L'inconnu de l'Élysée
monde, et c'est la raison pour laquelle je suis généralement allergique aux gens qui estiment qu'ils ont seuls la beauté et le droit en partage… Chaque culture apporte à l'humanité quelque chose d'essentiel. C'est vrai que je supporte mal l'hégémonie de firmes comme Coca-Cola et que j'ai en permanence des problèmes avec les Américains, toujours à vouloir imposer leur point de vue… »
1 Le 1 er juillet 2006.
2 Michel Basset, copain d'enfance de Jacques Chirac, dans un livre approximatif sur la jeunesse de ce dernier, intitulé Les Vertes Années du Président , situe cet épisode à la fin des années 40. Livre publié en 1996 par les éditions Filipacchi.
3 Entretien téléphonique avec l'auteur, le dimanche 23 juillet 2006.
4 Les Vertes Années du Président , op. cit.
5 Dans une dépêche datée du 6 octobre 2004.
6 Directeur du musée Guimet.
7 La Liberté guidant le peuple , d'Eugène Delacroix.
8 Le 4 avril 2003, au Louvre.
9 In Connaissance des Arts , numéro spécial édité à l'occasion de l'exposition L'Art des sculpteurs taïnos ,qui s'est déroulée du 24 février au 29 mai 1994 au Petit-Palais.
10 Discours de Jacques Chirac pour le départ de Pierre Rosenberg de la direction du Louvre.
11 Idem.
12 Il s'agit de Jacques Friedman, l'ami d'enfance de Jacques Chirac, qui a été nommé en 1995 président de la Commission du Musée des arts premiers.
13 Il s'agit de Jacques Kerchache.
4.
Jacques Chirac et André Malraux
L'évocation du rapport intime de Jacques Chirac à l'art et à la culture, déclenchée par les questions posées sur les origines lointaines du musée des Arts premiers, ne s'est pas arrêtée là. Deux nouveaux noms vont surgir de la mémoire du président : ceux de Jean Chastel, professeur d'histoire de l'Art au Collège de France, et d'André Malraux. Ils rappellent d'abord un point que tous ses biographes ont omis, à savoir que la première mission du jeune auditeur de la Cour des comptes le propulsa dans le domaine de la culture. Malgré son jeune âge, Jacques Chirac n'y joua pas les utilités. Il fut en effet une des chevilles ouvrières d'une grande décision d'André Malraux prise le 24 janvier 1963 : la création de l'Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France. Une réforme qui visait à créer une « conscience artistique » locale, de telle sorte que la culture devînt accessible au plus grand nombre.
« J'ai travaillé comme rapporteur de la Commission culturelle du IV e Plan qui était présidée par le professeur Jean Chastel, spécialiste de la Renaissance italienne, mais aussi pape du xvii e . Tout ce que j'ai appris sur les xvii e et xviii e siècles me vient de lui. Ce grand monsieur n'avait qu'un défaut : une radinerie qui surpassait celle de Giscard ! Il n'avait jamais un sou sur lui et vous laissait toujours payer…
« J'étais le grognard de Chastel. J'ai eu des relations agréables avec lui. Je les ai prolongées par des rapports avec un de ses intimes, Carlos Giulio Argan, un professeur communiste, spécialiste du Quattrocento, qui était par ailleurs maire de Rome. Quand ce dernier est mort, on lui a fait de grandioses funérailles, à la mi-novembre 1992. J'y suis allé et les autorités m'ont placé au premier rang. C'était quasiment moi qui portais le deuil. J'étais le premier derrière le fourgon mortuaire… J'ai été ovationné par les communistes. Il n'y avait d'ailleurs là que des communistes au milieu d'une forêt de drapeaux rouges. Beaucoup de photos furent prises… »
Vérification faite, il y a bien, dans le Rapport général de la commission de l'équipement culturel et du patrimoine artistique du IV e Plan, publié en 1961, deux chapitres qui ont été rédigés par Jacques Chirac : « On ne peut désormais dissocier l'objectif du sauvetage des monuments menacés de celui de leur incorporation dans la vie nationale et internationale » ; plus loin, il est question de « mise à disposition [des œuvres] du plus large public possible ».
Après avoir trouvé trace du travail du jeune auditeur de la Cour des comptes dans les archives du ministère de la Culture, il me restait, au cours de mon entretien suivant, à solliciter la mémoire du chef de l'État sur son rôle exact dans cette grande réforme que fut l'Inventaire. Une fois de plus j'ai été confronté à un Chirac montrant du désintérêt pour son propre passé et dévalorisant tout ce qu'il a
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