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L'homme lesbien : Précédé de Tombeau de Merlin ou Jean Markale, poète de la celtitude

Titel: L'homme lesbien : Précédé de Tombeau de Merlin ou Jean Markale, poète de la celtitude Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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superbe travesti, ce n’est pas un hasard. On ne sait rien des rapports intimes qui existaient entre eux, mais on les devine aisément. Il me semble donc possible de classer Salvador Dali parmi les hommes lesbiens, qu’ils s’avouent tels ou qu’ils préfèrent se réfugier dans un orgueilleux silence.
     
    Dans l’amour lesbien, et pour qu’il soit vécu dans sa plénitude, il faut que les amants acceptent chacun les désirs de l’autre. Il faut que chacun soit dans une dimension partagée librement et sans aucune arrière-pensée. Mais quelle dimension   ? Ou plutôt de quelles dimensions s’agit-il   ?
    Deux amants peuvent faire l’amour l’un en face de l’autre, sans contact entre les deux, et parvenir, par divers moyens, à atteindre ce que les Anglo-Saxons appellent un climax , c’est-à-dire un orgasme entièrement partagé par l’un et l’autre dans un moment où s’opèrent fusion des désirs charnels et réalisation de l’unité originelle.
    Cela paraît simple et logique. Mais qu’en est-il à notre époque où les technologies se sont développées à un point inimaginable autrefois   ? Autrement dit, deux amants ont-ils besoin d’être côte à côte ou l’un en face de l’autre, dans une même dimension physique et nécessairement limitée – en prise directe, si l’on peut dire – pour parvenir à l’extrême du transport amoureux   ?
    Dans les années 1970, une pratique s’est considérablement développée, celle de l’amour au téléphone . Le contact entre deux personnes se faisait uniquement par la voix, et cela pouvait aller très loin. Bien entendu, cette pratique a été récupérée par de louches officines qui, moyennant des tarifs consentis à l’avance, s’efforçaient de donner satisfaction à des clients enfermés dans leur solitude ou en mal d’amour.
    Depuis, les choses ont évolué. L’image est venue doubler le son, et le développement mondial du réseau Internet a fait le reste. Écartons d’emblée la récupération commerciale de l’évolution. Cette exploitation, normale dans un système capitaliste, n’a rien à voir avec l’attitude d’un homme lesbien sincère, honnête et désintéressé, capable d’aimer à distance comme le firent Abélard, Jean-Jacques Rousseau, Charles Baudelaire et d’autres dont l’Histoire ne nous a laissé aucune trace. Mais c’est vrai   : à l’heure actuelle, un amant qui réside en France peut faire l’amour avec la femme qu’il aime, bien qu’elle se trouve en Australie.
    C’est une manière d’être lesbien.
    On objectera que cette sorte de pratique est seulement virtuelle et qu’elle ne correspond à aucune réalité palpable. C’est oublier que la réalité nous est toujours inconnue et que nous n’en percevons que les phénomènes, c’est-à-dire les manifestations qu’elle provoque dans notre univers sensible. L’utilisation des technologies les plus sophistiquées n’est pas plus aberrante que celle des méthodes empiriques d’ordre psychique qui étaient celles des peuples dits primitifs. Et peut-être qu’une telle utilisation permettra à de nombreux hommes de prendre mieux conscience de la part « lesbienne » qui couve sous leur carapace machiste.
     
    À ce sujet, il est bon de se référer à ce que disait le peintre Paul Gauguin dans Noa Noa tandis qu’il observait les faits et gestes des autochtones des îles du Pacifique, populations où la nudité efface les antagonismes de tout genre   : « Était-ce un homme qui marchait devant moi   ? Chez ces peuplades nues, la différence entre les sexes est bien moins évidente que dans nos climats. Nous accentuons la faiblesse de la femme en lui épargnant les fatigues, c’est-à-dire les occasions de développement, et nous la modelons d’après un idéal menteur de gracilité. À Tahiti, l’air de la forêt ou de la mer fortifie tous les poumons, élargit toutes les épaules, toutes les hanches, et les graviers de la plage ainsi que les rayons du soleil n’épargnent pas plus les femmes que les hommes. Elles font les mêmes travaux que ceux-ci, ils ont l’indolence de celles-là   : quelque chose de viril est en elles, et en eux quelque chose de féminin. Cette ressemblance des deux sexes facilite leurs relations, que laisse parfaitement pures la nudité perpétuelle, en éliminant des mœurs toute idée d’inconnu, de privilèges mystérieux, de hasards ou de larcins heureux – toute cette livrée sadique, toutes

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