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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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causaient peu, semble-t-il, mais se plaisaient ensemble.
    – Il existe pour les vieillards solitaires des présences qui comptent davantage que de longs discours.
    Nicolas soupira, l’air rembruni.
    – Je vous perce à jour, mon bon : le départ de Louis vous pèse. C’est le propre des fils de prendre un jour la route, leur route.
    – Ce n’est encore qu’un enfant !
    – C’est le propre des pères de voir ainsi les fils, longtemps. Songez qu’à son âge, provincial et sans beaucoup d’appuis, vous étiez sur le point d’être pré
cipité dans le creuset de cette ville. Une lettre de recommandation et l’amitié d’un vieux carme. Autre chose ? Oh ! La reine. Cela lui passera. Ce sont là mécomptes de cour qui se soldent à condition de n’y point prêter attention. Les grands sont aussi girouettes que les autres. Eh, baste ! Il y a eu toujours un Ranreuil bien en cour. Et vous avez le roi ! Quant aux railleries de la reine en public, vous savez ce que j’en pense, c’est une manière d’être qui honore son esprit mais insulte son bon naturel. Et ne serait-ce votre fidélité, elle se serait fait un ennemi. Pour votre affaire, il me semble vous voir guidant un attelage de plusieurs coursiers fougueux. Trop de rênes dans deux mains seulement ! Il va falloir rassembler tout cela.
    – J’attends et j’espère aujourd’hui des éléments susceptibles d’écarter le superflu pour conserver l’essentiel.
    – Bien, alors je vous lâche, Nicolas. Au galop, au galop !
    – Oui.
    – Demeurez ce que vous êtes. Votre âme est délicate et sensible. Ne laissez pas racornir votre cœur par des attitudes ou des paroles dont il ne restera rien, sinon le remords envers ceux qui les auraient inspirés. Reverrons-nous Louis avant son départ ?
    – Je le crois. Il doit s’équiper. Trousseau, armes, tenues chez maître Vachon. Cela prendra du temps. Il descendra ici et nous l’aurons quelques jours tout à nous.
    Rejoignant le Châtelet, Nicolas sentit l’inquiétude le tarauder. Pourquoi Naganda n’était-il pas rentré rue Montmartre ? Avait-il été entraîné par son stratagème plus loin qu’il ne l’avait souhaité ? Pourquoi n’avait-il adressé aucun message ? Il espérait contre
toute attente le retrouver au bureau de permanence, mais Bourdeau seul s’y tenait, impatient d’évidence de lui communiquer le résultat de ses propres recherches.
    – Voyez cet air faraud ! dit Nicolas. Ne croirait-on pas un briquet qui vient de retrouver la voie ?
    – Tu ne crois pas si bien dire. Imagine que j’ai fait comme convenu visite au vieux M. Patay.
    – Le commis de M. de Chamberlin et son intime confident.
    – Tout juste et plus que tu ne le penses. Après bien des détours et des propos en cul-de-sac, il a fini par déballer son paquet. Le Chamberlin était, si tu m’en crois, un vieux farceur. Lui et Patay avaient mis au point un système d’eux seuls connu, qui leur permettait, quand le premier était absent, de faire passer la consigne de telle manière que personne ne pût traverser le message. Cela, m’a-t-il avoué, était d’autant plus indispensable que les matières traitées par le contrôle général de la Marine étaient du dernier confidentiel et qu’il apparaissait que des informations filtraient par des agents corrompus. Ainsi, pour pallier l’inconvénient, étaient-ils tombés d’accord pour communiquer entre eux par la disposition des livres du bureau du contrôleur général et…
    – … Ainsi aux Porcherons, dans la crainte ou la certitude de son trépas prochain, un dernier message destiné à M. Patay avait-il été abandonné à sa sagacité dans la bibliothèque.
    – Tu me tires les mots de la bouche et seul M. Patay était en mesure de remarquer la chose. Toi, tu t’es rendu compte de quelque chose et as traversé le stratagème, car tu aimes les livres et leur disposition désordonnée t’a choqué. Qui d’autre l’aurait remarqué ?
    – Et ce n’est pas tout. Te souviens-tu de ce papier désignant M. Patay comme exécuteur testamentaire, que tu avais découvert dans le tiroir secret du cabinet allemand ?
    – Certes.
    – Patay en connaissait l’existence et avait consigne de son ami de l’ouvrir coûte que coûte après la mort de M. de Chamberlin.
    – Que ne nous a-t-il dévoilé tout ceci plus tôt ?
    – Je lui en ai fait la remarque. L’homme est prudent, circonspect. Je crois qu’il a pris des

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