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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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et l'âme russe dont le poète Volochine écrivait qu'elle est une “flamme ardente et tourmentée” ». Évoquant la passion de la France pour les œuvres des romanciers, des poètes et des artistes russes, « Quel adolescent français ne s'est ému ou enflammé à la lecture d' Anna Karénine ou des Frères Karamazov  ? », rappelle-t-il.

    Après la littérature russe, toujours guidé par Belanovitch, le jeune Chirac s'est intéressé à l'Inde. La traversée de sa période indienne est faite au grand galop. Pour en savoir davantage, il suffit de se reporter, là encore, à ses discours prononcés lors de voyages officiels en Asie où, loin de Paris, il jette la pudeur aux orties et utilise le « je » pour évoquer ses passions asiatiques.
    À New Dehli, le 25 janvier 1998, il confie ainsi avoir «  été fasciné très jeune » par la civilisation indienne, abordée à travers l'étude du sanscrit. « J'en ai découvert l'âme et la richesse en parcourant les salles de notre musée des arts de l'Asie, le musée Guimet. » Le même jour, il évoque la mort du Mahatma Gandhi, premier grand choc de sa vie : « Je me souviens comme si c'était hier de ma consternation et de mon émotion, ce 31 janvier 1948, lorsque, adolescent, étudiant dans ma chambre, j'entendis à la radio que le Sage avait été victime du fanatisme. Ce jour-là, l'Inde, mais aussi tous les hommes de paix et de bonne volonté du monde, étaient en deuil. » Le Mahatma Gandhi est mort de trois balles de revolver tirées par un fanatique hindou en disant Hey Rama (Oh, mon Dieu). L'apôtre de la non-violence, qui n'avait pas réussi à empêcher la partition entre l'Inde et le Pakistan, pas plus que les horribles massacres qui avaient suivi, tombait à son tour victime de la violence…
    Dans un entretien postérieur, j'ai demandé au président de mieux situer ce moment qui a tant marqué sa vie. Il réagit d'emblée.
    « Ah ça, c'est sûr ! Je vivais à l'époque chez mes parents [il était en seconde C au lycée Carnot, faisait des progrès en français, était toujours faible en version latine, mais bon élève en histoire-géographie], au 95, rue de Seine. J'y avais une petite chambre avec un cosy où il y avait quelques pièces mexicaines – j'aime beaucoup l'Amérique du Sud –, et une radio. Peu de choses dans ma vie m'ont pareillement saisi… »
    Jacques Chirac esquisse une comparaison entre les différents moments dramatiques et à portée historique qu'il a vécus. La mort du général de Gaulle l'a moins touché, dit-il, parce qu'il était « plus âgé ». Ici, le président se lance dans une digression à propos de la façon dont il apprit la nouvelle : « C'est Giscard qui m'a téléphoné en me disant : “Une page est tournée.” » L'actuel chef de l'État a prononcé ces quatre mots en imitant Giscard ! Il enchaîne en évoquant la mort de Pompidou : « J'étais ministre de l'Intérieur, je l'aimais beaucoup, j'étais excessivement triste, je savais qu'il était malade et que ça devait arriver… Enfin, il y a beaucoup de gens qui sont morts, mais je ne crois pas que la mort d'aucun m'ait autant frappé que celle de Gandhi. Il est vrai que j'étais tout jeune… Pour moi, Gandhi incarnait quelque chose de tout à fait exceptionnel… Sa fin m'a traumatisé… »
    Il est probable que c'est encore marqué par le traumatisme de la mort de l'apôtre de la non-violence qu'il signera l'Appel de Stockholm et se fera arrêter par deux policiers en civil, puis emmener au commissariat de la place Saint-Sulpice. Est-ce la même dynamique qui l'a conduit à flirter avec le Parti communiste, à militer contre l'armement nucléaire américain, à vendre L'Humanité-Dimanche , au grand dam de son père ? Michel Basset fait dire 4 au jeune Chirac : « Papa, j'aime mieux vivre avec les communistes qu'être anéanti par une bombe atomique américaine ! »

    Après l'Inde, il a tourné son regard curieux vers la Chine. « Si vous interrogez les responsables politiques chinois, ils vous diront qu'il ne faut pas parler de ça avec Chirac, car il est intarissable, et c'est vrai que je n'étais pas parmi les plus sots. » Et d'évoquer un récent voyage là-bas où il a été sollicité par Christian Deydier, antiquaire parisien, et le directeur du musée de Shanghaï pour donner son avis sur des bronzes archaïques de la période Xian : « J'avais ma petite place naturelle dans cette expertise. »
    À

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