L'Ile du jour d'avant
semaine s’était écoulée depuis le jour de leur rencontre. Le père Caspar célébra la messe, puis il s’adressa à lui d’un air décidé.
« Je ne peux pas attendre que toi à natare apprenne », avait-il dit.
Roberto répondit qu’il n’y allait pas de sa faute. Le jésuite admit qu’il n’y allait peut-être pas de sa faute, mais qu’en attendant les intempéries et les animaux sauvages étaient en train de lui ravager l’Observatoire, dont il fallait au contraire prendre soin chaque jour. En raison de quoi, ultima ratio , il ne restait qu’une solution : c’est lui qui irait sur l’Île. Et à la question sur la façon dont il s’y prendrait, le père Caspar dit qu’il essaierait avec la Cloche Aquatique.
Il expliqua que depuis beau temps il étudiait comment naviguer sous l’eau. Il avait même pensé construire un bateau de bois renforcé en fer et à double carcasse, comme s’il s’agissait d’une boîte avec son couvercle. Le navire aurait eu soixante-douze pieds de longueur, trente-deux de hauteur, huit de large et il était suffisamment lourd pour descendre en dessous de la surface. Il aurait été mû par une roue à pales, actionnée par deux hommes à l’intérieur, comme font les ânes avec la meule d’un moulin. Et pour voir où l’on se dirigeait, on faisait sortir à l’extérieur un tubospicillum , une lunette qui, par un jeu de miroirs internes, aurait permis d’explorer de l’intérieur ce qui se passait en plein air.
Pourquoi ne l’avait-il pas construit ? Car ainsi est faite la nature – disait-il – pour humilier notre insuffisance : il y a des idées qui, sur le papier, paraissent parfaites et puis à l’épreuve de l’expérience elles se révèlent imparfaites, et personne ne sait pour quelle raison.
Cependant le père Caspar avait construit la Cloche Aquatique :
— Et la plèbicule ignorante, si on aurait dit à eux que certains sur le lit du Rhin descendre peuvent en gardant secs les vêtements, et même à bout de bras un feu dans un brasero tenant » on dirait que c’était une démencerie. En revanche la preuve de l’expérientia a eu lieu, et il y a presque un siècle de cela, dans l’oppide de Tolète en Hispagne. Donc j’atteins l’Île maintenant avec ma Cloche Aquatique, en marchant, comme maintenant tu vois que je marche.
Il se dirigea vers la soute, qui était évidemment un magasin inépuisable : outre l’attirail astronomique, il restait encore quelque chose d’autre. Roberto fut contraint de monter sur le tillac d’autres barres et des demi-cercles de métal et un volumineux paquet de peau qui avait encore l’odeur de son cornu de donateur. Peu compta que Roberto rappelât que, si c’était dimanche, on ne devait pas travailler le jour du Seigneur. Le père Caspar avait répondu qu’il ne s’agissait pas là de travail, mais bien de l’exercice d’un art très noble entre tous, et que leur peine serait consacrée à l’accroissement de la connaissance du grand livre de la nature. Et donc c’était comme méditer sur les textes saints dont le livre de la nature ne s’écarte pas.
Roberto dut alors se mettre au travail, aiguillonné par le père Caspar, qui intervenait dans les moments les plus délicats, où il fallait réunir les éléments métalliques par emboîtements déjà prédisposés. En travaillant pendant la matinée entière, il mit ainsi au point une cage en forme de tronc de cône, pas bien plus grande qu’un homme, où trois cercles, celui du haut d’un diamètre plus étroit, celui du milieu et d’en bas progressivement plus larges, se soutenaient parallèlement grâce à quatre lattes inclinées.
Au cercle du milieu avait été fixé un harnais de toile où un homme pouvait se glisser, mais de sorte que, par un jeu de lanières qui devaient ceindre les épaules aussi et la poitrine, celui-ci n’avait pas seulement son aine assurée pour qu’il ne pût aller vers le bas, mais en outre les épaules et le col, afin que le chef n’allât pas toucher le cercle supérieur.
Tandis que Roberto se demandait à quoi pouvait bien servir tout cet ensemble, le père Caspar avait déplié le paquet de peau, qui s’était révélé comme l’idéale gaine, ou gant, ou doigtier de cet assemblage métallique sur quoi il ne fut pas difficile de renfiler, en l’assujettissant de l’intérieur avec des agrafes, de façon que l’objet, une fois fini, ne pût plus être écorché. Et l’objet fini
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