Marie Leszczynska
armées grâce aux rapports qu’elle reçoit chaque jour… et n’oublie pas de faire la cour à Marie Leszczyńska !
Louis XV rentre en septembre pour le traditionnel séjour à Fontainebleau. Sa passion pour sa maîtresse est aussi ardente et les pouvoirs de celle-ci toujours plus grands. Le prince de Croÿ reconnaît qu’elle entraîne à sa suite « la cour d’un premier ministre ». Amis, courtisans, célébrités du monde des arts et des lettres s’y précipitent. Le 30 décembre 1747, pour la représentation de L’Enfant prodigue, comédie larmoyante de Voltaire, la marquise obtient du roi l’autorisation d’y convier l’auteur. Jeanne-Antoinette joue devant lui le rôle de Lise, la fiancée abandonnée. Barbier, qui reproche à Voltaire d’abuser de la familiarité des princes, cite le compliment apparemment anodin que l’auteur dédie à la marquise en guise de remerciement :
« Ainsi donc vous réunissez
Tous les arts, tous les goûts, tous les talents de plaire ;
Pompadour, vous embellissez
La cour, le Parnasse et Cythère.
Charme de tous les coeurs, trésor d’un seul mortel,
Qu’un sort si beau soit éternel !
Que vos jours précieux soient marqués par des fêtes !
Que la paix de nos champs revienne avec Louis !
Soyez tous deux sans ennemis,
Et tous deux gardez vos conquêtes. »
Ravie d’être reconnue comme la compagne de Louis XV, la marquise ne fait rien pour garder ce poème secret. Le dauphin vilipende une fois de plus la favorite et Mesdames réclament réparation pour ce crime de lèse-majesté. Quant à Marie Leszczyńska, elle se contente de désapprouver le poème, sans vraiment s’en offusquer.
Tolérance puis connivence
Au retour du roi, le couple amoureux s’est reformé. Toutefois, la puissante maîtresse n’ignore pas sa fragilité. Combien de temps pourra-t-elle encore distraire et protéger le roi ? Elle n’a que vingt-sept ans mais, en amour, elle n’a jamais été un foudre de guerre et ses trois fausses couches – naturelles ou provoquées – ont entraîné de sérieux dérangements gynécologiques. Malgré l’usage d’aphrodisiaques et d’élixirs mirobolants, elle a, selon ses propres termes, une nature de « macreuse » [9] et peine à satisfaire son amant.
Désormais, elle tremble à l’idée d’être un jour rejetée par le roi. Elle n’a toujours pas lieu de redouter la reine, mais l’hostilité des enfants de France la tourmente. En mars 1748, elle suit avec inquiétude le retour de Fontevrault de Madame Victoire
. C’est maintenant une séduisante jeune fille de quinze ans. En décembre, arrive Madame Infante, bientôt rejointe par sa fille, l’infante Isabelle. « Babet », comme la surnomme son père, s’installe à Versailles pour dix mois. En égayant le roi, ces retrouvailles le rendent encore plus influençable. Et si, par piété filiale, il décidait de rentrer dans le droit chemin en renouant avec la religion ? Cette menace épouvante la marquise. Pour l’heure, ses craintes sont infondées. Le roi ne peut se passer de sa présence et les manigances des enfants royaux ont peu d’influence sur leur relation. Mais la marquise songe au futur…
Lors de son séjour à Versailles, Madame Infante loge dans l’appartement de la comtesse de Toulouse qui, très âgée, s’est retirée dans sa maison de Versailles. Cet appartement dit « des Bains » avait été aménagé autrefois pour Madame de Montespan [10] . Situé à l’angle nord-ouest du rez-de-chaussée du château, il est conçu pour communiquer avec l’appartement du roi par un petit escalier intérieur. Passage qu’empruntait quotidiennement Louis XV adolescent pour se rendre chez ses chers amis, le comte et la comtesse de Toulouse. Après le départ de la fille aînée du roi, Madame de Pompadour s’empresse de le revendiquer, consciente de l’intérêt stratégique du lieu. Elle l’obtient… à la grande fureur de Mesdames qui rêvaient de se rapprocher de leur père ! Madame Henriette
tente de parlementer, mais Louis XV reste inflexible malgré ses récriminations : « Que la marquise loge en haut ou en bas, le roi mon père n’ira pas moins ; il faut autant qu’il descende pour remonter que de monter pour descendre ; tandis que moi, Dame de France, je ne puis loger en haut dans les cabinets. »
Pour la marquise, cet appartement est un gage de sécurité. Elle sait que son bonheur de maîtresse arrive à son terme et
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