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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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temps, d’une manière tacite, le peu de soin qu’il mettait à observer ce saint jour, reproche que la conscience du jeune homme lui faisait en effet, en se trouvant tout à coup confondu au milieu d’une pareille foule. Lorsqu’il fut parvenu à se frayer un passage à travers un groupe d’hommes qui se tenaient debout à l’entrée de la salle, et qu’il put observer en silence ce qui se passait, il eut bientôt reconnu son erreur.
    Le mauvais temps avait engagé tous ceux qu’il voyait réunis à se couvrir des vêtements les plus propres à les garantir de la pluie, et leur extérieur avait quelque chose de sombre, et même jusqu’à un certain point de repoussant ; cependant il régnait dans toute la réunion un air de calme et de décence qui prouvait que c’étaient des hommes qui savaient du moins se respecter.
    Quelques minutes suffirent pour apprendre à Lionel qu’il se trouvait au milieu d’une assemblée réunie pour discuter des questions qui se rattachaient à la position politique de la ville, quoiqu’il fût assez embarrassé pour découvrir les résultats positifs qu’elle devait avoir. Lorsqu’une question était posée, il se levait un ou deux hommes qui disaient leur avis dans un langage familier, et avec un vice de prononciation si grand, et l’accent si marqué de la province, qu’il était impossible de croire que ces orateurs fussent autre chose que des artisans et des marchands de la ville. Tous, ou du moins le plus grand nombre, avaient un air froid et réfléchi, qui aurait pu faire suspecter un peu la sincérité de leur zèle pour la cause qu’ils semblaient avoir épousée, sans les invectives amères et violentes qu’ils vomissaient de temps en temps contre les ministres de la couronne, et sans l’unanimité parfaite qu’ils manifestaient lorsque chacun donnait son avis selon l’usage des assemblées délibérantes.
    On lut plusieurs propositions dans lesquelles les remontrances les plus respectueuses se trouvaient mêlées singulièrement aux professions les plus hardies des principes constitutionnels, et elles furent adoptées sans la moindre opposition, mais avec un calme qui ne semblait pas annoncer qu’ils y prissent un bien vif intérêt. Lionel fut particulièrement frappé de la manière dont ces propositions étaient rédigées ; l’élégance du style, la pureté des expressions prouvaient assez clairement que l’honnête artisan qui en avait été le rédacteur, et qui s’était égaré dans plusieurs de ses périodes, n’était pas encore bien au fait de l’instrument qu’il avait essayé de manier, et que s’il en connaissait l’usage, cette connaissance était tout à fait récente, et n’était rien moins qu’intime.
    Les yeux du jeune officier erraient de l’un à l’autre dans l’espoir de découvrir les moteurs secrets de la réunion dont il était le témoin, et il ne fut pas longtemps sans distinguer un individu qui lui parut devoir attirer particulièrement ses soupçons. C’était un homme qui semblait à peine au milieu de sa carrière, et dont l’extérieur, ainsi que les parties de son habillement qu’on entrevoyait sous le manteau dont il était couvert, annonçait qu’il était d’une classe plus élevée que le reste de l’assemblée. Ceux qui l’entouraient lui témoignaient un respect profond, sans être servile, et une ou deux fois il s’établit des conversations secrètes et animées entre lui et les autres chefs apparents ; c’était même ce qui d’abord l’avait fait remarquer de Lionel.
    Malgré la répugnance naturelle que Lionel éprouvait pour un homme qui abusait ainsi de son ascendant pour entraîner ses concitoyens à des actes d’insubordination, il ne put s’empêcher d’être frappé du caractère de franchise et d’intrépidité empreint dans tous ses traits. Il était placé de manière à l’avoir constamment en vue, quoique ceux qui l’entouraient fussent en général plus grands que lui ; le soin avec lequel il suivait tous ses mouvements ne tarda pas à attirer l’attention de l’inconnu. Ils continuèrent à s’observer l’un l’autre pendant le reste de la soirée, jusqu’à ce que celui qui semblait exercer les fonctions de président déclarât que l’objet de la convocation étant rempli, la séance était levée, et que l’assemblée pouvait se séparer.
    Lionel, qui était resté appuyé contre un mur, se leva aussitôt, et se laissa entraîner par le torrent

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