Liquidez Paris !
plus loin, et Heide disait l’avoir vu revenir seul. Gunther et Gregor jurèrent au contraire leurs grands dieux qu’il ne les avait pas quittés. Nous apprîmes plus tard que Porta les avait fait filer, non sans leur administrer auparavant la plus belle correction de leur vie.
– Maintenant, écoutez ma boîte ! cria Barcelona qui avait déniché une radio.
Une voix anglaise. C’est plein d’intérêt ! Barcelona note la longueur d’ondes : il a trouvé le P. C. de la 3 e division blindée américaine.
– Hello Yankees ! hurle-t-il dans le micro. Comment ça va ? On vous traite bien ?
– Bonjour Fritz, que deviens-tu ? répond une voix en excellent allemand. Le radio est un Américain d’origine allemande.
– Tu ne saurais pas par hasard comment s’appelle le cochon d’Odin ? demanda en rigolant Barcelona.
– Attends ! Nous avons chez nous quelqu’un qui a habité la Norvège, je vais le lui demander. Garde le contact.
Un instant de silence, puis la voix du radio reprend :
– Fritz ! J’ai le nom de ton cochon. Si vous me jurez de capituler bientôt, on te le donne !
– Tu as ma parole. On est justement en route pour décider Adolf. Donne le nom du cochon, camarade !
– « Brosse d’Or », et il n’appartenait pas à Odin mais à Freyja.
Ce renseignement vaut une victoire ! Nous appelons toutes les autres unités.
– Le cochon s’appelait « Brosse d’Or » !
– Pas vrai ! rétorqua Wolf, le gardien du parc a autos. Il se nommait « Saerimner » et c’était le cochon d’Odin.
Suit une discussion passionnée. La 3 e division blindée U. S. en tient pour « Brosse d’Or », d’autant plus que « Saerimner » leur paraît un nom à consonance nazie ! Nous avançons toujours et passons le Rhin sous une pluie battante. Partout des ruines fumantes, de sinistres villes mortes où les habitants vivent comme des rats ; des enfants affamés courent le long de la colonne en mendiant du pain. Sur tout le pays plane une odeur d’incendie.
Le 25 août, à la radio, nous captons une station interdite : « La 28 e division blindée du général Leclerc est entrée ce matin dans Paris. Les Allemands ont capitulé. En ce moment, toutes les cloches de la ville sonnent à toute volée ; la joie de la population tient du délire. Les Allemands qui se montrant sont piétinés, les gardiens de Fresnes ont été abattus par leurs ex-prisonniers ; les femmes qui ont fraternisé avec les troupes d’occupation sont rasées, dépouillées de leurs vêtements et peintes de croix gammées. Le commandant du Grand Paris, général von Choltitz, est sous la surveillance des troupes américaines. Toute la ville est illuminée. Vive la France ! »
Porta se tapa les cuisses.
– Vous voyez bien ! Il n’a pas réussi à obtenir ses pétards pour faire sauter Paris, maintenant il va en devenir le sauveur. Les grosses légumes, ça arrive toujours à se tirer les pattes !
SVEN HASSEL
LIQUIDEZ PARIS !
Traduit du danois par Ingrid Boissy.
Soldat danois enrôlé de force dans le 27 e régiment de blindés allemand, Sven Hassel raconte le débarquement de Normandie en juin 1944 et la libération de Paris en août, vus par P« autre camp ». Il offre un point de vue original sur cet épisode glorieux de la Seconde Guerre mondiale, encombré de mythes tenaces, souvent propagés par Hollywood.
Ainsi, le général von Choltitz ne fut pas le bienfaiteur qu’on a bien voulu croire : Himmler en personne lui avait donné l’ordre de miner Paris pour transformer la Ville lumière en champ de ruines. S’il ne le fit pas, ce ne fut pas par mansuétude. Au dernier moment, la débâcle, vécue de l’intérieur par le soldat Hassel et ses compagnons d’infortune, va empêcher de mettre en place le dispositif meurtrier…
Récit plein de verve et haut en couleur d’une page mémorable de notre histoire, Liquidez Paris ! jette une lumière nouvelle sur les grandes journées de Pété 1944.
Sven Hassel fut un des seuls survivants de son bataillon. Après guerre, il raconta son histoire dans une série de romans qui connurent un retentissement international Du même auteur ; les éditions du Rocher ont déjà réédité : La Légion des damnés, Les Panzers de la mort et Camarades de front.
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