviez fait venir en secret de province, vous avez gagné ce pays, espérant ainsi mettre à l’abri de toutes poursuites l’enfant illégitime de la reine. Voilà pourquoi, madame, au nom de la Raison d’État, une dernière fois, je vous somme de nous restituer cet enfant ! Si vous acceptez, non seulement vous rentrerez en grâce immédiate auprès du cardinal, qui est décidé à vous combler de ses bienfaits et de ses faveurs, mais, en son nom, je prends l’engagement solennel que cet enfant sera élevé par les soins du cardinal avec tous les égards dus à son rang, sans que nul, cependant, ne puisse soupçonner quelles sont ses origines. Madame, j’attends votre réponse !
    – Elle est fort simple, déclara la duchesse, sans se départir un seul instant de l’attitude qu’elle avait adoptée. Allez consulter le registre de la paroisse de Saint-Marcelin, et vous y verrez que cet enfant, que vous attribuez à la reine et à M. de Mazarin, est, en réalité, celui de Gaëtan de Castel-Rajac et d’une jeune fille des environs de Marmande, morte, ces jours derniers, en donnant le jour à son fils.
    Redevenu nerveux, M. de Durbec s’écria :
    – On peut écrire ce que l’on veut sur un registre de baptême.
    – Je vous ferai observer, monsieur, que ces déclarations sont signées par M me  la duchesse de Chevreuse, M. de Mazarin, M. le chevalier de Castel-Rajac, M. le baron d’Assignac, M. le comte de Laparède. Donc, si nous avons fait une fausse déclaration, il faudra que vous nous poursuiviez en justice.
    Durbec s’écria :
    – Ne nous égarons pas en vains subterfuges. Voulez-vous, oui ou non, madame, me dire ce que vous avez fait de cet enfant ?
    – Demandez-le à son père. Lui seul pourra vous renseigner à ce sujet.
    – C’est votre dernier mot ?
    – C’est mon dernier mot.
    – En ce cas, madame, vous ne vous en prendrez qu’à vous seule des conséquences regrettables que vont avoir pour vous vos façons d’agir.
    – Vous devriez savoir, monsieur, que je ne suis pas femme à me laisser intimider.
    Cette fois, Durbec ne répondit rien. Il s’en fut simplement tirer sur le cordon d’une sonnette. L’un des panneaux de la porte s’ouvrit, et l’espion de Richelieu dit au garde qui se présenta :
    – Prévenez votre capitaine que je désire lui parler.
    Le garde salua et disparut. Durbec jeta un regard vers la duchesse qui n’avait pas bougé. Toujours debout, près de la table, en une attitude de sobre dignité, elle attendait la suite des événements avec la sérénité d’une femme qui vient de faire tout son devoir et qui est décidée à le remplir jusqu’au bout.
    Un instant après, M. de Savières réapparut dans la pièce. Durbec lui dit, désignant M me  de Chevreuse :
    – Veuillez, capitaine, considérer, à partir de ce moment, M me  la duchesse de Chevreuse comme votre prisonnière. Conduisez-la dans la chambre où elle doit demeurer enfermée, jusqu’à nouvel ordre, au secret le plus absolu.
    Féru de discipline, le capitaine ne pouvait qu’obéir.
    – Suivez-moi, madame, dit-il à Marie de Rohan qui, après avoir foudroyé Durbec d’un regard de mépris, s’en fut, guidée par M. de Savières, à travers les corridors sombres et déserts du vieux château de Montgiron.
    Demeuré seul, l’émissaire de Richelieu grinça entre ses dents :
    – Avant demain, j’aurai bien trouvé le moyen de faire parler cette maudite duchesse.
    *
    * *
    Le premier mouvement de Gaëtan fut de se précipiter vers Montgiron, sans trop savoir comment il pourrait délivrer M me  de Chevreuse.
    Cette impétuosité n’était guère dans les manières de Mazarin qui préférait la réflexion à l’action.
    – Je crois, dit-il, qu’il serait beaucoup plus sage d’employer la ruse. En effet, si nous nous avisons d’occire une grande partie ou la totalité des gardes du cardinal, celui-ci ne nous le pardonnera pas et, à moins que nous prenions la décision de quitter par les moyens les plus rapides le doux pays de France, nous ne tarderons pas, malgré tous nos efforts, à tomber entre ses mains. Je crois le connaître assez bien pour pouvoir vous déclarer que, si nous lui infligions un pareil affront, il serait fort capable de nous envoyer un régiment à nos trousses, tandis que, si nous arrivions à pénétrer subrepticement dans le château, à découvrir l’endroit où est enfermée M me  de Chevreuse et à la

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