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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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généralité qui feront suivre à l’ensemble de nos informateurs. Les basses mouches qui rôdent
par les rues, jardins, promenades, devant les maisons de jeu, couvents et casernes. À tous ceux aussi qui, mauvais sujets plus ou moins repentis, hantent le pavé, avides de la tolérance de la justice, aux maquerelles et filles galantes du dernier ordre toujours soucieuses de notre indulgence.
    – Belle engeance en vérité ! éclata Bourdeau. Une lie qu’on est obligé de remuer, d’une espèce qui abuse de tout et ne respecte rien, plus malfaisante encore que ceux qu’elle est chargée de dénoncer. Tu sais bien que tous ces espions, mouchards et autres vermines produisent les désordres les plus accablants pour le pauvre peuple, leur principale victime. Nous constatons chaque jour des abus commis sur dénonciation de ces honteux satellites. Les vois-tu sacrifiant l’innocence et la justice à l’appât du gain et aux viles passions qui les tourmentent ?
    Nicolas, qui était accoutumé aux sorties de son ami, accueillit le propos en riant.
    – Écoutez-le ! Ne dirait-on pas qu’il parle comme on écrit dans certains libelles ? Comment, cela fait bien trente ans que tu uses et abuses de ce système qui fait la réputation de notre police et te voilà jetant l’interdit sur ces pratiques ? Sartine répétait à satiété que lorsque trois Parisiens bavardent deux sont à lui . T’en es-tu jamais plaint ?
    – Le bel honneur que voilà ! On ne s’étonne plus que la Sémiramis du nord et la satrapine de Vienne nous envient ce système ! Il les autorise à étrangler la liberté de leurs peuples.
    – Il t’en a bien fallu, ingrat, pour pouvoir faire filer au mieux les suspects. Livrés à ces mouches, ils ont beau alors modérer l’allure ou l’accélérer, un œil sûr et infatigable, certes mercenaire je te l’accorde, les envisage et ne les abandonne point. Ils sont
reconduits là où ils logent. Quelquefois, pour se dérober, le suspect disparaît sous une porte cochère. En sort-il ? Il voit un homme qui rentre. Croit-il avoir mis en défaut nos mouches ? Il en a six au lieu d’une à ses basques !
    Haussant les épaules, l’inspecteur marmonna. Nicolas comprit soudain que ces éclats, mettant au jour de vraies convictions, visaient à masquer l’inquiétude qui l’avait saisi quant au sort de Naganda. Il lui en fut reconnaissant.
    – Lorsque viendra le règne de la vertu, ces vils outils disparaîtront d’eux-mêmes. Qui toucheras-tu d’autre comme informateurs ?
    – La demande irriguera nos sources habituelles, mendiants patentés, Tirepot et tous ceux qui, déguisés en mitrons, en garçons perruquiers ou en porteurs d’eau, s’échinent à notre service. On fera prévenir Mme Pignau, femme de cocher, qui fera passer le message à la corporation. Tu la connais, cette grosse gaguie ? Devant la Samaritaine, elle exerce son magistère sur toutes les revendeuses de fripes des quais. Aucune qui oserait lui désobéir. Le guet, la garde de Paris et les gardes-françaises en seront avertis. La marmaille à gages s’éparpillera et, en jouant, resserrera la trame de cette toile.
    – Beau royaume en vérité, où l’on voit sans rechigner de petits drôles à peine sortis du maillot déjà espions et délateurs !
    Nicolas fit mine de ne pas répondre.
    – Pour couronner le tout, nous ferons savoir qu’une gratification sera allouée pour toute information utile. Enfin, fais-moi chercher Baptiste Grémillon, sergent de la compagnie du guet, au quartier du Pont-Neuf. J’ai eu l’occasion de juger son savoir-faire et sa fidélité.

    L’attente fut longue et cruelle pour Nicolas qui s’accusait d’avoir accepté la proposition de Naganda et de l’avoir ainsi précipité dans une opération hasardeuse où il risquait sa vie. Puis, peu à peu, la machine policière se mit en branle et les réponses affluèrent. Au fur et à mesure de leur arrivée chacune était triée et analysée. Le sergent Gremillon les avait rejoints et s’était mis lui aussi à la tâche. Son visage ouvert et sa gentillesse avaient conquis chacun, même Bourdeau toujours suspicieux et fermé à l’égard de ceux qui approchaient le commissaire. Le silence monacal du bureau de permanence n’était troublé que par les entrées du père Marie apportant les derniers messages parvenus.
    – Mes amis, dit Nicolas levant la tête du papier qu’il venait de noircir, je crois qu’il est temps

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