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L'ombre du vent

L'ombre du vent

Titel: L'ombre du vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Carlos Ruiz Zafón
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enceintes ?
Cela ne signifie pas pour autant que je n'en suis pas capable, hein ?
Parce que si je voulais, je pourrais faire sur-le-cha mp des
triplés à cette idiote de Merceditas, et les
doigts dans le nez, mais...
    –
Avez-vous dit à Bernarda que vous vouliez fonder
une famille ?
    – Pas besoin de dire ces choses-là, Daniel. Elles se lisent
sur le visage.
    J'approuvai.
    – Eh bien,
en ce cas, et dans la mesure où mon opinion peut avoir
quelque valeur, je suis sûr que vous ferez un bon père
et un mari formidable. Même si vous ne croyez en rien,
car au moins vous resterez toujours lucide.
    La joie
éclaira son visage.
    – Vous
êtes sincère ?
    – Bien
sûr.
    – Alors
vous m'ôtez un poids énorme. Parce que, rien que de
penser à mon géniteur et de me dire que je pourrais être pour quelqu'un ce
qu'il a été pour moi, je su is tenté de me
faire stériliser.
    – Soyez
sans crainte, Fermín. D'ailleurs, il n'existe probablement pas de traitement
qui puisse venir à bout de votre vigueur
inséminatrice.
    – Ça,
c'est vrai aussi, réfléchit-il. Bon, allez vous reposer, je ne veux pas vous embêter davantage.
    – Vous ne
m'embêtez pas, Fermín. Et j'ai l'impression que je ne fermerai pas l'œil de la
nuit.
    – Ça fait
du bien là où ça gratte... A propos, je ne vous ai pas parlé de cette boîte
postale, vous vous souvenez ?
    – Vous
avez trouvé quelque chose ?
    – Je vous
avais bien dit de me faire confiance. Ce matin, à l'heure du déjeuner, je me
suis rendu à la grande poste et j'ai taillé une bavette avec une vieille
connaissance qui y travaille.
La boîte postale numéro 2321 est au nom
d'un certain José María Requejo, un avocat dont le cabinet est situé rue
Léon-XIII. Je me suis permis d'aller vérifier l'adresse de l'intéressé et je
n'ai pas été surpris de
découvrir qu'elle n'existe pas, mais je suppose que vous étiez déjà au courant.
Le courrier qui arrive à cette boîte est ramassé depuis des années par la même
personne. Je le sais parce que certaines lettres provenant d'un administrateur
de biens sont envoyées en recommandé, ce qui implique de signer un reçu en
présentant sa carte d'identité.
    – Qui
est-ce ? Un employé de Me Requejo ? demandai-je.
    – Je ne le
sais pas encore, mais j'ai ma petite idée. Soit je me trompe complètement, soit
le dénommé Requejo existe autant que la Vierge de Fatima. Je peux seulement
vous donner le nom de la personne qui vient chercher le courrier : Nuria
Monfort.
    J'en
restai pantois.
    – Nuria
Monfort ? Vous en êtes sûr, Fermín ?
    – J'ai vu
plusieurs reçus de mes propres yeux. Tous portaient ce nom et le numéro de la
carte d'identité. A voir vos yeux de merlan frit, je constate que cette
révélation vous surprend.
    – Plutôt.
    – Puis-je
vous demander qui est cette Nuria Monfort ? L'employé m'a dit qu'il s'en
souvenait à la perfection, vu qu'elle est venue retirer le courrier il y a une
quinzaine de jours et que, à son jugement impartial, elle était mieux roulée
que la Vénus de Milo, avec des nichons de marbre. Et je fais confiance à son
coup d'oeil, car, avant la guerre, il était professeur d'esthétique à l'Université, mais comme c'était un lointain cousin de
Largo Caballero, aujourd'hui il lèche les timbres...
    – J 'ai vu
cette femme aujourd'hui même, chez elle, m urmurai -je.
    Fermín
m'observa, stupéfait.
    – Nuria
Monfort ? Je commence à croire que je me suis trompé sur votre compte,
Daniel. Vous êtes devenu un authentique
Casanova.
    – Ce n'est
pas ce que vous pensez, Fermín.
    – Alors vous êtes idiot. Moi, à votre âge,
j'étais tou jours d 'attaque, matin, midi et soir.
    Je contemplai ce petit homme maigre et osseux, avec son nez
proéminent et son teint citron, et me rendis compte
qu'il était devenu mon meilleur ami.
    – Je peux vous raconter quelque chose, Fermín ? Quelque chose qui me trotte dans la tête depuis un bon bout de temps.
    – Bien
sûr. Surtout si c'est scabreux et si ça concerne cette
péronnelle.
    Pour la
seconde fois de la soirée je relatai pour Fermín l'histoire de Julián Carax et l'énigme de sa
mort. Fermín écoutait avec la plus grande attention, prenant des notes et
m'interrompant de temps à autre pour se faire préciser un détail dont l'importance m'échappait. En m'entendant
moi-même, les lacunes de cette histoire m'apparaissaient de plus en plus
évidentes. A plusieurs reprises, je dus hésiter, car je m'égarais en

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